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Critique • L’École des femmes par Jean Liermier au Théâtre de Sartrouville et des Yvelines

Avr 29, 2013 | Aucun commentaire sur Critique • L’École des femmes par Jean Liermier au Théâtre de Sartrouville et des Yvelines

ƒƒ Critique Dominika Waszkiewicz

ecoledesfemmes © M. Vannapelghem

« La femme est en effet le potage de l’homme »

Dans le cadre du micro festival sur Molière et après le Misanthrope par Jean-François Sivadier, le CDN de Sartrouville accueille brièvement l’équipe de Jean Liermier pour une reprise de l’École des femmes. Pièce célèbre pour les controverses qu’elle suscita, cette comédie en cinq actes est une célébration de la liberté et de la jeunesse que l’on ne peut emprisonner dans le criminel carcan de l’ignorance.

La soirée s’ouvre sur une avant-scène sobrement parée d’une banale valise et d’un mannequin de couture drapé de blanc. Arnolphe (Gilles Privat) et Chrysalde (Alain Trétout) annoncent l’argument. Comme un prologue à la comédie qui va se jouer à ses dépens, le vieux fiancé rappelle les dérives d’une société aux mœurs perverties. Comment éviter le déshonneur d’un inévitable cocufiage ? En épousant une sotte ! Et, d’un geste magistral de démiurge ou de propriétaire, il tire le rideau gris. À jardin d’un plateau houleux, se dresse un tronc abritant un nid singulier : cabane de fortune entre les branches mortes, la cellule d’Agnès revêt toute sa dimension carcérale. Vertu préservée car hors d’atteinte du monde et de ses vices. Minimaliste et efficace, la scénographie d’Yves Bernard cerne d’emblée les enjeux utopistes de la pièce et révèle toute la démesure illusoire du projet d’Arnolphe.

Une adaptation évidente de pertinence

Égoïste vaniteux, Gilles Privat nous campe un personnage plus risible qu’inquiétant. Loin du climat sombre de Bezace[i], la pièce retrouve ici ses accents comiques et les alexandrins portent une dimension concrète tout à fait jouissive. Victime de sa propre hybris, Arnolphe est puni de la folie de vouloir emprisonner l’instinct de liberté incarné par une Agnès (Lola Riccaboni) au corps délié, sauvageonne pleine de fougue. À leur côté, on regrette quelque peu la fadeur d’un Horace (Simon Guélat), plutôt pâlot, dont la visible modernité ne sert pas grand-chose.

En somme, la mise en scène de Jean Liermier dénote une réelle intelligence du texte, un goût irrépressible pour les mots, au plus près du vers. Mêlant les différentes nuances de la palette comique, elle déploie toute la richesse de l’écriture moliéresque et nous ravit en un vibrant hommage qui nous rappelle que ces temps-là ne sont pas si loin…

L’École des femmes
De Molière
Mise en scène : Jean Liermier
Avec : Rachel Cathoud, Jean-Jacques Chep, Simon Guélat, Gilles Privat, Lola Riccaboni, Alain Trétout, Ferat Ukshini
Scénographie : Yves Bernard
Costumes : Coralie Sanvoisin
Lumières : Jean-Philippe Roy
Son : Jean Faravel
Maquillage, coiffure : Katrin Zingg
Collaboration artistique : François Regnault
Assistant mise en scène : Robert Sandoz
durée 2h15
Théâtre de Sartrouville et des Yvelines,
Centre Dramatique National
Place Jacques Brel
78500 Sartrouville
tél: 01 30 86 77 79
www.theatre-sartrouville.com

 
 


[i] Mise en scène présentée au palais des Papes au festival d’Avignon de 2001.
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