Critiques // « Fantasio » d’A. de Musset mis en scène par D. Podalydès à la Comédie Française

« Fantasio » d’A. de Musset mis en scène par D. Podalydès à la Comédie Française

Fév 25, 2010 | Aucun commentaire sur « Fantasio » d’A. de Musset mis en scène par D. Podalydès à la Comédie Française

Critique de Bettina Jacquemin

« Le mois de mai sur les joues, le mois de janvier dans le cœur »

Fantasio est cynique, blasé, révolté. Clown triste, il s’ennuie et boit. Dans cette Allemagne mi-bourgeoise, mi-féodale et romantique, où il vit, son ami Spark, qui n’a aucune illusion sur la médiocrité de la société, tente en vain de le ramener au « normal ». Mais ce que Fantasio cherche au plus profond de lui, c’est une grande pensée, une grande action à accomplir. Celle-ci se présente à lui le jour où l’on prépare le mariage – forcé – de la princesse Elsbeth avec le fat et ridicule prince de Mantoue. Fantasio prend la place du fou de la Cour qui vient de mourir et, sous ce déguisement, tente de convaincre l’héritière du trône d’obéir à son coeur plutôt qu’à la raison d’État. Devant l’hésitation de cette dernière, il commet un acte de bravoure qui le conduit droit en prison, mais débarrasse la Cour de l’encombrant prétendant. Fantasio se réconcilie avec lui-même ; la princesse, et c’est bien la moindre des choses, voudra bien payer sa dette.

© Cosimo Mirco Magliocca

De mariage, il n’y aura point !

Tel pourrait être le résumé de cette pièce écrite en deux actes par Alfred de Musset. La farce est légère, la fantaisie est là ; le valet prend la place du maître et le bouffon se joue d’un comte en lui volant sa perruque.
Mais, la joyeuse facétie est plus profonde et le discours, poétique. On découvre ou l’on redécouvre un texte aux valeurs intemporelles. Fantasio est un jeune homme désabusé, mélancolique et s’attarde sur les préoccupations de son temps. A l’image des deux protagonistes du prologue.

Denis Podalydès choisit en effet de faire précéder la pièce par la lecture d’un poème satirique, Dupond et Durant… du même auteur. Deux écrivains ou du moins ce qu’il en reste font part de leurs illusions perdues. Le ton est donné avant même que la pièce ne commence.

© Cosimo Mirco Magliocca

Le rideau s’ouvre. Un carrousel apparaît. Rideaux et lampions instaurent une ambiance tamisée. Le décor est  raffiné. Les costumes (Christian Lacroix) et la musique rappellent la poésie présente dans le texte de Musset.

Mais, la pièce peine à se mettre en route. Les épanchements de Fantasio et ses compères semblent s’éterniser et le spectacle ne démarre réellement qu’au moment où Guillaume Gallienne se décide à revêtir l’habit du Comte de Mantoue… au détriment d’un Fantasio que l’on attendait… plus présent.

Cherchez le bouffon

Fantasio prend les traits féminins de Cécile Brune. Passé l’étonnement, on attend que l’explication de cette ‘’proposition scénique’’ vienne jusqu’à nous. En vain. Fantasio demeure désespérément fade.
Où est la souffrance qu’on devine chez le personnage ? On attend. Rien ne vient. Fantasio s’ennuie. Mais doit-on pour autant s’ennuyer avec lui ? Il manque ce ‘’je ne sais quoi de présence’’. Une interprétation sans aucun doute voulue, étudiée mais dont le sens ne parvient pas jusqu’à nous. Dommage pour un héros…
On finit alors par attendre avec impatience celui qui le rend inexistant. Guillaume Gallienne est le Prince de Mantoue et il est à lui seul, la farce. La seconde partie du spectacle prend alors son rythme et de réelles couleurs de bouffonnerie.

On ne voit plus le temps passer !

Fantasio
De : Alfred de Musset
Mise en scène : Denis Podalydès
Avec : Claude Mathieu, Cécile Brune, Eric Ruf, Christian Blanc, Florence Viala, Guillaume Gallienne, Clément Hervieu-Léger, Adrien Gamba-Gontard
Dramaturgie : Emmanuel Bourdieu
Décor : Eric Ruf
Costumes : Christian Lacroix
Lumières : Stéphanie Daniel
Bande-son : Bernard Vallery
Conseil chorégraphique : Cécile Bon
Maquillages : Véronique Nguyen
Musique originale Grégoire Hetzel
Assistante mise en scène : Alison Hornus
Assistante décor : Dominique Schmitt
Assistante maquillages : Laurence Aué

Du 19 février au 31 mai 2010

Comédie Française
Place Colette, 75001 Paris
www.comedie-francaise.fr

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