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Critique . « My Secret Garden » de Falk Richter au Théâtre du Rond-Point

Juin 09, 2012 | Aucun commentaire sur Critique . « My Secret Garden » de Falk Richter au Théâtre du Rond-Point

Critique de Camille Hazard

Auteur, traducteur mais aussi metteur en scène associé à la Schaubühne de Berlin, Falk Richter renoue une seconde fois avec Stanislas Nordey. Leur collaboration remonte au festival d’Avignon 2008 où fut présenté Das System, un montage à partir de différents textes de Richter et mis en scène par S. Nordey.

D’Hitler à Facebook

C’est à partir de notes, de réflexions éparses, de souvenirs personnels rédigés, que s’articule My Secret Garden. Richter structure son journal intime, Nordey l’accompagne en mise en scène et incarne son personnage aux côté de son fidèle comédien Laurent Sauvage. Enfin, la performeuse et plasticienne Anne Tismer complète ce quatuor en tenant plusieurs rôles féminins.

Si Stanislas Nordey empoigne le texte dans un jeu frontal et frénétique, cela ne suffit malheureusement pas à nous tenir en haleine très longtemps. Le texte, très bavard est débité avec fougue, mêlant ruptures, gestuelles arrêtées, oscillations vocales mais rien n’empêche ce désespérant constat : En quoi ce texte, peut-il avoir un intérêt ?

Il y a bien au début un parti pris, une atmosphère, une amorce d’histoire personnelle qui s’installent : Richter, à travers la bouche de Nordey, confie son enfance, son appartenance à une famille anciennement partisane du régime nazi et à présent séduite par l’apparat du capitalisme. Il vomit son dégoût pour ces êtres familiaux abjects, pour cette nouvelle époque consumériste qui voit le jour, ce faux déballage de liberté qui trahit une dictature de l’ombre. Mais plus le texte se déploie plus Richter rentre dans le détail et si nous assistions au début du spectacle à un pamphlet, nous voici maintenant en plein bavardage.

Tout au long de cette première partie/monologue, L’auteur (S.Nordey) cherche quel pourrait être le titre de son spectacle. Recherche qui permet d’aborder tous les sujets pèle mêle, recherche qui permet toutes les transitions pour lier anecdotes et conversations de comptoir.

©DR

Mon jardin secret de narcisses

Laurent Sauvage entre en scène, lui aussi est l’auteur. Plus mature, plus marqué, plus désespéré. Il en devient même avec sa chemise défaite, les cheveux au carré négligés, les épaules voutées, la caricature de l’artiste maudit, de l’auteur en mal d’expériences trash, narcissique assumé et en mal d’amour. Car c’est surtout de cela dont souffre le spectacle ! De narcissisme insupportable. Le texte, la mise en scène, le jeu des deux comédiens deviennent la vitrine du nombril de Mr Richter. Un auteur qui fait jouer son journal intime quotidien et ennuyeux, qui en vient à dialoguer avec lui-même sur le plateau, qui ne parle que de lui, et qui finit par regarder sur un écran, le visage d’un enfant qu’on suppose être l’enfant du futur mais aussi l’enfant du passé : lui-même.

Anne Tiesmer fait quelques apparitions, d’ailleurs impossible à apprécier car elle ne projette pas assez sa voix pour que l’on puisse entendre le moindre son et lorsqu’elle utilise un micro, seules des bribes de mots nous parviennent.

NO FUTURE !

Quelques gueulantes contre le capitalisme ponctuent le texte, des hurlements dénoncent « des milliards, et des milliards d’impôts versés à un secteur financier devenu ingouvernable, incontrôlable… ». Le spectacle dans son ensemble se réclame d’un théâtre subversif mais rien dans le texte ni dans les idées ne vient nous perturber. Le passé nazi est désespérant, le futur capitaliste l’est tout autant…Belle idée fleuve.

Ces invectives contre le capitalisme, contre les modèles qu’il produit, contre les stéréotypes, contre l’individu qui perd son âme, contre le monde qui s’affole, tout cela est déjà rebattu depuis longtemps par les médias, les politiques, le monde du spectacle…, Nous serions attendris si c’était un adolescent qui nous jetait ces mots à la figure avec rage et passion mais Falk Richter, auteur, metteur en scène… ! Il nous en faut un peu plus !

Enfin que dire aussi de l’habitude hypocrite, des metteurs en scène qui portent sur scène la voix des plus faibles, qui s’indignent de l’injustice faite au peuple mais qu’on ne voit jamais jouer autre part que dans les grands théâtres.

A la question que se pose Falk Richter « Comment un auteur assis face à son MacBook Air à Avignon, qui ne peut vraiment pas se plaindre de la belle vie qu’il mène ici, peut-il prendre position sur ces sujets sur un plateau et découvrir sa propre vision de la société ? ». Peut-être pouvons-nous lui suggérer d’aller à la rencontre des gens, de ne pas se couper d’eux en tout cas et d’aller jouer ses spectacles là où l’on a plus de chance de les trouver, certainement plus facilement qu’au théâtre du Rond-Point ou que dans les scènes nationales…

My Secret Garden
De Falk Richter
Traduction Anne Montfort
Texte édité chez l’Arche Editeur

Mise en scène : Stanislas Nordey et Falk Richter
Avec Stanislas Nordey, Laurent Sauvage et Anne Tiesmer
Collaboration artistique : Claire-Ingrid Cottenceau
Collaboration à la dramaturgie : Jens Hillje
Musique : Malte Beckenbach
Lumières : Philippe Berthomé
Scénographie : Katrin Hoffmann
Vidéo Martin :  Rottenkolber

Du 7 juin au 24 juin 2012 – À  21h – Dimanche à 15h – Relâche le lundi

Théâtre du Rond-Point
2, bis Avenue Franklin Roosevelt – 75008 Paris
M° Franklin Roosevelt / Champs Elysées Clémenceau
Réservation 01 44 95 98 21
www.theatredurondpoint.fr

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