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Critique. “Une faille” de Mathieu Bauer, au Nouveau Théâtre de Montreuil

Sep 26, 2012 | Aucun commentaire sur Critique. “Une faille” de Mathieu Bauer, au Nouveau Théâtre de Montreuil

Critique de Suzanne Teïbi

La tentation de la série théâtrale

Au premier abord, le projet est enthousiasmant: cette série théâtrale a pour ambition de s’inscrire pleinement dans la ville, et d’y introduire un “nouveau rituel populaire”.

Alors que l’on tente désespérément de sensibiliser de nouveaux publics au théâtre, que le combat avec la télé – résolument plus populaire – semble perdu d’avance, les séries débarquent au théâtre et nous font espérer un élargissement des publics.

“Une Faille” réunit un groupe d’une vingtaine d’amateurs montreuillois, pour moitié des comédiens, pour moitié des musiciens, en plus des comédiens et des musiciens professionnels.

Avec lui, Mathieu Bauer, qui a conçu ce projet et en signe la mise en scène, embarque Sophie Maurer, sociologue et auteure, ainsi que Sylvie Coquart-Morel, scénariste, pour compléter le volet écriture.

Oui mais voilà: le projet, qui semblait alléchant, l’est bien moins à l’épreuve du plateau, car une ville se dessine vaguement, qui semble quelque peu simplifiée et appauvrie.

Des problématiques sociales fortes mais effleurées

L’histoire est simple: à Montreuil, un immeuble vient de s’effondrer sur la maison de retraite mitoyenne. Quelques morts, des blessés, et une population qui s’inquiète.

Sous les décombres, cinq survivants attendent que les secours viennent les chercher.

Dehors, le Directeur de Cabinet du Maire, bien seul, essaie de gagner du temps en attendant l’arrivée du Maire; et les habitants observent puis se mobilisent et veulent comprendre.

Les cinq survivants, on le devine aisément, se font les représentants de différentes figures sociales: une jeune policière fraîchement débarquée de province, un vieux libertaire, un jeune maghrébin, la doctoresse de la maison de retraite, et le promoteur immobilier de l’immeuble qui s’est effondré.

Dans ce contexte, la rencontre de ces cinq personnages les oblige à confronter leurs visions de la vie et de la société, rendue dans le texte par des moments monologués où chacun délivre sa vision du monde, aussi caricaturale qu’imposée, de fait, par le type social qu’elle représente.

Et le jeune Nabil de vouloir tordre le cou aux clichés tout en s’y engouffrant toujours plus, et la jeune policière de nous expliquer ses difficultés pour trouver un logement décent, et le promoteur immobilier de nous donner un cours d’économie contemporaine…

Traiter des clichés racistes, de la crise mondiale, des absurdités économiques, du problème du logement ou de la place des personnes âgées dans la société: voilà des questions cruciales, qui méritent qu’on s’y confronte vraiment, qui ne devraient pas être prises en charge par des personnages caricaturaux.

C’est malheureux, car on a envie que ces comédiens, tous brillants, défendent de vrais points de vue, et s’emparent véritablement d’une de ces questions, au lieu de traiter ces problématiques sociales de manière très superficielle.

La question du chœur

Reposer la question du chœur, dans ce type de projets, est central, car le chœur pose la question de la place du collectif et de l’individu dans notre société.

Mais à ce stade, le chœur reste désespérément anecdotique, périphérique, c’est une fanfare qui reste en fond de scène, ce sont des pancartes qu’on voit au loin, et, en définitive, le chœur reste à sa place: une place  limitée, à la limite de l’ostracisme.

Le Directeur de Cabinet, qui semble être seul contre le groupe, n’est finalement jamais seul. Son adresse, maladroite, n’est pas destinée aux habitants, ni même à nous, mais à ses différents interlocuteurs téléphoniques. Vissé à son téléphone portable, il ne confronte jamais la question de l’individuel à celle du collectif.

Et la parole du peuple pour le peuple résonne en un bruit de fond, porté par des silhouettes qui s’approchent timidement, pour ne jamais réellement nous atteindre.

“Une faille”, Feuilleton théâtral

Saison 1: Haut Bas Fragile
Pris au piège”, épisodes 1 à 4
Texte: Sophie Maurer
Conception et mise en scène: Mathieu Bauer
Scénario: Sylvie Coquart-Morel
Dramaturgie-regard extérieur: Marie-José Malis
Composition musicale: Sylvain Cartigny
Décor et lumière: Jean-Marc Skatchko
Costumes: Nathalie Raoul
Vidéo: Stéphane Lavoix
Assistante à la mise en scène: Anne Soisson

Avec:Joris Avado, Pierre Baux, Michel Cassagne, Christine Gagnieux, Matthias Girbig, Lou Martin-Fernet, Sylvain Cartigny et Stan Valette
Ainsi que le choeur citoyen composé de 10 musiciens amateurs et de 14 amateurs-théâtre, en alternance

Du 24 septembre au 14 octobre 2012
Lundi, Vendredi, Samedi 20h30, Mardi, Jeudi 19h30 et Dimanche 17h

Nouveau Théâtre de Montreuil
10, Place Jean Jaurès – 93100 Montreuil
Métro Mairie de Montreuil
Réservation : 01 48 70 48 90
www.nouveau-theatre-montreuil.com

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