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Trouble, texte, musique et mise en scène de Gus Van Sant, à La Villette

Déc 22, 2022 | Commentaires fermés sur Trouble, texte, musique et mise en scène de Gus Van Sant, à La Villette

 

© Bruno Simão

 

ff article de Denis Sanglard

Qui était Andy Warhol ? Question posée par Gus Van Sant, réalisateur multi-primé, pour sa première mise en scène de théâtre. Trouble où l’ascension d’une icône des années 60, « the pope of the pop », qui éleva l’objet de consommation au rang de d’œuvre d’art. Enfin, c’est un peu plus complexe que ça… Mais ce qui semble intéresser là Gus Van Sant c’est avant tout la fabrique de l’icône elle-même, de Andrew Warhola à Andy Warhol, du publicitaire et dessinateur au créateur de la Factory. Théâtre musical et récit fictif construit à partir de faits et souvenirs, imaginaire aussi. Gus Van Sant déconstruit le mythe, le met à nu avec beaucoup d’ironie et de causticité. Où l’on découvre sous la perruque platine, un Andy Warhol égocentrique, opportuniste, business man, avide de reconnaissance, et dont la formation de publicitaire participe indubitablement de son talent. Gus Van Sant ne se permet aucun jugement sur la valeur (non monétaire) de son travail, honni par le critique d’art Clement Greenberg réfractaire au Pop Art, mais se concentre sur le personnage crée par Andrew Warhola et qui imprima de sa marque, « sexe drogue et rock en roll », une époque en pleine effervescence. D’autres icônes traversent ce plateau. L’actrice Edie Sedgwick, égérie jusqu’à la rupture fracassante, Nico muse du Velvet, Valérie Solanas qui tenta de l’assassiner, Roy Lichtenstein, Truman Capote… L’underground new-yorkais, artistes et célébrités se faisant tirer le portrait, machine à cash, en quête d’un quart d’heure de gloire. Qui tous offrent un portrait en creux d’Andy Warhol, d’une époque et d’un milieu particulier dont il est à la fois le produit et le moteur. Même la Vierge Marie, oui, intervient. Laquelle férue d’art contemporain ne serait pas sans avoir été celle ici qui inspira au fidèle croyant Andrew Warhola les Cambell’s soup can…

C’est dans un univers coloré et pop que 10 très jeunes comédiens et chanteurs interprètent cette galerie de personnalités. Certes, ils sont loin d’avoir l’âge des rôles mais qu’importe. Ce qui semble compter là, loin de tout mimétisme, c’est comment ils s’emparent, traduisent, expérimentent ces multiples identités avec aplomb. Un jeu de rôle volontiers iconoclaste où ce qui semble importer n’est pas tant la vérité, connue de tous croyons-nous, mais son interprétation, voire sa réinterprétation. Et en évitant ainsi tout artefact et artifice, ajouté à leur conviction absolue d’être ce qu’ils sont, et leur talent certain et affirmé, ça marche. Mise en scène virevoltante, fluide, épurée et sans temps mort qui n’est pas sans faire penser aux toiles même d’Andy Warhol, dans leur objectivité sans apprêt. Une efficacité et une précision maniaque quasi cinématographique qui manque sans doute d’aspérité. On est certes séduit mais il manque à tout ça, devant ce portrait clinique un peu d’humanité. On est devant cette représentation au demeurant impeccable, comme devant une boite de soupe Campbell, non pas perplexe ni indifférent, mais coupé de toute émotion. Mais sans doute que là n’était pas le but dans cette volonté de dissection d’une icône. Qu’importe, le regard de Gus Van Sant sur Andy Warhol ne manquant pas d’un certain humour, il n’y a aucun déplaisir à découvrir cette création empreinte de vitalité et de jeunesse.

 

© Bruno Simão

 

Trouble Texte, musique et mise en scène de Gus Van Sant

Avec : Carolina Amaral, Diogo Fernandes, Francisco Monteiro, Helena Caldeira, João Gouveia, Lucas Dutra, Martim Martins, Miguel Amorim, Valdemar Brito

Collaboration artistique : John Romão

Direction musicale : Paulo Furtado / The Legendary Tigerman

Direction vocale : João Henriques, Pessoa Junior

Scénographie : José Capela

Assistant scénographie : Antonio Pedro Faria

Avec les images de José Carlos Duarté

Portraits : Bruno Simão

Costumes : Joyce Doret

Assistante costumes : Luana Portella

Lumières : Rui Monteiro

Son : João Neves

Technicien son : Rui Antunes

Assistante chorégraphique : Sonia Baptista

Assistante à la mise en scène : Teresa Coutinho

 

Du 15 au 18 décembre 2022

Jeudi et vendredi à 19h, samedi 18h, Dimanche 17h

La Villette / Grande Halle

211 avenue Jean-Jaurès

75019 Paris

 

Réservation : 01 40 3 75 75

www.lavillette.com

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