© Michel Cavalca
ƒƒƒ article de Victoria Fourel
Dans l’usine de pyjamas Sleep-Tite couvent plusieurs révolutions. D’un côté, les ouvriers (et surtout les ouvrières) cherchent tous les moyens de se faire respecter, et par là, d’obtenir une augmentation de 7 cents et demi. De l’autre, les histoires d’amour naissent et bousculent tous ceux qu’elles touchent. Et notamment le nouveau directeur exécutif Sid Sorokin, tombé amoureux de Babe Williams, la syndicaliste.
The Pajama Game est une comédie musicale, tant sur scène que sur pellicule, que le public américain connaît bien. Plusieurs chansons en sont restées, et il est bon que le public français vienne à la rencontre de ce répertoire. Car c’est un genre riche, gai, que la scène française découvre timidement, mais qui a beaucoup à lui apprendre. Dans cette traduction et mise en scène de Jean Lacornerie, on garde la précision et les codes du genre. Un rythme et un jeu vaguement cartoon, des chansons reprises plusieurs fois comme des rondes tout au long du spectacle. Les personnages sont bien dessinés, et une énergie folle est déployée, tant dans les couleurs, les costumes, la scénographie. L’accent est mis sur le feel good, sur la drague, la vivacité, le chœur.
Ce que The Pajama Game a d’intéressant dans le paysage des comédies musicales, c’est son sujet, la lutte sociale et les conflits ouvriers, mis en chansons. Ça surprend, et ça ne peut pas faire de mal. Autre nouveauté pour le public, cette fois du fait de cette production uniquement : toute la partition musicale a été étudiée pour pouvoir faire passer les comédiens dans l’orchestre et assurer la musique du spectacle. Chaque comédien, qui chante et danse sur scène, s’empresse de prendre son instrument dès qu’il le peut. Cela renforce sans aucun doute l’unité de la troupe, et l’intérêt de chaque personnage, qui gagne, un peu malgré lui, en profondeur.
La question restante, c’est celle de l’héritage et du répertoire : avec ce type de spectacles, on est à la lisière entre une création complètement nouvelle, et une reprise d’une œuvre. Où se situe la jonction ? Peut-on complètement revisiter la chorégraphie, par exemple, ou se doit-on de reprendre le travail original de Bob Fosse ? Doit-on revisiter avec panache les comédies musicales, ou bien coller à la lettre à tout ce qui faisait la première version ? Les deux possibilités, très tranchées, se retrouvent en ce moment, dans ce qui est proposé au spectateur avide de musicals. D’une part la reproduction, le répertoire, et d’autre part, la suite de la vie d’une œuvre, comme il en va pour n’importe quelle pièce de théâtre.
Ce Pajama Game, réinventé par le trio Jean Lacornerie, Gérard Lecointe et Raphaël Cottin se range résolument dans cette deuxième catégorie, avec une grande précision, et un amour pour le pluridisciplinaire. Le cœur de tout amateur sera de toute façon touché par les voix des comédiens, excellentes, très Broadway. La salle est heureuse et les personnes sur scène aussi. Si on nous avait dit qu’on aurait envie de faire la révolution en pyjama !
© Michel Cavalca
The Pajama Game, livret George Abbott et Richard Bissel
Musique et Paroles Richard Adler et Jerry Ross
Mise en scène Jean Lacornerie et Raphaël Cottin
Direction musicale et arrangements Gérard Lecointe
Scénographie Marc Lainé et Stéphan Zimmerli
Lumières David Debrinay
Costumes Marion Benagès
Traduction Jean Lacornerie
Avec Dalia Constantin, Marianne Devos, Marie Glorieux, Vincent Heden, Cloé Horry, Pierre Lecomte, Mathilde Lemonnier, Alexis Mériaux, Amélie Munier, Zacharie Saal, entourés d’un trio de musicien : Gérard Lecointe, Sébastien Jaudon et Daniel Romero
Du 19 au 29 décembre 2019
Du mercredi au vendredi à 20h
Le samedi à 19 h 30 et le dimanche à 15 h
Durée 2 h 30 environ, avec entracte
Théâtre de la Croix-Rousse
Place Joannès Ambre
69004 Lyon
Réservation au 04 72 07 49 49
www.croix-rousse.com
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