Critiques // Critique• « V’là une drôle d’affaire » Nathalie Joly au Théâtre de la Tempête

Critique• « V’là une drôle d’affaire » Nathalie Joly au Théâtre de la Tempête

Juin 21, 2012 | Un commentaire sur Critique• « V’là une drôle d’affaire » Nathalie Joly au Théâtre de la Tempête

Critique de Marie Surget

Il y a un endroit où l’on voyage dans le temps


Assis sur son fauteuil de la salle Copi au théâtre de la Tempête, préparons-nous à rembobiner la cassette du temps et appuyer sur « play « : le chapitre Yvette Guilbert (1865-1944).
Une véritable artiste de la chanson réaliste de la fin du 19ème siècle, mais surtout une femme incroyablement sensée, en permanente réflexion sur son art et sur la société dans laquelle elle évolue; Des chansons complètement ancrées dans la réalité de son époque et pourtant ces chansons s’écouteraient presque comme un conte… pour adulte!
Côté jardin, le piano. Côté cour, un paravent en tissu sur un tapis et au milieu un rideau rouge en velours suspendu à la rambarde d’une façade grise ; Une sorte de décor éphémère, des pièces transportables qui une fois installées nous font valser en un claquement de doigt à plus de cent ans en arrière à la découverte de cette figure passionnante presque historique et qui, une fois enlevées laisserait cette grande façade en fond de scène ne laissant entrevoir aucun chemin vers un espace bien plus onirique que celui que nous traversons pendant 1h15…
C’est dans ce décor que l’ombre d’Yvette apparaît de derrière le paravent, une chimère qui viendrait réinvestir le lieu, se réveiller après un long sommeil pour revivre avec ce même feu, l’histoire de sa vie mais surtout de son œuvre. Ce personnage fascinant, c’est Nathalie Joly, magnifiquement juste et lumineuse, qui l’investit avec son inséparable Jean-Pierre Gesbert, au piano. Un duo parfait qui repose sur l‘écoute que chacun accorde à l‘autre, traversant ensemble le récit de personnages qui semblent presque se dresser devant nous !

Jacques Verzier signe une mise-en-scène très ingénieuse où tout l’intérêt est de savoir où se place la comédienne par rapport à cette histoire, à quel endroit de jeu et quel état de corps se trouve Nathalie Joly pour rendre compte aujourd’hui de cette transformation d’une jeune femme pilier des cafés-concerts à une figure incontournable et incroyablement contemporaine.

C’est une véritable création qui s’inspire d’une figure et d’un univers très marqué mais réussi à s’en détacher pour parler d‘une femme mais aussi d‘une artiste au-delà du nom «Yvette Guilbert»; c’est aussi une façon d’observer l’état de la ville, de la politique, de ses habitants et citoyens ainsi que des artistes à l’époque de la chanteuse et se rendre compte des changements ou au contraire constater que certains faits ou récits sont universels, et quelque soit notre avancée scientifique, technique ou artistique, l’Homme reste toujours confronté à autrui et c’est de ce rapport entre ces deux forces que naissent ces chansons, ces pièces de théâtre, ces œuvres cinématographiques….
C’est un véritable petit bijou, un spectacle musical exigeant et très intéressant comme nous aimons voir, sobre et esthétique avec des costumes, des lumières et des accessoires qui ne cessent de nourrir notre imaginaire sans le gaver. C’est l’art de se concentrer sur l’essentiel pour amener le public avec beaucoup de liberté là où veut aller l’équipe de « En v’là une drôle d’affaire ».

Si le Festival du théâtre à vif consiste à parler de notre actualité, alors c’est un pari périlleux mais hautement relevé puisque comprendre notre actualité c’est peut-être remonter un siècle avant et voir que finalement, nous nous trouvons dans un perpétuel recommencement.

Nathalie Joly chante Yvette Guilbert
En v’là une drôle d’affaire !
Chant et conception: Nathalie Joly
Piano: Jean-Pierre Gesbert
Mise en scène : Jacques Verzier
Lumières: Arnaud Sauer
Costumes: Claire Risterucci
Du 19 au 24 juin 2012 – Du mardi au samedi 20 h 30 – dimanche 16 h
Théâtre de la Tempête-Cartoucherie
Route du Champ de Manœuvre 75012 Paris
Métro : Ligne 1 : Château de Vincennes, puis Bus 112, arrêt Cartoucherie.
Réservation :   01 43 28 36 36
www.la-tempete.fr

Du 7 au 28 Juillet 2012 Festival d’Avignon – Théâtre du Petit chien à 20h45

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