Critiques // Critique. Les souffrances de Job de Hanokh Levin. Mise en scène d’Alexis Monceaux

Critique. Les souffrances de Job de Hanokh Levin. Mise en scène d’Alexis Monceaux

Oct 16, 2012 | Aucun commentaire sur Critique. Les souffrances de Job de Hanokh Levin. Mise en scène d’Alexis Monceaux

Critique d’Anna Grahm

Un homme éprouvé

Dès leur arrivée, les spectateurs sont invités à jouer les convives à la table de Job. La convivialité va vite tourner court. Le mal rôde, le mal court. Job perd ses biens, ses enfants, sa santé, ses amis. Une ronde infernale de souffrances s’abat sur le pauvre homme. Pourtant Job est un homme généreux, il partage ses restes avec les pauvres, il offre le trop plein aux hommes de peu, job est un homme de trop. L’homme n’a jamais oublié de remercier le très Haut mais ce Dieu n’est-il pas un miroir de lui-même. Pour le savoir, l’homme va être durement éprouvé par les hommes. Il va supporter les épreuves une à une, il va se retrouver en slip en quelques minutes. Nu. Seul. « Ne me laissez pas seul avec Dieu » crie-t-il quand tout le monde l’abandonne.

Car l’homme nu, croit. Et a bien du mal à croire à tout « le malheur qui fond sur lui ». « Voilà il m’arrive/ ce qui n’arrive qu’aux autres ». Ces autres qui, il y a cinq minutes étaient ses hôtes, le dénigrent, le tourmentent, ces autres lui tournent le dos, tour à tour profiteurs, porteurs de mauvaise nouvelle, bourreaux, gens de music hall. Tourne, tourne la comédie humaine et vire au cauchemar, devient tragédie. La roue moyenâgeuse déroule le film de la décadence, ses amis s’interrogent sur sa culpabilité, est-ce un juste retour des choses, qu’a-t-il fait pour provoquer sa descente aux enfers.

L’épreuve d’être un homme

L’auteur israélien Hanoch Levin retourne l’histoire biblique pour nous raconter la disparition de la dignité humaine. Les souffrances de Job charrient d’autres souffrances que l’humanité a fomentées. Sous les feux de la rampe, les acteurs vont apparaître tour à tour Sdf, clown, Pom-pom girl, militaire, nazillon. Ils vont s’acharner à décharner le pauvre ère, ils vont s’amuser à découper l’intégrité de cet infortuné Job. Le politique promet « d’empaler » le religieux, la violence se fait sourde, souriante, puis sidérante, effarante, intolérable. Six acteurs portent cette terrifiante épopée, ils sont à fleur de réalisme. Le paysage sonore discret et lancinant gratte le malheureux sujet, sujet dont on ne fait plus cas, sujet objet de tous les tourments. Va-t-il résister aux épreuves inhumaines qui lui sont infligées. Non. L’homme est écorché, ses yeux vides, son corps décharné, on l’a planté sur ce qui ressemble à une chaise électrique. Il y a des images christiques, des prières, des chapelets. Le calvaire de Job prend fin quand enfin il abjure dans un dernier souffle. La leçon de la bible nous dit que l’homme doit éprouver le bien, puis le mal, pour revenir au bien. Récompensé. La leçon de Levin n’est-elle pas de se salir les mains pour sortir ceux qui sont englués par la terreur et l’injustice. « Heureux le sort du juste qui souffre pour sa génération et la sauve du mal, sa rétribution est dans le monde futur ». Job fait le sale boulot. Il nous laisse devant une tâche immense. « Ni paix, ni sécurité, ni repos ».

Les souffrances de Job
D’Hanock Levin
Mise en scène d’Alexis Monceaux
Lumières : Sanglar
Avec : Yvon Bernard, Didier Blau, Michel Santelli, Camille Demoures, Camille Hazard, Maxime Peyron
Espace Daniel-Sorano
16 rue Charles Pathé
Vincennes métro – château de Vincennes
Les Samedis 13 et 20 octobre à 20h30 – Les dimanches 14 et 21 octobre à 16 h
Réservation : O1 43 74 73 74
www.espacesorano.com

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