ƒ article de Camille Hazard

© DR

De ce texte sombre, à l’écriture fragmentée, plongeant dans les méandres de la dépression psychotique, Sara Llorca amène de la fraicheur et de la poésie à travers une mise en scène et un jeu qui collent au plus près du texte de Sarah Kane.

Si le désespoir des mots se fait entendre, c’est avec un visage juvénile qu’il nous touche. Loin de se complaire dans le registre tragique, Sara Llorca et Charles Vitez ont choisi la proximité avec le public et la confidence.

« A 4 h 48

Quand le désespoir fera sa visite

Je me pendrai

Au son du souffle de mon amour

Je ne veux pas mourir

Je me suis trouvée si déprimée par le fait d’être mortelle que j’ai décidé

de me suicider. »

Sur le plateau, douze chaises en aluminium forment un cercle à la manière des thérapies de groupe. Au début, confinée à l’intérieur de ce cercle, la patiente échange avec le médecin sur son mal-être puis les chaises volent, le cercle se brise et le corps commence à se libérer du psychisme ; la patiente lutte pour mourir. Ce corps retrouvé est personnifié dans un corps de danseur ; DeLaVallet Bidiefono, originaire du Congo, danseur magnifique, prête son corps à l’esprit chétif de la patiente. Sorte de démon, d’ombre géante tournoyant autour d’elle, il est le mouvement, la liberté, la vie. Ce parti pris de mise en scène très intéressant confronte donc le corps et l’esprit mais aussi tout ce qui en découle : l’inné et l’acquis, la liberté et la soumission, la nature et la culture.

Deux musiciens, Benoît Lugué à la basse et Mathieu Blardone à l’électronique, tissent un fil rouge entre la vision thérapeutique et réaliste du médecin, les méandres du psychisme chez la patiente et son corps insoumis qui exulte de vie. Créant des atmosphères, des textures, des rythment à l’aide de samples, ils réunissent les voix discordantes.

La fin du personnage, amenant la fin du spectacle, est un très beau moment de théâtre. D’une simplicité insolente et touchante. Les confidences de la patiente, adressées à nous, public. Sans porter la voix, le corps détendu et relâchant les armes, Sara Llorca nous parle simplement avec vérité et nécessité.

4.48 Psychose
De Sarah Kane
Mise en scène Sara Llorca et Charles Vitez
Chorégraphie DeLaVallet Bidiefono
Avec DeLaVallet Bidiefono, Antonin Meyer Esquerré, Sara Llorca
Musiciens Benoît Lugué et Mathieu Blardone

Du 24 au 29 novembre et du 2 au 5 décembre 2014

La Loge
77, rue de Charonne – 75011 Paris
M° Charonne, Ledru-Rollin, Faidherbe-Chaligny
Réservation 01 40 09 70 40
www.lalogeparis.fr

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