Critiques // « Les amnésiques n’ont rien vécu d’inoubliable » d’Hervé Le Tellier au Lucernaire

« Les amnésiques n’ont rien vécu d’inoubliable » d’Hervé Le Tellier au Lucernaire

Avr 29, 2011 | Aucun commentaire sur « Les amnésiques n’ont rien vécu d’inoubliable » d’Hervé Le Tellier au Lucernaire

Critique d’Evariste Lago

« A quoi tu penses ? »

Je pense que je ne sais pas ce que je pense de cette pièce.

Les amnésiques n’ont rien vécu d’inoubliable est une adaptation de l’œuvre éponyme d’Hervé Le Tellier publié en 1998 par Frédéric Cherboeuf. Cet ouvrage reprend les ficelles des ouvrages de Perec, le Je me souviens, liste non exhaustive des souvenirs de l’auteur, et de son compagnon d’écriture Queneau, les Exercices de style, où une même histoire est racontée quatre-vingt-dix-neuf fois de manières différentes. Les amnésiques n’ont rien vécu d’inoubliable s’inspire des pensées de l’auteur pour raconter une histoire d’amour banale entre deux êtres mouillés, avec différents points de vue.

Nous sommes en plein dans l’écriture oulipienne (de Oulipo, Ouvroir de littérature potentielle : une écriture sous contrainte). Hervé Le Tellier a rejoint ce groupe en 1992.

© Maëlle Grange

Deux comédiens, Isabelle Cagnat et Etienne Coquereau s’immergent dans une baignoire au milieu de leur salle-de-bain. Un toilette, un porte serviettes et une sortie de bain. Nous entrons dans l’intimité de ce couple. Peut-être trop d’ailleurs : certains spectateurs sont assis sur le plateau et profitent vraiment de la nudité du comédien, à pouvoir en palper.

A intervalles réguliers la Femme demande à l’Homme : « A quoi tu penses ? » Et lui, sans relâche, de distiller ses pensées.

Le style oulipien, on aime ou on n’aime pas ! On ne peut pas rester indifférent au style d’écriture. L’écriture oulipienne s’adapte-t-elle bien au théâtre ? Le problème est peut-être là. A force, les incessants « A quoi tu penses » barbent quelque peu. Pas le temps, non plus, de méditer les pensées de l’auteur. Car après tout, entendre ses pensées c’est bien joli, avoir le temps pour les analyser et pour se faire une opinion de la pensée de l’auteur c’est mieux. Et autant la lecture le rend possible, autant cela est peu envisageable au théâtre.

Néanmoins, la mise-en-scène de Frédéric Cherboeuf est pleine de sens, parfois belle (la fin), parfois vulgaire (la nudité d’un seul comédien, pourquoi pas des deux ?) et très cinématographique (les coupures musicales et la scénographie).

Les amnésiques n’ont rien vécu d’inoubliable
De : Hervé Le Tellier
Mise en scène : Frédéric Cherboeuf
Avec : Isabelle Cagnat et Etienne Coquereau
Lumières et décors : Raphaël Dupeyrot

Du 27 avril au 18 juin 2011

Théâtre du Lucernaire
53 rue Notre-Dame des Champs, 75006 Paris – Réservations 01 45 44 57 34
www.lucernaire.fr

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