© Coline Ogier
ƒƒƒ Article de Denis Sanglard
Sur les terres de Picardie, dans une ville dont nul ne se souvient jamais du nom, Michel Alonzo, bibliothécaire consciencieux et mutique, chargé du recollement informatique des ouvrages est victime au soir du 31 décembre mille neuf cent quatre-vingt dix-neuf du bug informatique annoncé au passage de l’an deux mille. Le voilà donc soudain devenu le chevalier à la triste figure, défenseur de la veuve et de l’orphelin, amoureux de Dulcinée, une lectrice assidue de Cervantès aperçue un soir et dont il eut le coup de foudre. Les champs picards désolés et humides se métamorphosent en terres arides du sud de l’Espagne, son vélo devient sa Rossinante. Les géants combattus sont des éoliennes. Andrés, libéré de son patron, un ouvrier agricole, contrat précaire licencié aussi sec. Le duc le maire du village au nom prédestiné, Le duc. L’humiliation de Don Quichotte par ce dernier passe, cruauté ultime, par les réseaux sociaux. Et Dulcinée, un médecin psychiatre. C’est dans un asile d’aliénés où elle officie qu’on l’enferme bientôt avant qu’il ne retrouve la raison. Et de mourir… Il ne manque pas un épisode des plus connus de l’œuvre de Cervantès. Et les correspondances entre l’oeuvre et son adaptation contemporaine sont épatantes voire d’une troublante évidence. L’utopie se fracasse toujours à la réalité des faits. Et notre monde dans ses injustices n’a rien à envier à celle de l’Europe médiévale. La Cordonnerie s’empare de ce personnage rêvant de justice sociale, en fait le héros tragi-comique de son ciné-théâtre et c’est un enchantement. Il y a le film, un vrai, sonorisé et doublé en direct par les comédiens-bruiteurs présents sur la scène. Deux musiciens sont aussi de la partie ce qui donne à l’ensemble une bande son d’une grande richesse et densité où chaque séquence à sa propre atmosphère. Comme au temps du cinéma muet. L’ensemble est un vrai ballet réglé au cordeau, une mise en scène inventive avec de jolies trouvailles poétiques de bricolos sacrément imaginatifs. Parce que loin d’être la fabrique d’un film, c’est une création en soi et une vraie performance. C’est drôle, d’un humour léger non emprunt de mélancolie et de gravité. On rit, certes mais on est touché, comme dans le roman fleuve de Cervantes, par ce personnage et sa folie qui meurt la raison retrouvée, son rêve confronté à la réalité.
Dans la peau de Don Quichotte d’après cette œuvre de Cervantès
Un spectacle de Métilde Weyergans et Samuel Hercule
Musique originale Thimothée Jolly et Mathieu Ogier
Avec Philippe Vincenot, Samuel Hercule, Métilde Weyergans, Thimothé Jolly, Mathier Ogier
Et, à l’écran Ava Baya, Jean-Luc Porraz, Anne Ferret, Michel Le Gouis, Nicolas Avinée, Xavier Guelfi, Pierre Germain, Constance Chaperon, Alexis Corso, Grégoire Jeudy…
Assistant réalisation Grégoire Jeudy et Damien Noguer
Chef opérateur Lucie Beaudinaud
Chef décorateur Dethvixay Banthrongsakd
Chef costumier Remy le Dudal
Montage Gwanaël Giard Barberin
Création sonore Adrien Bourget
Création lumière Soline Marchand
Construction machinerie Les artisans bricoleurs associés
Assistante à la mise en scène Pauline Hercule
Régie plateau Lucie Gautier
Régie lumière Alain Larue
Régie son Raphaël Barani
Costumes Nathalie Saulnier
Du 25 janvier au 7 février à 20h
Du 8 au 10 février à 19h
Le samedi à 19h, relâche le dimanche
Nouveau Théâtre de Montreuil
Centre dramatique national
10 place Jean Jaurès
93100 Montreuil
Réservations 01 48 70 48 90
www.nouveau-theatre- montreuil.com
comment closed