Critiques // « Still Life », mise en scène et conception de Dimitris Papaioannou, au Théâtre de la Ville

« Still Life », mise en scène et conception de Dimitris Papaioannou, au Théâtre de la Ville

Oct 16, 2015 | Commentaires fermés sur « Still Life », mise en scène et conception de Dimitris Papaioannou, au Théâtre de la Ville

ƒƒƒ article de Denis Sanglard

4789208_6_205c_still-life-choregraphie-par-dimitris_c97110502577efd5049328427a4de165© Julian Mommert

Still life, en français et dans le domaine de la peinture se traduit, peut se traduire par nature morte. C’est un peu ça et pas tout à fait. Une vie en suspens, en attente. Quelque chose qui peut advenir, concentré en quelques images symboliques et qui résument une vie, son essence, son sens. Still Life de Dimitis Papaioannou, c’est ça. Une création qui, à travers le mythe de Sisyphe évoqué, ce n’est pas un hasard, offre une image de la Grèce concentrée entre modernité et passé, entre le bouleversement politique et la mythologie matricielle. Une création éminemment plastique. Où les corps en scène sont soumis à d’étranges métamorphoses. Parfois dieux eux-mêmes ou héros mythologiques, cariatides et temples tout à la fois. Ou simples humains soumis au poids du défi, de la faute et du temps. Avec rien, ou si peu. Quelques pierres jetées. Un ciel d’orages qui n’est rien moins qu’une bâche plastique si légère, si lourde de menace, que l’homme ose tutoyer bientôt les cieux, un escabeau pour atteindre l’olympe grondant, une simple pelle pour défier les dieux. Un mur de plâtre absorbe et blanchit les corps, accouche et démembre d’étranges êtres, hybrides et hermaphrodites. Ainsi l’homme surgit, naît de la matière. Un fessier mis à nu, un dos qui se penche, c’est Atlas. Des rubans de scotch arrachés du sol et c’est l’Olympe tout entier qui tonne. Quelques pierres amoncelées, portées en équilibre précaire, c’est le poids d’une vie qui s’écroule, petit tas de cailloux sitôt et patiemment refait et, de nouveau, bientôt effondré… Les images se succèdent et dessinent un portrait en creux et singulier de la Grèce. C’est une pièce très visuelle où le temps semble suspendu, étiré. Rien n’est jamais précipité. Nous sommes captivés par cette poésie, cette épure. Il n’y a rien vraiment d’extraordinaire. Mais cette densité dans l’apparente simplicité, ce presque rien, ces corps immarcescibles et fragiles tout à la fois, dans l’espace habillé de vide, de quelques pierres et de poussière, offre matière aux rêves, à l’imagination, à la réflexion. Mais nous sommes au théâtre, un moment de partage, et c’est bien le sens de la dernière et surprenante image où la réalité descend du plateau, nous dessille, nous fait nous ébrouer.

 

Still Life
Concept visuel, mise en scène, costumes et lumières Dimitis Papaioannou
Composition sonore Giwrgos Poulios
Sculpture et peinture Nactarios Dyonisatos
Avec la collaboration pour les costumes de Vassilia Rozana
Avec Prokopis Agathokleous, Drossos Skotis, Michalis Theophanous, Costas Chrysafidis, Christos Strinopoulos, Kalliopi Simou, Pavlina Andriopoulou et Dimiti Papaioannou

Du 13 au 16 octobre 2015, 20h30

Théâtre de la Ville
2, place du Châtelet – 75004 Paris
Réservations 01 42 74 22 77
www.theatredelaville-paris.com

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