Critiques // Critique . Cri et Ga cherchent la paix de Philippe Minyana au Théâtre du Rond Point

Critique . Cri et Ga cherchent la paix de Philippe Minyana au Théâtre du Rond Point

Mar 23, 2013 | Aucun commentaire sur Critique . Cri et Ga cherchent la paix de Philippe Minyana au Théâtre du Rond Point

ƒƒ Critique Denis Sanglard

© Sonia Bresslercrietga

Le Bonheur est dans le pré

Drôles de personnes que ces deux-là. Cri et Ga, ce sont leurs prénoms et nous y reviendrons, sont deux chouettes copains. Clowns ou benêts on ne sait pas très bien. En tous les cas une naïveté confondante les lie indubitablement l’un à l’autre. Heureux en toute circonstance, ces deux là nous embarquent dans une odyssée au petit pied à la recherche du bonheur. Epopée burlesque qui voit de scènes en scènes, de lieux en lieux,  toute une étrange faune croiser nos deux énergumènes. Deux femmes à barbe, un demi-frère, deux monstres hirsutes (rien à voir avec les femmes à barbe), Colette la reine des paupiettes, un neveu dont le mari vient de le plaquer (n’en déplaise à frigide Barjot ici le mariage pour tous est déjà acté), quelques amis, une vieille qui se meurt avec joie et sérénité… Et comme dans toute quête il ne manque ni une source miraculeuse ni un village fantôme. Et à défaut de raton laveur, une vache morte qui pue et un chat cloué sur une porte. Ah ! Quelques pommes et coings aussi, peu mûrs, et qui vous donnent bien vite la colique. Quel bonheur donc de déféquer ensemble derrière les bosquets… Conte de fée ou pantalonnade, farce ou fable brechtienne (Cri quand il ne parle pas chante), tout ça à la fois sans doute. On rit, on ne sait pas vraiment comment prendre tout cela. Les acteurs jouent comme les teletubbies. Un ton qui peut vite crisper mais qui révèle que tout cela c’est du théâtre. Un conte ou naturellement tout est surjoué, petit bonheur et grande frayeur. C’est à grands traits vifs et chatoyants dans un décor tout simple et enchanteur et ça va vite.

…Cours y vite

Philippe Minyana a écrit cette fable colorée pour Christophe Huysman (Cri) et Gaëtan Vourc’h (Ga) et ces deux-là font vraiment la paire. Lunaires, naïfs et jamais ridicules, ils sont désarmants d‘enfance retrouvée. Pièce courte sur la fraternité et la famille (même recomposée et monstrueuse mais qu’importe), l’amitié, c’est une fable acidulée qui peut irriter par ce ton rose bonbon karcherisé mais qui au final est bien plus pernicieuse que cela. Il nous faut lâcher nos défenses d’adultes pour retrouver une âme de gosse. Philippe Minyana, Christophe Huysman, Gaëtan Vourc’h et Frédéric Maragnani, le metteur en scène, nous obligent à une féroce et joyeuse régression. Il suffit simplement de se laisser aller. Et ça marche. Surtout on sent entre ces quatre-là une grande complicité qui, dans les propositions farfelues, se révèle bien utile pour éviter tout ridicule. On ne sent nul embarras, de gêne aux entournures. C’est du sur-mesure. Frédéric Maragnani opte pour la simplicité et ne s’encombre pas d’un fatras scénique. Plateau presque nu, une grotte mystérieuse, un panneau qui glisse et permet d’escamoter accessoires et comédiens et hop là nous voila transporté d’un lieu à l’autre. Ce n’est pas magique mais tout simplement efficace. La magie encore une fois tient à ces deux serins sur le plateau dont la recherche du bonheur devient vite communicative. Leur présence tient pourtant de l’énigme. Vaguement cousins éloignés d’Estragon et Vladimir, clochards célestes de Samuel Beckett, Cri et Ga n’attendent rien ni personne, ne s’étonnent de rien et se suffisent à eux même et vont de l‘avant. Le bonheur est dans la fraternité, l’amitié. Et nous sommes au théâtre comme nous serions à Guignol. Dans ce monde gris et en crise de tout genre il n’est pas vain de tenter de barbouiller le théâtre de couleur.

Révolutionnaire Minyana ?

Cri et Ga cherchent la paix
De Philippe Minyana
Mise en scène de Frédéric Maragnani
Avec Christophe Huysman, Gaëtan Vourc’h, Moustafa Benaïbout, Marion Camy-Palou, Juliette savary
Assistante à la mise en scène Marion Camy-Palou
Dramaturgie Julie sermon
Scénographie Camille Duchemin
Lumière Marylin Allasset
Costumes Hervé Poeydomenge
Régie générale Pierre revel

Théâtre du Rond-Point
Salle Jean tardieu
2bis, avenue Franklin Roosevelt 75008 Paris
Métro : Franklin D. Roosevelt ou Champs-Élysées Clemenceau

Jusqu’ au 28 avril 2013
21h, dimanche 15h30, relâche les lundis et les 24 et 31 mars

Réservations 01 44 95 98 21
www.theatredurondpoint.fr

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