Critiques // Critique. « LA PUTAIN DE L’OHIO » de Hanokh Levin au théâtre de l’Aquarium

Critique. « LA PUTAIN DE L’OHIO » de Hanokh Levin au théâtre de l’Aquarium

Nov 10, 2012 | Aucun commentaire sur Critique. « LA PUTAIN DE L’OHIO » de Hanokh Levin au théâtre de l’Aquarium

ƒ Critique de Dashiell Donello

Joyeux anniversaire !

Un terrain indéfini, où se croisent deux grands pylônes gisant sur un terroir gris et pierreux, fait office de scénographie. Sur le mur en surplomb, trois panneaux où il est écrit : Just a dream (juste un rêve).

Hoyamer, un vieux mendiant, entre en scène. Il fête ses  soixante-dix ans. Il décide de se taper une prostituée, comme cadeau d’anniversaire. Mais comment se payer une pute sans débourser un shekel ? D’un côté il veut baiser, et de l’autre il ne veut pas perdre de l’argent pour ça. N’importe ! C’est la fête ! Hoyamer accoste Kokotska la pute du coin. Un marchandage exalté s’ensuit au profit de la dame insensible à la chose gratis. Il faut payer sur-le-champ !  Ni remise ni crédit !  Voilà Hoyamer en varappeur du dimanche sur sa pute d’anniversaire. Pas moyen de bander. Le sex-appeal  de la dame lâche des effluves de la croupe. Pas très ragoûtant pour une laborieuse érection ! La pute et le client palabrent sur le remboursement. Pas question ! Kokotska refuse tout net de rembourser un impuissant. C’est Hoyamal son fils qui passait par là qui hérite de la prostituée payée par son propre père. Joyeux anniversaire !

La pièce de Hanokh Levin (1943-1999) nous parle de la mort à travers le sexe, l’argent et la transmission.

Hoyamer est sans complaisance avec l’héritage d’une vie qui tient plus du cauchemar que du rêve. Il vit de mendicité et son seul luxe est un rêve dans le rêve ; comme des miroirs qui se font face et renvoient une image illusoire à l’infini. Ce rêve insondable est l’abîme où il tombe, la dernière chute. Car la mort est une riche putain qui n’a aucun besoin d’argent.

La mise en scène de Laurent Gutmann est plus osée dans la direction d’acteur que dans l’espace. Sa scénographie nous promet beaucoup, mais n’est pas utilisée dans son intégrité. Comme si notre vue avait un œil en moins. On aurait aimé que la promesse de « Just a dream » soit plus visible. Moins réaliste et plus imaginative. La suggestion d’une branlette invisible est plus convaincante que la bite d’un nudiste mendigot. Ce qui en revanche est bien donné par Laurent Gutmann, c’est l’intelligibilité du texte de Levin. Il nous atteint à l’émotion et résonne en nous comme un cri d’humanité.

Le tout est porté par un Éric Petitjean (Hoyamer) qui, du corps jusqu’à la voix, incarne le personnage avec subtilité en évitant le vulgaire et les clichés. La Kokotska proposée par Catherine Vinatier est trop éteinte pour être authentique. Quant à  l’Hoyamal interprété par Guillaume Geoffroy, il est irrégulier, passant d’un jeu ardent au presque froid. Souhaitons que cela n’ait été qu’un trac de première et qu’après quelques représentations tout ira pour le mieux.

La putain de l’Ohio
D’Hanokh Levin
Traduction Laurence Sendrowicz – Ed. Théâtrales, Théâtre Choisi V, comédies crues
Mise en scène Laurent Gutmann
Avec Guillaume Geoffroy, Éric Petitjean et Catherine Vinatier
Costumes Axel Aust
Lumière Yann Loric
Maquillage et perruques Catherine Saint Sever
Du 8 au 30 novembre –  Du mardi au samedi à 20h30 –  Dimanche à 16h
Théâtre de l’Aquarium
Cartoucherie  Rte Champs de Manœuvre, 75012
Réservation : 01 43 74 72 74
Métro : Château de Vincennes puis navette cartoucherie gratuite
http://www.theatredelaquarium.net/

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