ƒƒƒ Critique Rachelle Dhéry

 ©La compagnie du grand soir.DR

« Je crois à la douce violence de la raison sur les hommes. Penser est un des plus grands divertissements de l’espèce humaine ! »

La vie de Galilée, que Brecht écrivit en 1938, alors qu’il venait d’être déchu de sa nationalité allemande par le régime nazi, nous plonge à l’époque de la Renaissance, dans ce terrible combat que menèrent les autorités scientifique et religieuse contre celui qui pensait qu’un autre monde était possible. Convaincu, grâce à la lunette astronomique qu’il vient de fabriquer, que la terre tourne autour du soleil et non l’inverse, il remet ainsi en question l’idée de la terre comme centre de  l’univers. Et si la Terre n’est plus au centre, cela infirmerait les propos de l’Eglise. Obligé d’abjurer ses propres paroles, finissant sa vie reclus et étroitement surveillé, il parviendra tout de même à faire échapper sa dernière œuvre écrite en Hollande. La vie de Galilée, ou les dérives de l’obscurantisme…

« Allez en coulisses. Allez jouer »

A l’origine, la pièce, très longue et très fournie, fut très peu montée. La Compagnie du Grand soir propose, dans une mise en scène de Christophe Luthringer, qu’on a déjà pu découvrir au Festival Off d’Avignon, une version allégée de 1h20. Allégée, mais non dénuée d’intelligence ! Et ce qui peut passer au départ pour un étalage des genres et savoir-faire, dévoile, au fil du spectacle, une véritable finesse, une maîtrise parfaite  et une compréhension indéniable de l’œuvre brechtienne. La scénographie se met admirablement au service de la narration. On découvre, ravi, sourire aux lèvres, comment ce grand bonhomme de l’histoire, présenté ici comme un joyeux luron, a pu faire une telle découverte : « Et pourtant, elle tourne ! ». Sur scène, une grande boîte astucieuse, tour à tour castelet ou voiture, table d’écriture ou coffre de rangement. Pratique, drôle, efficace. Preuve absolue que le très bon théâtre peut être fait de bric et de broc, même si une ribambelle d’accessoires, des costumes bien pensés et des lumières poétiques sont habilement utilisés.

Adaptée pour tous, idéale pour les scolaires, cette version offre une jolie panoplie des techniques théâtrales. Mime, chant polyphonique, musique, conte, acrobatie, distanciation brechtienne, mise en abime, marionnette, manipulation d’objets, servie par d’excellents acteurs, qui endossent superbement les multiples rôles nécessaires et indispensables à la bonne compréhension de l’histoire.

« De telles étoiles sont-elles nécessaires ? »

Bref, ce spectacle vaut le détour ! Et c’est le cœur léger, mais la tête bien remplie, que nous sortons du théâtre et levons la tête, vers le ciel, pour observer les étoiles.

La vie de Galilée

Bertolt Brecht
Mise en scène : Christophe Luthringer
Avec : Régis Vlachos, Charlotte Zotto, Aurélien Gouas, Jean Christophe Cornier en alternance avec Gilles Vincent Kapps, Philippe Risler
Durée : 1h20
Jusqu’au 28 avril
Le Lucernaire
53, rue Notre-Dame des Champs
75006 Paris
http://www.lucernaire.fr/beta1/index.php

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