Critiques // « L’échange » de Paul Claudel, mis en scène par Xavier Lemaire au Théâtre Mouffetard

« L’échange » de Paul Claudel, mis en scène par Xavier Lemaire au Théâtre Mouffetard

Mai 23, 2011 | 7 commentaires sur « L’échange » de Paul Claudel, mis en scène par Xavier Lemaire au Théâtre Mouffetard

Critique de Rachelle Dhéry

Marthe : « Pourquoi tu as monté cette balançoire ? »
Louis : « J’aime ne tenir à rien. »

© Lot

L’histoire prend vie en Floride après la guerre de sécession. Marthe, une jeune et simple femme au foyer, et son mari Louis Laine, un jeune homme passionné, fougueux et encore très enfantin, vivent au bord de l’eau, dans une petite cabane. Louis a été engagé comme gardien de la propriété d’un riche américain Thomas Pollock Nageoire, marié à une ancienne actrice Léchy Elbernon. Thomas Pollock Nageoire va proposer à Louis d’acheter sa femme. Attiré par l’argent comme un jeune chien fou, Louis, pris dans les griffes de la star vieillissante, et en quête absolue de liberté, accepte. Marthe, enceinte, va tout faire pour conserver l’homme sauvage qu’elle aime désespérément. Mais le couple-araignée a tissé une dangereuse toile sur les jeunes gens. Seul le feu, seule la mort, viendront à bout de cette intrusion destructrice.

Thomas Pollock Nageoire : «  N’ayez pas peur, elle joue. »

© Lot

Xavier Lemaire, à la fois comédien et metteur en scène, propose ici de mettre en scène la seconde version de L’échange (1951), qu’il qualifie de « plus essentielle, plus charnelle, plus joueuse, plus théâtrale, plus moderne ». Il entraîne à nouveau avec lui sa compagnie Les Larrons (qu’il a créée en 1992). Dans son œuvre, Paul Claudel (1868-1955) crée des personnages aux passions profondes, tous guidés par des volontés égoïstes, chacun à sa façon. La langue frôle la poésie parfois, tout en conservant une tendance réaliste. Mais c’est le lyrisme fort des monologues et des pensées avouées qui rappellent que l’on est au théâtre. Dans cette pièce, deux couples se font face, s’affrontent et se détruisent. Il y a un thème puissant. Une langue magnifique. Des personnages bouleversants. Bref, tous les ingrédients sont réunis pour aboutir normalement à une pièce de théâtre inoubliable. Alors pourquoi, ici, la sauce n’a-t-elle pas pris ?
Comment peut-on expliquer un tel fiasco ?

Le bel emballage était tristement vide.

© Lot

Pourtant, le départ était rassurant: un décor en bois évoquant brillamment la nature, et cette belle cabane au bord de l’eau, près d’un ponton, bercée par les clapotis de l’eau ; des costumes très réussis. Soit, une ambiance visuelle, sonore et charnelle admirable. Cependant, dès les premiers dialogues, le feu s’éteint, les mots s’éloignent, avec l’émotion. Quel gâchis. Les comédiens ne ressentaient pas, donc ne transmettaient pas. Cela manquait de subtilité. Les regards au lointain ne se posaient nulle part, donc n’embarquaient pas. Et, sans émotion, pas d’attachement aux personnages, pas d’empathie dans leurs tragédies, pas de rire dans l’humour parfois sinistre et cruel de Claudel. Les larmes deviennent pathétiques et les caractères des personnages frôlent parfois le grotesque.

L’échange
De : Paul Claudel
Mise en scène : Xavier Lemaire
Avec : Isabelle Andréani, Grégori Baquet, Gaëlle Billaut-Danno, Xavier Lemaire
Décors : Caroline Mexme
Lumières : Didier Brun
Costumes : Virginie Houdinière
Musique : Régis Delbroucq
Assistant : Michaël Gaudeul

Du 19 mai au 3 juillet 2011

Théâtre Mouffetard
73 rue Mouffetard, Paris 5e
www.theatremouffetard.com

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