Critiques // Critique • « La Femme qui frappe », une comédie de Victor Haïm, mise en scène de l’auteur

Critique • « La Femme qui frappe », une comédie de Victor Haïm, mise en scène de l’auteur

Sep 09, 2011 | Aucun commentaire sur Critique • « La Femme qui frappe », une comédie de Victor Haïm, mise en scène de l’auteur

Critique de Dashiell Donello

Dignité dans le travail : la quadrature du sexe ?

Je suis dactylo, enfin le personnage d’une pièce de Victor Haïm, un auteur reconnu, il m’a mis en scène dans un décor humblement voué au travail à la maison. La comédienne qui me joue est épatante et mignonne. Monsieur Haïm nous dit « Marianne Soumoy correspond à ce qu’il faut exiger de ce personnage haut en couleurs, cette femme charmeuse, révoltée, soumise, courageuse enfin puisque le rôle exige, comme dans une partition aux tons contrastés, une virtuosité qui seule génère le rire et l’émotion ». Comment il est le Monsieur qui a écrit tout ça ? C’est mon créateur et je ne sais rien de lui. Peut-être qu’en lisant son texte, je trouverais son secret ? Voyons voir. Là, là ! C’est compliqué. Bizarre. Je ne comprends pas toutes les phrases. Les mots oui. Enfin pas tous. Mais que veut-il dire ? « Le vampire suce toujours deux fois », ça s’appelle.

C’est un roman avec une introduction de 800 pages. Remarque ça me fait du travail, je pourrais payer les obsèques de mon mari. Tiens voilà encore du courrier. 500 pages à chaque livraison. Déjà plus de 7500 pages. Comment qui fait ? Allez tape ma fille ! Jusqu’à la crampe des doigts ! Comme ça, tu auras une avance ! C’est un peu tordu son roman. Tiens la virgule là ? Je ne sais pas si elle est bien en place ? C’est l’occasion de lui donner un petit coup fil ! Quelle chance ! C’est lui-même. Excusez-moi de vous demander pardon, mais je crois qu’il y a une virgule mal placée. C’est un roman exaltant, vous dites ? Pour sûr, vous avez le sens du mot. Et pour la virgule ? Ben ça alors ! Il a raccroché.

J’ai l’impression d’avoir fait une bourde. Mince ! J’ai la crampe de l’écrivain, sans être écrivain. Tiens il manque un mot. Bof ! Pas utile. Pas plus que les couilles du Pape, ou comme une feuille d’impôt sur un chômeur. Voilà qui me fait causer comme Arletty. Bon ! Allez courage ! Je le rappelle. Allo ! Monsieur l’auteur ? C’est encore moi… Oh ! Vous êtes gentil ! Il veut que je lui donne un baiser par téléphone… Ben voilà. Ça vous va ? Que je crie à la façon d’un orgasme ? Ben voilà. Pendant qu’on y est, vous pensez à mon avance ? Mince alors ! Il a raccroché. Va falloir retarder la décomposition mon pauvre mari. Mon avance ce n’est pas encore pour aujourd’hui. Bon. Tape ma fille ! Mais… Il manque la lettre E ? Tant pis. Je rappelle ? Je vais m’habiller sexy, comme ça il ne raccrochera pas. Ben oui hein ? Y faut ce qu’il faut… J’ai l’impression qu’il est plutôt téléphone rose. Allo ! Oui, c’est encore moi. Il manque la lettre E. Quoi ? C’est un lipogramme ? Un Perec ? Ma voix vous fait de l’effet ? Je crois qu’il s’échauffe l’écrivain. Il ne serait pas pervers ? On dit que c’est un obsédé “textuel” adepte du coït téléphonique ! Il se pose la question s’il est l’inventeur du cauchemar drolatique. Même pas. Il y en a eu avant lui et il y en aura après lui. Je sais bien qu’on est le 22 juillet 1969, mais quand même. On a marché sur la lune, et lui il voudrait la mienne, on dirait. J’ai ma dignité ! Il ne serait pas un peu dans l’abus de pouvoir ? Il y en a des kilomètres de mots. Je vais craquer avant la fin. Tiens ! Allons-y voir. C’est tout ? C’est comme ça la fin ? Je suis un rien chagrinée. Ca commençait si bien. Bon ! Venez me voir quand même. Vous me direz, si j’ai bien vu.

La Femme qui Frappe
De et mise en scène : Victor Haïm
Avec : Marianne Soumoy
Décor : Alice Leconte
Lumières : Mohamed Mokaddemini
Chorégraphie : Agnès Covolato

Du 7 septembre au 15 octobre 2011
Du mercredi au samedi à 21h, le dimanche à 15h30

Ciné 13 Théâtre
1 avenue Junot, Paris 18e – Résservations 01 42 54 15 12
www.cine13-theatre.com

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