ƒ Critique de Suzanne Teïbi
La femme et le pommier
Une veille femme, à l’orée de sa mort, comprend pleinement le sens de la vie.
Elle arrive près d’un arbre, vieux et noueux. Entre la veille femme et l’arbre, il n’y a qu’un pas, « et son rêve se boutur[e] à celui mourant du pommier ». Petit à petit, la femme devient pommier et pomme, se mélange et se confond à l’arbre. Si la parabole est belle, et marque une réflexion profonde sur l’essence de la vie, elle reste opaque, tant pour les enfants que pour les adultes. Difficile de saisir la subtilité et la force du propos au vu des procédés techniques et littéraires employés. Car si l’arbre et la vieille sont reliés par une corde, à cette relation simple sont superposés des moyens technologiques innovants, très beaux, mais qui brouillent largement la compréhension. L’utilisation des nouvelles technologies participe de cette réflexion, finalement intellectuelle, mais peu empirique; en effet, le lien entre les projections en 3D, très surprenantes, et ce qu’elles signifient, n’est pas aisé. Dans cet univers foisonnant et très beau, soutenu par une musique quasi hypnotique, la métaphore est cependant difficilement comprise. Sous cet angle, il semble que des subtilités visuelles puissent échapper au spectateur, liées à la transformation de la femme ou à des projections que l’on ne discerne mal.
Un rythme binaire
Le spectacle se construit de manière binaire. Rideau fermé, la neige tombe. En avant-scène, la vieille femme avance tant bien que mal, de jardin à cour. Elle traverse le plateau lentement, s’agrippant à une corde, tandis qu’une voix off, celle d’un homme, nous raconte la fable. Puis le rideau s’ouvre sur le pommier, sur lequel des projections réinventent ou font revivre des scènes de l’arbre. À nouveau, le rideau se ferme: la neige, puis la femme, la voix de l’homme, qui reprend pour partie le texte de la fable et dans un mouvement cyclique ajoute, continue, enrichit l’histoire. Ce procédé est repris plusieurs fois, au fil des quatre saisons, et s’installe un rythme qui contrecarre toute possibilité d’inattendu. Finalement, l’arbre, la femme et la pomme forment un tout et gardent en eux la mémoire de ce tout. Si ce que cela induit est très juste, et peut faire réfléchir, ce n’est malheureusement pas ce que l’on peut saisir aisément. On passe à côté du « populaire » voulu par l’équipe. Car cette fable reste obscure, et l’enfant comme l’adulte ont bien du mal à en saisir le sens secret.
Mon amoureux noueux pommier
Texte et direction: Jean Lambert-wild
Musique: Jean-Luc Therminarias et Léopold Frey
Images: Stéphane Blanquet et François Royet
Lumières: Renaud Lagier
Scénographie: Jean Lambert-wild et Stéphane Blanquet
Costumes: Annick Serret
Avec: Chiarra collet et la participation d’Aimée
Voix: Marcel Bozonnet
Jusqu’au 8 décembre 2012 – Les 4 et 6 décembre à 10h – Les 30 novembre, 4, 5, 6 , 7 décembre à 14h30- Les 1er et 8 décembre à 17h – Les 30 novembre, 1er et 7 décembre à 20h30
Théâtre National de Chaillot
Place du Trocadéro – 75016 Paris
Métro : Trocadéro
Réservations: 01 53 65 30 00