ƒƒ article de Emmanuelle Saulnier-Cassia
On marche beaucoup dans Exit above. Sans doute pour faire écho aux marches contestataires, ainsi qu’au leitmotiv de Anne Teresa De Keersmaeker (voir la slow walk, My Walking is my dancing qu’elle avait proposée au festival d’automne en 2018). Cela créé beaucoup d’attente.
De belles images surgissent de quelques tableaux, même si à l’exception de la jolie première scène de vent et de la dernière scène de nausées (et oui…), la scénographie n’est pas d’une grande richesse et les costumes (affublés de slogans du type « Straight from Paradise ») peu séduisants.
Certains artistes sortent du lot incontestablement. En particulier, Solal Mariotte à la tête d’ange qui séduit dans ses solos, bondissant et rebondissant avec une légèreté époustouflante, retombant sur le dos au sol comme s’il était gainé de mousse. On est par ailleurs suspendu à la voix cristalline de Meskerem Mees qui enchaîne ses créations après être partie du Walking Blues de Robert Johnson. Tout le temps présente au plateau comme l’ensemble des autres danseurs et musiciens, elle contribue à produire cette interaction constante entre la musique et la danse, entre les musiciens et les danseurs. De fait, la musique a été l’élément déclencheur de cette nouvelle création d’Anne Teresa de Keersmaeker. Si on avait davantage l’habitude d’admirer ses créations autour de Bach, le blues est une bonne idée pour une nouvelle pièce.
Toutefois, dans l’ensemble, nous n’avons pas été complétement convaincus par cette nouvelle création, qui n’est pas très novatrice sur le plan chorégraphique utilisant largement la technique du hip hop sans en avoir la maîtrise de compagnies qui y ont consacré leur vie (notamment Bintou Dembélé à quelques kilomètres de là), où l’inspiration shakespearienne (La Tempête si l’on en croit le sous-titre) et autres sources artistiques intellectuelles (Klee, Benjamin) nous a parue artificielle, et dont l’interprétation parmi la dizaine de danseurs est inégale.
On osera donc dire, à regret, à contre coup des critiques unanimes et des standing ovations, que ce n’est pas le meilleur spectacle de la chorégraphe belge, loin de là, dans sa soixantaine de pièces et notamment celles présentées à Avignon depuis 1993. Bien que ce soit vraiment courageux de se lancer sur d’autres terrains chorégraphiques que ceux arpentés depuis 40 ans, on se réjouit de revoir bientôt En atendant créé aux Célestins il y a 10 ans et retrouver le langage chorégraphique qui lui est propre et que nous admirons pour son originalité, sa puissance, sa singularité.
© Christophe Raynaud de Lage
Exit above. After the tempest, chorégraphie de Anne Teresa De Keersmaeker
Scénographie : Michel François
Lumières : Max Adams
Musique : Meskerem Mees, Jean-Marie Aerts, Carlos Garbin
Costumes : Aouatif Boulaich
Texte et paroles : Meskerem Mees, Wannes Gyselinck
Texte d’ouverture : Über den Begriff der Geschichte, Thèse IX, de Walter Benjamin
Dramaturgie : Wannes Gyselinck
Avec : Abigail Aleksander, Jean-Pierre Buré, Lav Crnčević, José Paulo Dos Santos, Rafa Galdino, Nina Godderis, Solal Mariotte, Mariana Miranda, Ariadna Navarrete Valverde, Cintia Sebők, Jacob Storer et Carlos Garbin, Meskerem Mees (musique)
12 juillet, 18h ; 13 juillet, 16 h
La Fabrica / Avignon
Durée 1h30
réservations : www.festival-avignon.com
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