Critique Djalila Dechache
© Elisabeth Carecchio
Quatre personnages, paumés, en marge, deux femmes et deux hommes, au fin fond de l’Alaska, dans le Yukon, par moins 45 degrés extérieurs, se retrouvent dans un même espace sans l’avoir vraiment voulu. Il y a Yuko, (remarquable Cathy Min Jung) la japonaise qui a fui le Japon et les japonais, Kate, l’ado rebelle et provocatrice, Garin une sorte de métis amérindien, et son vieux père imbibé d’alcool.
Célie Pauthe, artiste associée au théâtre national de la Colline, signe cette nouvelle mise en scène comme ses mises en scène précédentes, dans la pénombre et en huis clos.
L’espace du plateau est divisé de telle sorte que les actions sont condensées dans des périmètres distincts. L’ensemble donne une vision cinématographique. L’ambiance reste froide, peu de gestes affectueux, sauf venant de Yuko et à un moment, entre le père et le fils, lorsque le vieux est sur son lit d’hôpital, entre deux crises de délirium tremens.
L’écriture rejoint le mouvement général du déjà lu, entendu, vu, dans le sens où elle est fortement calquée sur ce qui se fait un peu partout, les paumés, la solitude, appauvrissement sur tous les plans, l’absence de rêves, l’exil intérieur avec la télévision trônant au centre de la pièce, diffusant en boucle des messages sur un serial killer, adaptés en couleur locale au Québec par les tournures de langage apportant de l’exotisme. Les dialogues, entrecoupés de passages narratifs, rendent les personnages encore plus distants et irréels.
Comédiens et auteurs, tous peu connus en France, ont eu beaucoup de chance d’être programmés dans un théâtre national et qui plus est à Paris.
À la question : A quoi sert le théâtre ? Célie Pauthe répond : à s’aider un peu à vivre, à se comprendre. Antoine Vitez disait que les grands acteurs sont des gens qui nous font gagner du temps, parce qu’ils nous font comprendre des choses que, englués dans nos vies, nous ne voyions pas. La proximité avec les poètes a aussi cette vertu-là ».
On aurait tellement voulu y croire.
Yukonstyle
Mise en scène Célie PautheTexte de Sarah Berthiaume
Collaboration artistique Denis Loubaton
Scénographie Guillaume Delaveau
Assistante à la scénographie Tomoyo Funabashi
Son Aline Loustalot
Costumes Marie La Rocca
Lumières Joël Hourbeigt
Images Guillaume Delaveau, assisté de François Weber
Regard chorégraphique Thierry Thieû Niang
Avec Dan Artus, Flore Babled, Jean-Louis Coulloc’h, Cathy Min JungCréation à La Colline
Durée 2 H
Jusqu’au 27 avril 2013
Mercredi au samedi 21h, mardi 19h, dimanche 16h
Théâtre National de la Colline
15 Rue Malte Brun75020 Paris
Métro : Gambetta
Réservation : 01 44 62 52 52
www.colline.fr