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Article • « Intérieur » de Maeterlinck, mise en scène de Claude Régy. Festival Avignon

Juil 20, 2014 | Commentaires fermés sur Article • « Intérieur » de Maeterlinck, mise en scène de Claude Régy. Festival Avignon

ƒƒƒ article de Camille Hazard

csm_4-Interieur-Shizuoka-juin2013_c_Koichi_MIURA_bca3777372© Koichi Miura

« Et si nous sommes étonnés par moment, il ne faut pas perdre de vue que notre âme est souvent à nos propres yeux une puissance très folle et qu’il y a en l’homme bien des régions plus fécondes, plus profondes et plus intéressantes que celles de la raison ou de l’intelligence. » Maurice Maeterlinck
En 1985 Claude Régy met en scène Intérieur de Maurice Maeterlinck. Cette année, à la demande de Satoshi Miyagi, directeur du Shizuoka Performing Arts Center au Japon, il revient sur les pas de l’auteur avec des comédiens japonais.

Les spectacles de Claude Régy sont avant tout une expérience sensitive pour les spectateurs qui ont la patience de pénétrer un univers aux frontières inconnues. Il faut nous laisser aller au bouleversement total, ne pas craindre de basculer dans un monde qui nous échappe et dans lequel notre corps et notre esprit risquent d’être bouleversés.
Une famille à l’intérieur de la maison.
A l’extérieur de cette maison, des voisins cherchent comment annoncer à cette famille la mort de leur petite fille.
Sur le plateau recouvert de sable, les deux espaces sont délimités par deux lignes horizontales.
Dans l’espace intérieur, la famille évolue sans mot. À l’extérieur, les voisins se concertent et parlementent. La voix est dissociée du corps.

Dans un silence quasi-religieux, nous pénétrons dans la salle. Puis, la lumière décroît, laissant place à une obscurité totale.
Bientôt, nous faisons face à des corps en mouvements d’une lenteur lancinante, obsédante, insoutenable. Puis notre vision bascule.

« Si nous faisons un théâtre, ce n’est pas pour jouer des pièces, mais pour arriver à ce que tout ce qu’il y a d’obscur dans l’esprit, d’enfoui, d’irrévélé, se manifeste en une sorte de projection matérielle, réelle. » Antonin Artaud

La scène devient le négatif photographique de notre existence. L’invisible devient visible, nous percevons des sensations d’ordinaire inconscientes. Le décor en ligne de fuite favorise les bouleversements ; dans leur lenteur, les corps en mouvement des membres de la famille semblent suspendus à leur immobilité tandis que le corps inerte de l’enfant paraît vouloir se relever vers la vie. Les glissements de lumières modifient l’espace et le temps. Le silence devient langage ponctué par des sonorités de mots. Les comédiens n’habitent plus des personnages mais l’intérieur des personnages, leur âme. Dans sa quête de vous vouloir toucher du doigt l’invisible, Claude Régy ne met pas en scène les actions physiques, comme fermer une fenêtre, il met en scène « l’avant action », le moment où le corps et l’esprit prennent la décision de ce mouvement extérieur. Les spectateurs captés par ce bouleversement, font face à leur propre intérieur. Intérieur souvent inconnu, nié, voire refoulé… La rencontre est violente, le désarroi captivant.
On se laisse tout de même à regretter le choix de la langue japonaise (bien que sous-titrée) qui nous tient à distance. Claude Régy fractionne et décompose les impulsions du corps mais aussi du langage. Difficile donc de percevoir l’important travail réalisé, dans cette langue qu’on ne maîtrise pas…

Intérieur
De Maurice Maeterlinck
Mise en scène : Claude Régy
Traduction : Yoshiji Yokoyama
Scénographie : Sallahdyn Khatir
Lumière : Rémi Godfroy
Assistant mise en scène : Alexandre Barry
Avec : Asuka Fuse, Kaori Ibii, Yoji Izumi, Tsuyoshi Kijima, Hiroko Matsuda, Yusuke Oba, Gentaro Shimofusa, Haruyo Suzuki, Miki Takii, Soichiro Yoshiue, Mana Yumii et Hibiki Sekine

Du 15 au 27 juillet 2014 à 18h00
Salle Montfavet
www.festival-avignon.com

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