ƒƒƒ article de Emmanuelle Saulnier-Cassia
Une performance d’acteur seul en scène, une mise en scène et scénographie inventive et un texte intelligent. Tous les ingrédients sont réunis pour se rendre au Théâtre de la Reine Blanche pour les dernières représentations de la reprise de cette pièce créée au même endroit en 2022.
C’est le parcours d’un juge italien, qui depuis ses études en droit jusqu’à sa nomination et confrontation aux réalités mafieuses voit ses idéaux et valeurs bouleversés dans cette « vie de chien » qu’il a choisie et assumera jusqu’au bout.
Si le fond peut sembler lourd et sérieux, la forme d’Un juge emballe le spectateur d’emblée. Interpellé d’abord directement sur la différence entre la loi et la justice, Fabio Alessandrini qui signe le texte, la mise en scène et le jeu, propose dès l’introduction un cas pratique en direct, sur un registre très humoristique, pour mieux faire comprendre ensuite le sens de la sanction (pénale), mais aussi l’incohérence ou les contradictions de ce droit pouvant aboutir à des incongruités choquantes afin de déterminer par exemple la peine à infliger à l’assassin de son conjoint. Après cette mise en contexte réaliste tirée du système pénal italien, prend place le récit de vie d’un dernier de la liste des promus qui n’a d’autre choix que de commencer en Calabre, poursuivre à Palerme et finir sa carrière à Bogota…
Toute une vie d’Un Juge commencée à compulser fiévreusement son cours de « Techniques d’enquête » avant de se rendre sur le lieu d’un crime en l’absence de police scientifique, puis une carrière passée à éviter les balles, rendre un peu la justice, les rares fois où il ne classe pas les affaires sans suite. Peu à peu, subtilement, Fabio Alessandrini fait ressentir la réalité du terrain. Celle d’une justice « délaissée, délabrée, abandonnée », où Un juge est laissé sans moyens, mais non sans peur. Pas celle cinématographique du Parrain, des Incorruptibles ou des Affranchis, celle de tous ces vrais doubles, non fictionnels, assassinés par la Cosa nostra, comme Falcon ou Borsellino explosant dans leurs voitures chargées de TNT.
Et pourtant, triomphe l’espoir, celui suscité par l’abnégation de ces hommes auxquels il est subtilement rendu hommage, qui ont continué de croire en leur vocation : « C’est peut-être ça la justice, une obsession, une maladie. Si c’est le cas, je crains que je ne me soignerai pas »…
Un juge, de Fabio Alessandrini
Mise en scène : Fabio Alessandrini
Collaboration à la dramaturgie : Riccardo Maranzana
Regard extérieur : Karelle Prugnaud
Musiques : Paolo Silvestri
Création vidéo : Claudio Cavallari
Création lumière et régie générale : Jérôme Bertin
Univers sonore : Romain Mater
Construction décors : Alexandrine Rollin
Avec : Fabio Alessandrin
A 16h15
Présence Pasteur
13, rue Pont-Trouca
84000 Avignon (intra muros)
Réservations : 04 32 74 18 54
contact@presence-pasteur.fr
comment closed