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Article de Denis Sanglard
Huis clos futuriste. Un groupe d’élus attend son messie, un enfant. Hors du monde, isolés, ces individus pas plus héroïques que ça, paumés à vrai dire, sont en proie au doute. Pourquoi sont-ils élus ? Quel sens donner à leur salut ? Menteurs, manipulateurs, jaloux, impulsifs, choisis par le messie et condamnés à vivre ensemble pour l’éternité, ça passe ou ça casse. Mockumentary of a contempory saviour de Wim Vandekeybus interroge notre humanité à l’aune du futur et du fait religieux. Pour qui attend de Wim Vandekeybus une nouvelle création dansée, c’est raté. Ça casse. Certes la danse est présente, comme un fil conducteur, mais réduite à la portion congrue et franchement pas à son meilleur quand on connait les impulsions nerveuses qui nourrissent formidablement ses créations antérieures. Tout occupé donc à libérer la parole, Wim Vandekeybus en oublie hélas la danse. Place au texte donc et au son particulièrement, nulle image vidéo ici, et c’est là que le bât blesse. Salmigondis mystico-futuriste, ou en hommage flamand potjevleesch, certes bien écrit mais trop souvent obscur, lourd même, on décroche très vite. Cette création est au premier abord séduisante, la scénographie réussie (avec ce plafond, cercle mobile qui dessine l’espace, oppresse ou libère, dissimule aussi), les acteurs/danseurs impeccables, mais le propos par trop prophétique et visionnaire, ou semblant tel, n’apporte rien. L’impression qui prévaut d’une resucée new-age fait sourire quand il n’agace pas. C’est très bavard et vain. De cette création on peut au moins retenir le travail sur le son, matière sonore expressive qui participe à l’ensemble comme un contrepoint important. Une masse sonore vibrante, organique, qui enrobe l’espace, devient un paysage, donne le ton, impulse la dramaturgie, l’action, interagit avec les Elus. Même les voix se métamorphosent parfois. Wim Vandekeybus ici expérimente avec l’aide de l’IRCAM un nouvel outil qu’il met au service de sa mise en scène et là, avouons-le, c’est réussi. Mais insuffisant pour ne pas masquer le vide sidéral, ce trou noir, dans lequel le spectateur est englouti malgré la haute tenue et la qualité scénographique de cette création hybride. A moins de voir l’ensemble au second degré, comme un bon film S.F de série B naïf, ça passe. Ultime solution pour ne pas lâcher prise avant l’arrivée du messie.
Mockumentary of a contempory saviour
Mise en scène et chorégraphie Wim Vandekeybus
Crée et présenté par Anabel Lopez, Maria Kolegova, Yun Liu, Daniel Copeland, Saïd Gharbi, Jason Quarles, Flavio D’Andra
Texte Bart Meuleman, Ultima Vez
Assistant artistique Jerry Killick, Aïda Gabriël
Dramaturgie Aïda Gabriëls, Meryem Beyram
Scénographie Wim Vandekeybus, Meryam Beyram
Musique et création sonore Charo Calvo
Co-création sonore et réalisation informatique IRCAM Manuel Poletti
Diffusion sonore Bram Moriau assisté de Martin Antiphon (IRCAM)
Voix saviour Maxim Daish Beley
Assistant mouvement German Jaurequi
Création lumière Davy Deschepper et Wim Vandekeybus
Stylisme Isabelle Lhoas assistée de Isabelle de Cannière
Régisseur général Tom de With
SFX Zephir Wildlife et Saska VerreyckenDu 1er au 4 juin à 20h30, le dimanche à 17h
Le 104
5 rue Curial
75019 ParisM° Riquet
Réservations 01 53 35 50 00
www.104.fr
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