Critiques // « La Parisienne » de Henry Becque au Théâtre Montparnasse

« La Parisienne » de Henry Becque au Théâtre Montparnasse

Oct 06, 2010 | Aucun commentaire sur « La Parisienne » de Henry Becque au Théâtre Montparnasse

Critique de Bettina Jacquemin

Individualités sublimes

Clotilde aime son mari… et son amant. La coquette, déterminée à tisser des liens avec Mme Simpson afin d’obtenir l’aide utile à l’ascension professionnelle de son époux, trouve un réel plaisir en la compagnie du fils de celle-ci. Mais, c’est sans compter sur la jalousie maladive de Lafont, son amant.

© Lot

Qu’on envie Barbara Schulz ! Sublime, dans les costumes de Renato Bianchi, elle virevolte dans un décor inventif de Jean-Michel Adam. Entre méridienne et secrétaire soigneusement fermé à clef, entre mari et amants. Sous la houlette de Didier Long, la comédienne et ses partenaires de scène proposent de mettre en exergue la finesse du texte d’Henry Becque…

Partitions

Véritable création visuelle du côté du Théâtre Montparnasse. La mise en scène proposée par Didier Long flatte l’œil pour mieux souligner l’aspect novateur du texte d’Henry Becque. Costumes d’une incroyable modernité et jeu de miroir. Les comédiens évoluent dans un environnement subtile et inventif, favorable à la partition talentueuse qu’ils présentent sur scène.

© Lot

Il y a un réel plaisir à voir évoluer Barbara Schulz. La jeune femme réussit à transmettre l’enthousiasme (compréhensible) d’incarner une coquette qui maîtrise habilement « son monde » et savoure son art. Et, on s’attache au personnage. La comédienne est suffisamment intrigante pour que l’ambitieuse nous interpelle sans la jamais la juger. On savoure !
Cette partition jouissive, Barbara Scultz la propose face à un magnifique jaloux incarné par Jérôme Kircher. On apprécie l’inventivité dont fait preuve le comédien. Il dote l’amant « cocu » d’une jalousie si palpable qu’elle se caractérise par une grande nervosité. Comment ne pas être charmé par celui dont les multiples mouvements saccadés révèlent finalement la souffrance d’être trompé ? L’apparition du jeune Simpson rend sa douleur bien légitime. Alexandre Guansé incarne la proie idéale de la belle parisienne. Juste comme il faut. Suffisamment pour captiver l’amant… et le public.

Didier Brice est le mari aimant à souhait. Le ‘’bon’’ mari (naïf ?) à qui revient la caustique morale de la pièce. Réplique finale idéalisant le ciment du couple : la confiance…

© Lot

Générosité

Outre les qualités indéniables d’interprétation des comédiens, ils évoluent dans une mise en scène dont la créativité fait écho à leur propre inventivité, on regrette pourtant un manque de rythme. Le spectacle se déroule de manière linéaire. On assiste à l’enchaînement de scènes de vie d’une coquette, situations tirant vers le banal, par la force des choses.

Le récit original manquerait-il de rebondissements ? Henry Becque propose le triptyque dans lequel Feydeau puisera tous les ressorts comiques. Mais, ici, on tend vers la fadeur et on attend un peu de vivacité. L’interprétation des comédiens, brillante et inventive doit-elle être aussi individuelle ? Clotilde est maître dans l’art de la manipulation et Lafont ‘’déborde’’ d’introversion. Un amant très attachant et très attaché. Les extrêmes. Le jeu est généreux mais la partition est individuelle. Ils ne se rencontrent pas.

Le texte ne manque pourtant pas de saveur. Et, c’est peut-être dans les courtes apparitions de Candice Crosmary que l’on en mesure l’intensité. Celle qui interprète la gouvernante de Clotilde souligne l’aspect corrosif des mots de l’auteur, avec simplicité. De part un dévouement silencieux et tout acquis à la cause de la maîtresse de maison, Becque dénonce l’hypocrisie d’une société. Intelligence du texte, talent et complicité. Il manquait peut-être un peu de cette dernière pour que la critique acerbe soit totalement entendue.

La Parisienne
De : Henry Becque
Mise en scène : Didier Long, assisté de Jeoffrey Bourdenet
Avec : Barbara Schulz, Jérôme Kircher, Didier Brice et Alexandre Guansé, Candice Crosmary
Décor : Jean-Michel Adam
Lumières : Laurent Béal, assisté de Didier Brun
Musique : François Peyrony
Costumes : Renato Bianchi

Théâtre Montparnasse
31 Rue de la Gaïté, 75 014 Paris – Réservations 01 43 22 77 74
www.theatremontparnasse.com

Be Sociable, Share!

Répondre

You must be Logged in to post comment.