À l'affiche, Critiques // La Dame de chez Maxim… Ou presque ! de Feydeau / Offenbach, mise en scène de Vincent Goethals au Théâtre du Peuple de Bussang

La Dame de chez Maxim… Ou presque ! de Feydeau / Offenbach, mise en scène de Vincent Goethals au Théâtre du Peuple de Bussang

Août 01, 2017 | Commentaires fermés sur La Dame de chez Maxim… Ou presque ! de Feydeau / Offenbach, mise en scène de Vincent Goethals au Théâtre du Peuple de Bussang

ƒƒƒ article de Denis Sanglard


© Claude Noël

Pour sa dernière saison au théâtre de Bussang, le metteur en scène Vincent Goethals a privilégié les retrouvailles. Ils sont venus, ils sont presque tous là, les acteurs emblématiques qui l’ont accompagné au fil des cinq saisons passé à la direction du Théâtre du Peuple de Bussang. Pour ceux qui virent L’Opéra de quat’sous il y a deux ans, retrouver cette équipe, Valérie Dablemont dans le rôle-titre de la Môme Crevette en tête et Mélanie Moussey en madame Petypon, dans un vaudeville survitaminé est un vrai plaisir. Amateurs et professionnels, on ne voit guère la différence au vu du talent des uns et des autres, d’un même élan généreux traversent le plateau au pas de course. Vincent Goethals pour faire un peu de place à tous, ménageant des apparitions parfois fugaces, n’hésite pas même à broder, à tisser finement et solidement un patchwork où surgissent soudainement des personnages d’autres pièces de Feydeau qui se glissent ici et là, se télescopent, sans que cela ne nous étonne plus que ça. Ainsi voit-on passer Lucette Gauthier, Fontanet et le général Irrigua du Fil à la patte, Dufausset de Chat en poche et d’autres encore invités surprises. Mieux même, clin d’œil malicieux évident, Brecht s’invite sans crier gare dans la chambre des Petypon… Avec ça et en prime Vincent Goethals fait chanter à tout ce petit monde déchainé du Offenbach, airs connus ou inconnus qui se glissent sans souci et le plus naturellement du monde entre deux répliques. Et chanté avec justesse ! Offenbach et Feydeau ne se sont jamais rencontrés, ne pouvaient se rencontrer, objecterons-nous, qu’importe ça marche du feu de dieu. Et en parlant de feu, cette mise en scène est explosive. Valérie Dablemeont, rousse flamboyante ici pour ce faire, ne brûle pas les planches, elle les calcine, pétarade tout feu tout flamme, et entraîne tout ce petit monde dans un galop effréné. Pas de temps mort, pas le temps de respirer. Vincent Goethals privilégie le rythme, infernal. Valérie Dablemont joue de la voix, entre l’oseille et le contralto, tricote des jambes qu’elle lève haut et mène cette sarabande superbement grotesque et pathétique tambour battant. Et tous, nul n’est en reste, de suivre cahin-caha et sans faiblir ce rythme endiablé… Sur ce plateau il y a de la joie, de la folie furieuse, du bonheur, c’est évident, ça se voit, ça se joue et chante. Vincent Goethals s’amuse lui aussi. Entre autre à rétrécir le théâtre, le miniaturiser. La chambre des Petypon est métamorphosée, c’est une maquette du Théâtre du Peuple tout riquiqui où le lit, objet du délit, trône sur un plateau, encadré du même manteau d’arlequin qui bordure la scène. La vie conjugale est un théâtre, Feydeau ne le contredit pas, Vincent Goethals le confirme. Subtile mise en abyme aussi, hommage à ce théâtre qui cinq années durant aura suffi à son bonheur et au nôtre. Cette étroitesse volontaire du lieu, relative, qui oblige à jouer en avant-scène, offre une proximité immédiate avec les spectateurs, nous reviendrons vers eux, et concentre la folie de ce vaudeville, rapproche dangereusement les corps qui jouent au quatre coins, se cherchent et s’évitent, se heurtent aussi, dans cet espace clos de portes battantes qui claquent sèches comme des gifles, exacerbant les tensions et les situations, alimentant les quiproquos et les mensonges. Feydeau c’est toujours une histoire de circulation chaotique des corps. De vitesse. Mais quand enfin l’espace s’ouvre à l’acte deux sur la clairière qui fait office de fond de scène, c’est toute la beauté du lieu, de ce théâtre qui retrouve sa pleine dimension exceptionnelle. La pièce elle-même est comme aérée, momentanément, Vincent Goethals jouant avec justesse avec les perspectives, en opposition volontaire avec l’acte précédent et de celui qui suivra. Et tant qu’à faire, terminer cet acte deux dans le public hilare. Les personnages eux-mêmes respirent et les corps n’ont plus de contrainte, s’échappent provisoirement. Une liberté source encore une fois d’explosion et de folie générale. Dans la salle, le public fait un aaaah de ravissement devant ces portes ouvertes, attendues comme le clou du spectacle, avant de nouveau hoqueter de rire. Car la salle est heureuse ici, hurle de rire, tape des mains et des pieds. Ne boude pas son plaisir. Cette Dame de chez Maxim…ou presque ! –tout est dans le presque- est une vraie réussite autant par la mise en scène, au cordeau, sans chichis, fluide et réussie, que ce qu’elle procure, dans ce lieu précisément où règne entre le public et la scène une osmose, un bonheur évident d’être là, ensemble pour un moment de vrai et rare partage … Vincent Goethals ne s’y est pas trompé en proposant une pièce populaire, adaptée et mise en scène –et en voix- avec la même exigence qui le caractérise, avec une troupe, il faut le dire, heureuse d’être là, sur ce plateau, dans ce théâtre à l’histoire si singulière. Et comme le dit si bien la Môme Crevette, et en chœur le public à l’entracte, autour d’une tarte au myrtille et de vin blanc, « et allez donc c’est pas mon père ! »

 
La Dame de chez Maxim de Georges Feydeau
Musique de Jacques Offenbach
Adaptation Marie-Claire Utz et Vincent Goethals
Mise en scène Vincent Goethals
Direction musicale Gabriel Mattei
Travail vocal Mélanie Moussey
Chorégraphie Arthur Perole
Scénographie Benoit Dugardyn
Lumières Philippe Catalano
Costumes Dominique Louis
Assistée de Sohrab Kashanian
Maquillages et coiffures Catherine Nicolas
Assistant à la mise en scène François Gillerot

Avec Sébastien Amblard, Frédéric Cherboeuf, Valérie Dablemont, François Gillerot, Mélanie Moussey, marc Schapira, Gabriel Mattei

Et Jean Louis Apprederisse, René Bianchini, Patrice Carey, Fannie Delobelle, Pascale D’Ogna, Olivier Dormoy, Eric garcia, Maya george, Chantal Gobert, Catherine Littner, Raphaël Maret, Céline Veron

Aurélie Diébold au violoncelle, Gabriel Mattei à l’accordéon, Philippe Fondard à la contrebasse, Barbara Walter au violon, Olivia Grappe à la flûte et Thomas Griessmann à la clarinette

Du 14 juillet au 26 août 2017 à 15h00, relâche les lundis et mardis

Théâtre du Peuple
40 rue du théâtre
88450 Bussang
Réservations 03 29 61 50 48
reservation@theatredupeuple.com
www.theatredupeuple.com

Be Sociable, Share!

comment closed