Critiques // Critique. “La Conversation” de Jean d’Ormesson au Théâtre Hébertot

Critique. “La Conversation” de Jean d’Ormesson au Théâtre Hébertot

Oct 06, 2012 | Aucun commentaire sur Critique. “La Conversation” de Jean d’Ormesson au Théâtre Hébertot

Critique de Jean-Christophe Carius

Le point de bascule du Consul

À cette époque, dixit Victor Hugo, “Napoléon perçait sous Bonaparte,  Et du premier consul, déjà, par maint endroit, Le front de l’empereur brisait le masque étroit.” C’est cette brisure de masque, la pression de ce front, que Jean d’Ormesson a voulu approfondir dans son livre “La Conversation”. Dans ce récit dialogué et fictif, le Premier Consul Bonaparte engage avec son collègue Cambacérès, une conversation de fond au cours de laquelle il révèle le dessin de sa mûre résolution : se faire sacrer Empereur. Cette conversation qui synthétise la figure d’un Bonaparte en plein élan d’une ascension exceptionnelle, explique et détaille les perspectives extraordinaires dans lesquelles il décide de se projeter. Jean d’Ormesson, qui déclare préférer Bonaparte à Napoléon, associe son imagination de romancier et son érudition d’Académicien Français pour représenter la quintessence d’un point de bascule décisif. Il entend restituer le scintillement de la vision, éclatante mais aveuglante, qui fit naître dans l’esprit d’un fils de la Révolution, consul à vie de la première République Française par plébiscite, la volonté de devenir le continuateur dynastique des grands empires européens.

Jeune comédien déjà nominé, Maxime d’Aboville campe un Bonaparte aux gestes trempés de résolution, face à un Cambacérès (Alain Pochet) à l’écoute subtile et admirative, pour ainsi dire conquise. Il compose la forme stylisée d’un homme d’État déterminé et hors norme, qui mène cette conversation comme une première bataille dans l’accomplissement final de sa volonté. De toutes leurs maîtrises oratoires, les deux comédiens font résonner sur le plateau le souffle de cette épopée politique, que rend avec brio le rythme du texte. La mise en scène de Jean-Laurent Silvi délivre une adaptation résolument inscrite dans la tradition du théâtre de verbe. Les tirades de cette conversation se déploient au gré des mouvements du récit autour des points d’appuis purement contextuels que constituent les décors, les costumes et les accessoires. A l’instar d’un Sacha Guitry, l’art du jeu théâtral se présente comme art du plaidoyer servant les points de vues des personnages, et la parole s’impose comme le centre névralgique d’une esthétique explicite et ignorant les non-dits. Cette approche s’accorde avec le propos et le style de l’auteur, Jean d’Ormesson, un amoureux de l’intelligence civilisée, des grands esprits institutionnels, qui célèbre avec verve et passion les édifices de leurs raisonnements.

La Conversation
De Jean d’Ormesson de l’Académie Française
Mise en scène :  Jean-Laurent Silvi
Avec Maxime d’Aboville et Alain Pochet
Costumes :  Pascale Bordet
Lumières :  Éric Milleville
A partir du 2 octobre 2012 – Du mardi au samedi à 19h
Théâtre Hébertot
78 bis Bd des Batignolles 75017 Paris
Métro : Villiers, Rome
Location 01 43 87 23 23
http://theatrehebertot

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