Critiques // Critique. «Ganesh versus the Third Reich» de Back to back Theatre, à la Grande Halle de la Villette

Critique. «Ganesh versus the Third Reich» de Back to back Theatre, à la Grande Halle de la Villette

Avr 12, 2013 | Aucun commentaire sur Critique. «Ganesh versus the Third Reich» de Back to back Theatre, à la Grande Halle de la Villette

ƒ Critique Suzanne TEIBI

4_ganesh_vs_the_third_reich_643_cr_jeff_busby© Jeff Busby

Entre-deux

C’est une ces représentations frontales, qui semble parler de la représentation en train de se créer, que nous propose les Australiens de la compagnie Back to back Theatre. Au départ, Brian a écrit une pièce et propose à Simon, Mark et Scott de la jouer avec lui. Les comédiens improvisés sont en situation de handicap. Arrive David, un metteur en scène, qui aime le texte, et le montera avec eux. Les répétitions commencent. Deux histoires parallèles se déploient progressivement : d’une part, la pièce de théâtre, comme une fable salvatrice, dans laquelle Ganesh, le dieu hindou à tête d’éléphant, furieux qu’Hitler se soit inspiré du svastika pour créer la croix gammée, fait une plongée dans l’Allemagne nazie pour récupérer ledit symbole. D’autre part, les coulisses de la création, qui mettent en abyme l’équipe au travail.

Dans la pièce écrite par Brian, un système de multiples rideaux plus ou moins opaques, créant autant de couches qui nous séparent ou nous rapprochent des comédiens, dessine des décors simples et forts.

Dans la pièce qui met en scène la pseudo-réalité, un plateau nu et des comédiens qui se changent à vue.

Avec ce dispositif, on s’attend à ce que fiction et réalité créent une tension palpable. Mais cela n’arrive pas vraiment. Principalement parce que les comédiens jouent un quatrième mur dérangeant. On peut comprendre pourquoi : quand David soupçonne le public de venir pour voir des « monstres » – comprenez « des comédiens handicapés » – il est plus facile de lui adresser frontalement ce reproche tout en ne le froissant pas trop, sous prétexte que ce ne sont que les répétitions. Vous êtes venus comme on vient au zoo, dit-il en substance face à une salle pleine de spectateurs qu’il feint d’ignorer. Cet entre-deux devient alors problématique. Car ce qui est passionnant, dans ce projet, ce sont les moments où les comédiens parlent de là où ils sont, sans juger qui que ce soit. Si la question du comédien en situation de handicap est abordée, ce n’est pas David, le metteur en scène, qui la traite, mais bien les comédiens, entre eux. Scott ne veut pas que Mark reste dans l’équipe, parce qu’il n’a pas assez de distance pour discerner que jouer Hitler ne veut pas dire qu’il est Hitler. Les obstacles rencontrés sont traités sans surplomb, et c’est là toute la finesse de l’angle d’attaque. Néanmoins, cette mise en abyme est assez mal exploitée et amène des longueurs inutiles et des ruptures qui desservent le contenu même de la pièce. David, qui s’efforçait d’être politiquement correct, devient soudainement méprisant et n’a pas conscience de ce que cette entreprise implique humainement.

Reste le sentiment que le projet n’est pas allé au bout, que la tentative est belle mais qu’elle nécessite d’être abordée plus en profondeur. Que l’on passe un peu à côté.

Ganesh versus the Third Reich
En anglais surtitré en français
Jusqu’ au 13 avril 2013
Mercredi, vendredi, samedi à 20h30, jeudi à 19h30

Direction artistique : Bruce Gladwin
Co-auteurs : Mark Deans, Marcia Ferguson, Bruce Gladwin, Nicki Holland, Simon Laherty, Sarah Mainwaring, Scott Price, Kate Sulan, Brian Tilley, David Woods
Conception lumière : Andrew Livingston, bluebottle
Conception décors : Mark Cuthbertson et Bruce Gladwin
Design et animation : Rhian Hinkley
Musique : Johann Johannsson
Costumes : Shio Otani
Avec : Mark Deans, Simon Laherty, Scott Price, Brian Tilley, David Woods

Grande Halle de la Villette
211, avenue Jean Jaurès – 75019 Paris
Métro Porte de Pantin
Réservations : 01 40 03 75 75
www.villette.com

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