Critiques // Critique ・ « Deux hommes jonglaient dans leur tête» de Roland Auzet et Jérôme Thomas, Théâtre Le Monfort

Critique ・ « Deux hommes jonglaient dans leur tête» de Roland Auzet et Jérôme Thomas, Théâtre Le Monfort

Jan 17, 2014 | Aucun commentaire sur Critique ・ « Deux hommes jonglaient dans leur tête» de Roland Auzet et Jérôme Thomas, Théâtre Le Monfort

Critique May Lee

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©Piffaut

Le jonglage au théâtre, c’est les boules

Sur un plateau peuplé d’étranges éléments de bois, comme une immense chambre d’enfant pleine de jouets à bascule, deux hommes avancent lentement. L’un d’eux a les pieds posés sur des socles que l’autre pousse avec son bâton. Marche lente, pénible. Un vent lancinant souffle dans les enceintes. Ça n’avance pas vraiment. Lumière crépusculaire. Trop monotone pour être un jeu d’enfant. Au-dessus d’eux flotte une énorme structure circulaire, comme le squelette en bois d’une mappemonde, écho d’un extérieur absent et présent à la fois. Et puis ils découvrent leur premier instrument, sorte de balafon réinventé, sur lequel ils se mettent à taper, comme surpris de leur découverte. C’est comme un brouillon de musique, ils ne composent rien encore, ils découvrent. Peu à peu le plateau s’anime, comme si les jouets, ces œufs de bois emplis de carillons, prenaient vie. La musique envahit progressivement l’espace. Un grand xylophone posé entre le premier rang du public et la scène, joué de dos mais perçu de face grâce à un très grand miroir mobile. Une musique électronique live qui nous plonge dans une atmosphère globalement sombre, striant l’espace sonore de déflagrations, grésillements, réverbérations et guitare saturée. Ils mettent peu à peu en mouvement tous les éléments du décor, faisant résonner un chœur de carillons et de percussions, mélodique par moments, souvent cacophonique et atonal. Tissé avec ces interventions sonores, le jonglage s’essaye à de multiples réinventions. Les compères jonglent en faisant rebondir leurs balles contre un tambour sur cadre, ils jonglent en tournoyant sur des chaises de bureau au son d’un cajon frénétique, ils jonglent avec des plumes. Ils jonglent.

Une recherche en cours

Tout au long du spectacle, on perçoit que l’on est invités à trouver le dispositif ingénieux. Mais l’omniprésence de ce dispositif masque mal l’absence d’une véritable dramaturgie. Mettre du jonglage sur une scène de théâtre, pourquoi pas, encore faut-il savoir pourquoi. Ici, on a l’impression que le jonglage se cherche un alibi pour être légitime sur le plateau, mais ces tentatives n’aboutissent pas vraiment. Celle du duo clownesque par exemple, jouant de la mimique et de l’arrêt dans l’attente de la réaction du public. Mais la virtuosité du jonglage restant le point focal, le clown n’a ici aucune chance, lui qui trébuche et marque des points d’audience en ratant encore et encore. La volonté de chorégraphier le geste est perceptible aussi, mais on est loin de la danse et les gestes, en-dehors des gestes purement techniques du jonglage qui, eux sont parfaits, restent maladroits. Ce qui nous manque pour accueillir ce geste sur un plateau de théâtre, ce serait une énergie fondamentale qui traverserait de bout en bout plutôt qu’une succession d’idées, aussi bonnes soient-elles. Et puis, n’ayons pas peur des mots, il nous faudrait…un propos.

Deux hommes jonglaient dans leur tête
Conception et interprétation Roland Auzet et Jérôme Thomas
Sous le regard de Mathurin Bolze
Musique électronique “live” Wilfried Wendling
Création lumière Bernard Revel
Assisté de Dominique Mercier-Balaz
Construction et conception des instruments Robert Hébrard
 
Jusqu’au 1er février 2014 à 20h45

Théâtre Le Monfort
106 Rue Brancion, 75015 Paris
Métro : Porte de Vanves
www.lemonfort.fr

 

 

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