ƒƒƒ Critique Denis Sanglard
Youngmo Choe
Bballi, Bballi
« Bballi, bballi ! » expression coréenne qui se traduit par « Vite, Vite ! » peut sans nul doute définir la dernière création de cette artiste coréenne atypique, performeuse, Eun-Me Ahn. Invitée du Festival Paris Quartier d’été elle présente son dernier opus « Symphonica Princess Bari – this world ». Un conte traditionnel coréen revisité qui devient une œuvre d’art total, un opéra-ballet hallucinant où se bousculent allégrement la tradition et la modernité, l’orient et l’occident en écho. Spécialiste des cultures chamaniques coréennes qui insufflent ici leurs rythmes particuliers et puissants, mais au fait de la création contemporaine occidentale la plus pointue, Eun-Me Ahn apporte un langage métissé résolument contemporain sans rien perdre de sa singularité et de sa culture.
Robes à pois
Symphonie pop aux couleurs acidulée, cela tient tout autant du manga que de l’opérette sous acide. C’est d’une inventivité folle et semé de trouvailles loufoques. Cela semble fait de trois fois rien. Et il n’y a rien qui ne soit traité sans une égale importance. De la musique à la danse, de la dramaturgie aux costumes et au décor cela forme un tout indissociable. L’œuvre totale ! Inutile de chipoter, c’est tout simplement culotté et bluffant. Dieux en robes d’apparat et démons en robes à pois, lamés et gants de caoutchouc roses, voyous en scooter, éventails et ombrelles, Eun-Me Ahn se joue avec bonheur et clin d’œil des télescopages de prime abord incongrus. Un conte millénaire se trouve ainsi projeté dans la modernité. Les tableaux se succèdent dans un rythme fou, infernal. Les chanteurs, les danseurs, les musiciens sont dans une énergie continue, vite hypnotique, proche de la transe, au rythme des tambours qui ne cessent de gronder. Cela n‘a de cesse de sauter, rebondir. Bientôt c’est à nous de tressauter sur nos sièges. Eun-Me Ahn n’est pas à une facétie près qui confie le rôle de la princesse à un homme, sans nul artifice qu’une simple robe rose, élargissant le propos, renvoyant l’homme et la femme à leur complémentarité… Si l’ensemble est drôle, joyeux, on mesure aussi la gravité du propos d’emblée, dès l’ouverture, quand apparait Eun-Me Ahn dans un solo bouleversant. Ce conte est un voyage initiatique qui célèbre le pardon et la puissance des femmes. L’humour ravageur qui traverse cette création échevelée ne peut faire oublier ce solo qui semble planer sur l’ensemble et marquer le conte de sa cruauté.
Symphonica Princess Bari-This world
Chorégraphie et scénographie Eun-Me Ahn
Danseurs: Eun-Me Ahn, Wan-Young Jung, Young-Min Jung, Hyun-Woo Nam, Si-Han Park, Ki-Bum Kim, Hye-Kyoung Kim, Ji-Hye Ha, Ei-Sul Lee
Danseur et répétiteur: Hyungkyun Ko
Chanteurs: Hee-Moon Lee, Yi-Ho Ahn, Min-Hee Park, Eun-Hye Jung, Suk-Gui Yoon
Musiciens: groupe Be-Being: Soona Park, Wonil Na, Young-Gun Kim
Texte : Young-Gu Park
Composition: Young-Gyu Jang
Lumières: Jin-Young Jang
Son: Young-Hoon Oh
Théâtre Ephémère du Palais Royal
Place Colette 75001 Paris
Métro : Palais RoyalRéservations et location: www.quartierdete.com ou au point d’accueil du festival, place Colette
Téléphone : 0892 68 36 22