Critiques // « La Nuit de l’Ours » d’Ignacio de Moral au Théâtre de l’Atalante

« La Nuit de l’Ours » d’Ignacio de Moral au Théâtre de l’Atalante

Mar 04, 2011 | 2 commentaires sur « La Nuit de l’Ours » d’Ignacio de Moral au Théâtre de l’Atalante

Critique d’Audren Destin

Dans « La Nuit de l’Ours », de nombreux sujets sociétaux sont abordés : violence, drogue et alcool, échec scolaire, tentative de suicide, inceste. Un monde chaotique, des parents démissionnaires et des jeunes livrés à eux-mêmes qui racontent leurs blessures intimes. En fait c’est un brin too much.

Ignacio del Moral est un auteur espagnol né en 1957. Il est auteur de théâtre et scénariste de télévision et de cinéma. Il a écrit une vingtaine de pièces et a reçu plusieurs prix dont le prix Carlos Arniche en 2002 pour « La Noche del Oso » (« La Nuit de l’Ours »). Les thèmes de la marginalité et de la violence, de la solitude dans les grandes villes, de la jeunesse sans avenir, laissée pour compte, sont récurrents dans son œuvre. Thèmes que l’on retrouve donc dans cette Nuit de l’ours. Sacré programme ! Comme je le disais plus haut, c’est un poil trop, ces jeunes cumulent vraiment toutes les galères et ils passent leur temps à se raconter leur malheur, à se provoquer et à se lancer des défis. Ils ne fuient pas les problèmes dans des distractions diverses, non, ils errent avec un ours en peluche et s’enfoncent chaque minute un peu plus dans la panade.

© Grégory Fernandes

Pathos Espagnol

« Le texte se destine à des adolescents en cycle secondaire. » C’est ce qu’on peut lire dans le dossier de presse. Ça ne me regarde pas, mais quand même, laissez-leur un peu d’espoir aux jeunes ! Il y a des passages humoristiques dans la pièce, dans le dialogue entre les personnages, qui devraient alléger un peu la lourdeur du propos, mais ça ne marche pas. Peut être est-ce dû à la traduction de l’espagnol au français qui n’est pas forcément évidente, peut être cela vient t-il de la direction d’acteurs, peut être est-ce un peu des deux ? Quoiqu’il en soit de l’interprétation, le texte est franchement rasoir. Bien sûr, il y a des jeunes qui vivent ce type de situations difficiles et  c’est aussi le rôle de l’écrivain, du cinéaste ou du metteur en scène de raconter ces difficultés, mais encore faut-il que ça paraisse réaliste, que ça montre une vérité. Ici, cela ressemble plus à du déballage, sans aucune pudeur, sans aucune retenue. Vous voulez de la misère, et bien prenez ça en pleine poire ! Revenons à cette ours en peluche plein de merde, qu’ils trimballent, qui devient leur mascotte et objet transférentiel. Sérieusement, as-t-on déjà vu des jeunes durs se balader avec un ours en peluche ? L’auteur voit là une métaphore de l’enfance qui est derrière… Bref, il me semble qu’il est parfois préférable de montrer la vérité nue, sans artifices ni grandes images, pour arriver à une forme de poésie. Comme disait Truffaut, il y a plus de poésie dans une scène montrant un enfant en train d’essuyer la vaisselle que dans une scène d’un enfant en costume de velours en train de cueillir des fleurs dans un jardin sur une musique de Mozart. Dans le film de Mathieu Kassovitz, « La Haine », les jeunes galériens trouvaient un flingue, c’est quand même plus crédible qu’une peluche.

Dans la mise en scène il y a une recherche de simplicité et une volonté de créer une sorte de chorégraphie qui rythme le langage et les mouvements des acteurs et représentent les codes physiques de ces jeunes. Mais là encore, ça coince. La physicalité lyrique au sens de l’enthousiasme et de l’exaltation dont parle Claire Richard, la chorégraphe, n’est pas vraiment exaltante. A un moment par exemple, ils dansent d’une manière qui rappelle vaguement, très vaguement, la breakdance. Mais pourquoi ne pas tenter de danser vraiment plutôt que de faire des poiriers ?

La Nuit de l’Ours
De : Ignacio del Moral
Mise en scène : Agathe Alexis
Traduction : Rosine Gars
Avec : Vincent Escure, Olivier Pilloni, Jonathan Salmon
Collaboration artistique : Alain Alexis Barsacq
Assistanat à la mise en scène : Grégory Fernandes
Chorégraphie : Claire Richard
Scénographie : Christian Boulicaut
Créations lumières : Stéphane Deschamps
Créations sonores : Jaime Azulay
Costumes : Angelica Bell

Du 2 au 31 mars 2011

Théâtre de l’Atalante
10 place Charles Dullin, 75018 Paris – Réservation 01 46 06 11 90
www.theatre-latalante.com

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