ƒƒƒ article de Denis Sanglard

© DR

C’est une création d’une extrême pudeur, d’une grande sensibilité, souvent drôle et sans pathos, jamais. Journal intime et protocole d’adieu, portrait d’une mère défunte, Finir en beauté de Mohamed El Khatib est un drôle d’objet théâtral. Sur un sujet aussi délicat, facilement tire-larme ou impudique, propre à tout voyeurisme, l’auteur et interprète réalise une fiction documentaire qui ne tombe jamais dans ces travers. Bien au contraire, c’est d’une extrême délicatesse. S’attachant parfois aux détails les plus incongrus comme si l’esprit occultant la souffrance présente s’attachait pour un court répit aux moindres détails, aussi saugrenus soient-ils. C’est justement entre la brutalité des faits, comme l’annonce embarrassée par le médecin du processus irréversible du cancer qui ronge la mère, et le petit détail qui achoppe, une fanfare qui joue faux lors des obsèques, dans ce frottement là, cette confrontation insolite que le récit prend une couleur inattendue, cocasse le plus souvent. Mais on ne peut rien en raconter parce tout ça participe de l’intime et que seul Mohamed el Khatib sur ce plateau nu, qui ne s’appesantit jamais, ne se vautre jamais dans la douleur démonstrative malgré le désarroi d’un fils devenu orphelin, sa mère lui manque et le chagrin éclate soudain devant des bols qu’on ne trouvent pas lors du repas d’obsèques, peut en faire le récit, un récit fragmenté et composite. Extraits de son journal intime, de son livre, Emails envoyés ou reçus, messages téléphoniques, sms, échanges avec sa mère en soin palliatif , son père, enregistrements sonores et vidéos, photos, acte de décès…traces mémorielles, matériaux -prévu à l’origine pour une série d’entretiens que la mort interrompit- qui dessinent le portrait d’une femme, d’une mère, et composent le récit non seulement d’une mort et d’un deuil sans réparation mais embrasse également une famille, une vie, une culture, une langue, dont parfois Mohamed El Khatib en découvre des aspects jusque là inconnus de lui. Ce deuil impossible, cette perte interroge au final aussi son identité. Son héritage.

Finir en Beauté
Texte, conception et jeu Mohamed el Khatib
Environnement visuel  Fred Hocké
Environnement sonore  Nicolas Jorio

du 8 au 26 novembre 2016 à 19h30

Théâtre Le Monfort
106 rue Brancion – 75015 Paris
Réservation 01 56 08 33 88
www.lemonfort.fr

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