ƒƒ critique Dominika Waszkiewicz

© Nicolas Boudier

« Un jour je vous raconterai une autre histoire extraordinaire »

Le roman de l’auteur polonais, prix international de littérature en 1967, narre les errances du narrateur à travers une fiction sémiotique déconcertante. Au cœur de l’été, Witold décide de quitter la ville pour se ressourcer un peu en montagne, dans la région de Zakopane. Il y rencontre, par hasard, son ami Fuchs. Tous deux s’installent dans une pension en dehors du village. Commence alors un étonnant ballet de signes et de correspondances, tous plus incongrus les uns que les autres.

Entre un moineau pendu, une femme à la bouche « trop fendue d’un côté » et une fissure qui prend un sens inattendu, l’histoire revêt des allures d’enquête pour tenter, finalement, d’organiser le chaos du monde…

Gageure donc, incommensurable gageure que celle relevée par Joris Mathieu et son équipe. Comment transcrire scéniquement les délires infinis de Witold ? Comment donner à voir un univers où chaque élément ouvre sur une myriade de possibles ?

Un théâtre optique pour une fusion des techniques

Sur un plateau circulaire et en mouvement, les comédiens nous brossent, en une imitation hyperréaliste de la (pure ?) objectivité, des fragments de vie quotidienne. En même temps, certaines images nous parviennent agrandies et déformées par la subjectivité d’une loupe géante, regard inquisiteur de Witold, qui se déplace dans l’espace scénique. Enfin, un grand écran vient ouvrir la perspective de ce monde incommensurable par des projections rythmées par la narration. Complexité du monde et fluctuations de la frontière entre objectivité et subjectivité, la scénographie est pensée à la manière d’une immense machine à jouer où chaque détail est défini avec une précision infinie.

La compagnie Haut et Court joue donc avec la fusion des genres pour un théâtre des limites, une exploration des méandres introspectifs. Servis par le jeu remarquable des six comédiens (palme spéciale à Line Wiblé), rigoureusement dirigés, les subtils rouages meuvent un inquiétant kaléidoscope, magique limon tournoyant qui nous propulse dans un cosmos étourdissant de sens.

Une aventure passionnante et exigeante en somme. À ne pas rater !

Cosmos

D’après le romande Witold Gombrowicz                                
Traduction :Georges Sédir
un spectacle de la Compagnie Haut et Court
Mise en scène et adaptation :Joris Mathieu
Avec :Philippe Chareyron, Franck Gazal, Vincent Hermano, Rémi Rauzier, Marion Talotti, Line Wiblé
Scénographie :Nicolas Boudier, Joris Mathieu
Musique :Nicolas Thevenet
Lumières :Nicolas Boudier
Création vidéo :Loïc Bontems, Siegfried Marque
Régie plateau :Rodolphe Moreira
Photos :Siegfried Marque, Nicolas Boudier
administration :Olivier Bernard
Avec la complicité ineffaçable de Philippe Puigserver

Durée 1h30
Jusqu’au novembre au 7 décembre 2013
À 20h30 – Jeudi 28 novembre à 14h30 – Relâche Dimanche, lundi et jeudi

En partenariat avec le Théâtre de la Ville

Théâtre Monfort
106 rue Briançon 75015 Paris
Métro : Porte de Vanves
Réservation : 01 56 08 33 88
www.lemonfort.fr

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