Critiques // « Cut » d’Emmanuelle Marie par la Cie de l’Envolée au Théâtre Clavel

« Cut » d’Emmanuelle Marie par la Cie de l’Envolée au Théâtre Clavel

Mai 11, 2011 | Aucun commentaire sur « Cut » d’Emmanuelle Marie par la Cie de l’Envolée au Théâtre Clavel

Critique d’Ottavia Locchi

Les dialogues du vagin

Si les textes d’Emmanuelle Marie sont acidulés à souhait, les trois demoiselles qui les déclament sont tout aussi pétillantes.

Une charmante dame pipi, qui aime la musique que font les demoiselles dans les toilettes et que ça claque dans la soucoupe, échange avec deux autres femmes sur leur condition. Oh il ne s’agit pas de discussion féminine, mais plutôt d’un partage d’expérience. Ainsi, au fil des histoires racontées, on rencontre différentes femmes, filles, girls, nanas, dames… Tout les sujets y passent. L’amour, le sexe, la pudeur, la peur, la virginité, le mariage, l’humiliation, le veuvage, et même l’accouchement. Quel plaisir d’être une femme, mais qu’est ce que ça peut être complexe aussi !

Au terme de plusieurs décennies de frustration, l’émancipation de la femme donne vie à des petits bijoux de création. Ainsi Emmanuelle Marie, à la manière des « Monologues du Vagin » d’Eve Ensler, offre une suite de petites histoires de femmes, à la différence que « Cut » n’est pas un monologue, mais une véritable rencontre entre trois femmes. Un moment de théâtre où le jeu désopilant peut laisser la place à l’émotion face à une réalité pas toujours rigolote.

« On ne se dérobe pas à sa propre nature. »

Marjolaine Pottlizer, Stéphanie Quint et Julie Charbonnel, devenues les portes-paroles anonymes de toutes les femmes du monde, forment un trio accompli, tout en harmonie. Le jeu théâtral a une grande importance, et elles vivent ensemble les histoires, les anecdotes. Avec la complicité de Tristan Willmott à la mise en scène, la symbiose apparaît et le passage d’un sujet à un autre, d’une émotion à une autre se fluidifie jusqu’à former un spectacle à part entière.

Loin de vouloir traiter de la condition de la femme, ce spectacle se veut plutôt reportage sur l’identité féminine : « Il s’agit de donner à voir, et surtout à entendre, ces trois femmes se raconter intimement, en évitant les écueils de la fausse pudeur et, à l’opposé, du voyeurisme gratuit qui l’un comme l’autre desserviraient le propos » nous dit Tristan Willemott.

Les trois filles jouent avec le décor sobre et transforment les accessoires (un rouleau de papier toilette devient une robe de mariée), tout en interprétant avec vigueur ce texte si saisissant (« Je ne trouve pas “ça” beau. Il y a une raison à ce que “ça” soit bien caché ! »).

« Viens oh viens j’oublie tout avec toi »

Si les toilettes pour dames est un endroit où les hommes ne rentrent pas, ils sont cependant bien présents. L’amoureux plein de désir, le fiancé bourré, le mari mort, le bourreau… « N’attendez pas que les hommes s’assoient pour pisser » clame la dame pipi pour ouvrir les festivités. Emmanuelle Marie n’a-t-elle pas un peu forcé le trait, pour mettre en valeur le sexe dit faible ? « (Lui) Je ne suis pas satisfait. (Elle) Et bien moi non plus chéri, mais ça ne m’empêche pas de dormir. »

Quoi qu’il en soit, les portraits tirés sont justes, les filles osent sur scène dévoiler une partie intime de femme, d’elles mêmes et de nous-mêmes. La mise en scène expressive permet de voyager avec elles sur cette partition géante, en riant ou en tendresse. Cent pour cent féminin, deux cent pour cent jubilatoire !

Cut
De : Emmanuelle Marie
Mise en scène : Tristan Willemott
Avec : Julie Charbonnel, Stephanie Quint et Marjolaine Pottlizer

Du 5 mai au 25 juin 2011
Représentations supplémentaires les 14, 15 et 16 juillet 2011

Théâtre Clavel
3 rue Clavel, 75 019 Paris – Réservations 01 42 38 22 58
www.theatre-clavel.com

www.ciedelenvolee.com

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