Critiques // « Ni une ni deux » d’Eugène Durif au Théâtre Aire Falguière

« Ni une ni deux » d’Eugène Durif au Théâtre Aire Falguière

Avr 11, 2010 | Aucun commentaire sur « Ni une ni deux » d’Eugène Durif au Théâtre Aire Falguière

Critique d’André Antébi

L’œil brillant du clown, alerte, naïf, effaré, le nez presque rouge, trois corps présents et généreux, engagés autour d’une pièce tout droit sortie de l’univers poétique, loufoque, baroque, barré d’Eugène Durif. Voilà le décor. Rien de plus. Un plateau vide. Trois corps.

Ni une ni deux raconte l’histoire… Non pas comme ça. Ni une ni deux ne raconte pas une histoire ! Elle met en présence deux femmes (Amélie Prévot et Marine Toulet) et un musicien (François Perrin) dans une situation qui les dépasse, sur une scène de théâtre donc, prisonniers de leur condition. Ils semblent chercher une issue, briser le silence, au moins créer un lien entre eux. D’ailleurs ils se parlent, s’adressent des mots, et même des phrases. Un dialogue s’engage t-il ? Son apparence du moins…Un dialogue où le sens ne serait qu’une vieille et lointaine arrière pensée. Le musicien peut bien tenter de répondre en parole ou en musique, seulement son instrument n’est pas le bon…Dans ce truculent ballet de langage, les assonances, les dissonances, les quiproquos et autre cul de sac de la parole nous donnent une image à peine exagérée, simplement poétisée et sublimée de la folie communicative de notre société où le sens et le réel ont été sacrifiés. Tout pour faire taire le silence et combler le vide. Du bruit, des mots, des cris, des chansons, du rire, du n’importe quoi, mais par pitié pas le silence dans lequel l’introspection et la pensée risqueraient peut-être de refaire surface !

Anne Marion-Gallois a fait avec ses comédiens un beau travail sur le clown, sa tenue et son corps, constamment tournés vers le monde, en questionnement toujours sur son absurdité. Les comédiens, à l’origine du projet, défendent leur spectacle avec une grande générosité. Le texte d’Eugène Durif présente de nombreuses difficultés (l’overdose de mots guette, le huis-clos sartrien ou beckettien n’est pas loin non plus) et le spectacle pourrait s’essouffler si ce langage si particulier à l’auteur n’était pas soutenu avec tant de sincérité, d’humour et de générosité par la troupe Art Factory.

Ni une ni deux
De : Eugène Durif
Mise en scène : Anne Marion-Gallois
Avec : Amélie Prévot, Marine Toulet, François Perrin

Du 19 mars au 1er mai 2010

Théâtre Aire Falguière
55 rue de la Procession, 75 015 Paris
airefalguiere.wordpress.com

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