Critique de Solveig Deschamps
Grand et Petit
Botho Strauss, auteur dramatique allemand rejoint la Schaubüne en 1974( La trilogie de l’espoir) pour donner à jouer ses pièces, reflet d’une société où les personnages à force d’anonymat, de rêves perdus deviennent d’une lucidité sans espoir. Et il s’agit bien de cette errance chez Lotte, personnage central de Grand et Petit (créé en 1979 à Berlin dans une mise en scène de Peter Stein), comme si le temps s’écoulait sans possibilité de changement. Lotte qui ne se remet pas de sa rupture avec Paul, qui va aller à la rencontre des autres pour essayer de se reconstruire, en vain.
Les larmes ne coulent pas si vite
Elle est assise à l’avant-scène, Elle, c’est Cate Blanchett, elle s’empare avec force et fragilité de ce monologue qui ouvre le spectacle, Lotte en vacances au Maroc, seule, tellement seule. Débit rapide, exaltation, elle est belle et juste, drôle et pathétique, voix magnifique, corps agité. Arrive la première confrontation avec les autres personnages, débit rapide de tous, nos yeux font des allers-retours incessants du prompteur au plateau. Certains d’entre nous regrettent déjà ne pas être bilingues. Les minutes s’écoulent, débit rapide, toujours identique, pluie stable, triste pluie et on devient comme elle, on s’ennuie. Des pans de décor qui bougent, des illustrations du texte, intelligentes mais trop évidentes. Prouesse des comédiens, une Cate Blanchett qui nous fait penser à Gena Rowlands dans « Une femme sous influence ». Malheureusement nous ne sommes pas dans un film de Cassavetes, nous sommes au théâtre et le théâtre a besoin d’une autre respiration.
« Quand il réussit, quand il utilise les comédiens pour ramener le plus lointain à une inconcevable proximité, le théâtre acquiert une beauté déconcertante, et le présent gagne des instants qui le complètent d’une manière insoupçonnée » Botho Strauss
Quel dommage que Benedict Andrews , metteur en scène australien, n’ait pas usé des silences qui auraient mis en relief le texte et le talent des comédiens. Parfois il faut savoir se hâter lentement. À moins que la traduction de Martin Crimp implique ce rythme. À la sortie du théâtre, j’aurais aimé que des spectateurs ayant vu la mise en scène de Claude Régy avec Bulle Ogier me raconte comment ça devait être bien. En y réfléchissant un peu plus, il s’agit peut-être simplement d’une question de culture, les drames se vivent-ils autrement aux antipodes ?
Big and Small
En anglais surtitréA Journey across contemporary Germany de Botho Strauss
Version anglaise de Martin CrimpMise en scène de Benedict Andrews
Décor de Johannes Schütz
Costumes d’Alice Babidge
Lumières de Nick Schlieper
Son de Max Lyandvert
Avec Cate Blanchett, Lynette Curran, Anita Hegh, Belinda McClory, Josh McConville, Robert Menzies, Katrina Milosevic, Yalin Ozucelik, Richard Piper, Richard Pyros, Sophie Ross, Chris Ryan, Christopher Stollery, Martin VaughanDu 29 mars au 8 avril 2012
Horaire variableThéâtre de la Ville
Place du Châtelet 75004 Paris
Métro : Châtelet
Caisses ouvertes du mardi au samedi de 11h à 20h (lundi de 11h à 19h)
www.theatredelaville-paris.com