Critiques // « Didon et Enée », l’opéra d’Henry Purcell mis en scène par Bernard Lévy à l’Athénée

« Didon et Enée », l’opéra d’Henry Purcell mis en scène par Bernard Lévy à l’Athénée

Mai 10, 2011 | Aucun commentaire sur « Didon et Enée », l’opéra d’Henry Purcell mis en scène par Bernard Lévy à l’Athénée

Critique de Bruno Deslot

Un amour impossible !

Cette production, du Théâtre musical de Besançon, coproduit par Les Nouveau Caractères et le Chœur AEdES, « Didon et Enée », opéra en un acte d’Henry Purcell (1659-1695) propose une forme très dépouillée à l’image de la scénographie de Giulio Lichtner et de la mise en scène de Bernard Lévy.

Enée, habillée d’une nuisette et suivie de Bélinda, apparaît comme en songe dans un décor très épuré, à l’image de l’œuvre interprétée. Les chanteurs semblent contenus dans une boîte respectant la forme géométrique d’un trapèze dont chaque partie colorée, reflète le chromatisme du phrasé des personnages. De plus, le plan incliné sur lequel les chanteurs évoluent, accentue l’effet de perspective et permet aux regards de converger, sans cesse vers le surtitrage, outil technique permettant la réalisation d’un montage graphique très esthétique annonçant l’enchainement des scènes. Une couleur nacre éclaire les deux panneaux situés à jardin et à cour pour mettre en valeur celui du fond sur lequel sont projetées les répliques traduites qu’interprètent les chanteurs.

© Yves Petit

Entre semi-obscurité, lumières suaves et suggestives, les silhouettes se dessinent, s’impriment sur un fond en apparence d’une extrême légèreté et contrastent avec l’intensité dramatique d’une écriture pourtant assez dépouillée. La partition a été écrite pour quatuor à cordes (violon I, violon II, alto et basse continue) et clavecin mais ici, l’accent est plutôt mis sur les parties vocales, doublées la plupart du temps par les instruments.

L’ouverture commence adagio puis s’accélère jusqu’à allegro permettant l’enchaînement du premier aria, « Shake the cloud », chanté par Belinda (Camille Poul) qui souffre parfois d’une émission un trop dangereusement ouverte. Les sorcières, sorties directement d’un Macbeth, pour leur côté peste et maléfique, demeurent très sophistiquées tant par l’éclairage que par les costumes qu’elles portent version « Eram » ! Sarah Jouffroy (remplaçant Anna Wall au pied levé), chante en force, mais cela ne dure pas ! L’accompagnement du Chœur AEdES dans un malicieux mélange de nasales et sifflantes donnent à l’air des sorcières tout ce qui lui manque de maléfique et cynique.

Arnaud Guillou incarne Enée avec une émission toujours un peu dure et en force. Ses attaques sont toujours sur le fil et on lui souhaite de développer une voix un peu plus mixte afin de trouver de la souplesse et l’expression de piani moins détimbrés. Pour se concentrer sur l’essentiel de l’œuvre de Purcell, il fallait la présence d’Isabelle Druet qui de lamento en decrescendo adopte le dépouillement nécessaire pour investir le personnage d’Enée. Le potentiel dramatique de sa scène de séparation avec Didon est très bien entendu, et le moment le plus émouvant, sa mort, est à couper le souffle.

© Yves Petit

A ce sujet, on conserve, pour ceux qui ont eu la chance de l’entendre, l’interprétation exceptionnelle de Dame Janet Baker.

Elément fort de ce spectacle, le superbe chœur AEdES dirigé par Mathieu Romano car chaque chanteur y conserve son timbre, créant une palette d’ensemble très riche. Dans la fosse, l’ensemble instrumental réduit et très contrasté, propose une justesse plus contrastée et moins convaincante. Mais Sébastien d’Hérin, à la direction musicale, nous offre quelques ajouts et accents des plus notables.

Chaleureusement accueilli par le public, Didon et Enée part en tournée le vent en poupe.

Didon et Enée
Opéra de : Henry Purcell
Livret : Nahum Tate
Direction musicale : Sébastien d’Hérin
Mise en scène : Bernard Lévy
Scénographie : Giulio Lichtner
Costumes : Elsa Pavanet
Lumières : Christian Pinaud
Vidéo : Romain Vuillet et Jérôme Tuncer
Maquillages et coiffures : Fabienne Robineau
Décors : Atelier du Théâtre de Besançon
Avec : Isabelle Druet, Arnaud Guillou, Camille Poul, Edwige Parat, Sarah Jouffroy, Agathe Boudet et Fiona Mc Gown, François Rougier, Antoine Strub, Le Chœur AEdES (direction Mathieu Romano)
Les Nouveaux Caractères

Du 5 au 8 mai 2011

Athénée Théâtre Louis-Jouvet
7 rue Boudreau, 75 009 Paris
www.athenee-theatre.com

En tournée
Mardi 10 mai 2011 – Théâtre d’Angoulême
Jeudi 12 mai 2011 – La Coursive » Rencontres musicales de Noirlac

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