ƒƒ article de Camille Hazard
Le Collectif She She Pop, installé à Berlin, avait présenté en 2012 pour le Festival d’Automne à Paris, Testament ; spectacle réunissant sur scène des comédiennes et leurs pères. Autour de l’œuvre librement inspirée de Shakespeare, Le Roi Lear, les She She Pop tentaient de renouer le dialogue entre deux générations, de confronter pères et filles sur la société qui évolue, sur la question de l’héritage humain et sur la réconciliation. Deux ans plus tard, ces mêmes filles reviennent accompagnées de leurs mères.
Le Sacre du printemps, spectacle interactif entre comédiens et vidéo, reprend le leitmotiv de l’œuvre de Stravinsky : le sacrifice. Si le compositeur met en scène un cercle de vieux païens regardant une adolescente danser jusqu’à la mort, en offrande au dieu du printemps, chez les She She pop, il s’agit du sacrifice de la Femme au sein de la famille et de la société. Dans ce collectif, ne cherchez pas de metteur en scène, il n’y en a pas. Fidèles à leurs idées, les She She Pop travaillent tous ensemble pour proposer des idées, des pistes à explorer ; temps long à la table, place au dialogue fécond, puis temps assez court sur le plateau pour « organiser » la création.
Quatre panneaux verticaux en voile accueillent la représentation des quatre mères, filmées en vidéo. Sur le plateau, leurs filles (trois comédiennes et un comédien) tentent d’établir un ultime dialogue. Dans le spectacle, tout n’est que rites et rituels. A travers des gestes, des mouvements, des incantations, ces filles nous montrent à quel point il est difficile de sortir du carcan familial et sociétal ; celui-là même qui appelle le sacrifice des femmes. Si ces filles réclament la confrontation et cherchent à convaincre, elles glissent parfois dans le doute et ne condamnent jamais leurs mères; ces mères qui, enfermées dans un autre espace temps, celui de la vidéo, ont droit de réponse et interagissent avec leur progéniture.
Le temps du plateau et celui de la vidéo se confondent comme pour réunir ces deux générations de femmes offertes en sacrifice. Le vidéaste Benjamin Krieg réalise un magnifique jeu de superposition d’images. Les questions du féminisme et du sacrifice abordées, le collectif s’attache profondément à la relation mère-fille dans toute sa douleur, sa non-compréhension mais aussi dans tout son amour et son besoin de protection. Un éventail de ressentis, de sensations intestines nous tenaillent ; nous, spectateurs qui regardons la scène comme les païens de Stravinsky regardons le sacrifice de la jeune fille…
Le Sacre du printemps
Conception She She Pop
De et avec Cornelia et Sebastien Bark, Heike et Johanna Freiburg, Fanni Halmburger, Lisa Lucassen, Mieke Matzke, Irene et Ilia Papatheodorou, Heidi et Berit Stumpf, Nina Teckelenburg
Vidéo Benjamin Krieg
Décors Sandra Fox
Costumes Søvsø
Collaboration musique Damian Rebgetz
Collaboration chorégraphique Jill Emerson
Assistant et collaboration dramaturgie Veronika Steininger
Lumière et direction technique Sven Nichterlein
Son Florian Fischer
Assistante vidéo Anna zettDu 20 au 24 octobre 2014
Tous les jours à 20h30 (spectacle en allemand surtitré en français)Théâtre des Abbesses
31, rue des Abbesses – 75018 Paris
M° Abbesses ou Blanche
Réservation 01 42 74 22 77
www.theatredelaville-paris.com
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