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Stand-Up, conçu et mis en scène par Mohamed El Khatib, Théâtre de la Croix-Rousse, Lyon

Avr 10, 2025 | Commentaires fermés sur Stand-Up, conçu et mis en scène par Mohamed El Khatib, Théâtre de la Croix-Rousse, Lyon

ƒ article de Paul Vermersch

La proposition de Stand-Up est honnête en ce qu’elle s’annonce dès le départ : on fait venir le Comédie Club au théâtre. Le public sait immédiatement à quoi il va assister, des humoristes vont venir défiler et présenter leurs blagues un peu à l’instar du Montreux Comedy ou du célèbre Jamel Comedy Club.

Un présentateur bègue introduit les jeunes artistes, le ton est immédiatement donné, il s’agit de faire avec ce qu’on est. Les comédien.es (talent Adami 2025) s’interrogent et font rire à partir d’eux-mêmes, de leurs parcours, leurs origines, leur orientation sexuelle. Des vies intimes dévoilées, supposées vraies (mais peut-être pas, le présentateur se révèlera ne pas être bègue, venant ainsi mettre en doute tout le caractère biographique de ce qui a été dit par chacun tout au long des numéros) qui se déplient autour des codes classiques du stand-up. Autodérision, caricature, jeux de mots, on passe volontiers d’un.e comédien.ne avec la curiosité de découvrir un nouveau personnage, et c’est à peu près tout. Difficile d’adhérer autrement qu’en souriant à ce qui finit par nous parvenir comme un propos assez tiède : ni vraiment politique, ni vraiment subversif, on finit par s’ennuyer dans ces blagues qui manquent de vertige. Alors que des thématiques profondément politiques – et nécessaires – sont pourtant effleurées par certain.es des interprètes (le racisme latent chez le public des théâtres, l’appropriation culturelle sur les plateaux, et plus généralement la xénophobie, l’homophobie et le classisme) on en reste souvent soit au commentaire, soit à l’explication didactique. Et on s’ennuie d’entendre les habituelles blagues sur le jeune bourgeois qui tombe amoureux en cousinade ou de voir un énième sketch sur le tempérament des Marseillais…

Et au fil de la pièce – ou du show – une question se pose : en quoi le théâtre vient-il nourrir ce qui advient dans Stand-up ? La forme semble parfaitement transportable ailleurs, on ne se sent au théâtre que lorsque les effets de réel tombent, notamment quand on comprend que le présentateur bègue ne l’est pas. Mais, après avoir vu plusieurs pièces de Mohamed el Khatib, on reconnaît un peu cette mécanique qui ici a l’air de travailler un peu à vide. L’enjeu était-il simplement de piéger les spectateurs ? On a du mal à faire parler cet automatisme finalement assez reconnaissable et qu’on ressent en plus très écrit. On finira aussi par résister un peu au propos qui parcourt le spectacle en sous-texte et qui tente de rapprocher très fort le stand-up d’une « tradition orale » (d’ailleurs très vaguement définie). Difficile de voir clair dans ce qui se dit avec les parallèles entre Jésus et le stand-up et ce grand panneau de fin qui fait apparaître toutes sortes de noms d’artistes de toutes les époques. Faudrait-il percevoir un désir très maladroit – et assez gênant – de doter la pratique d’une « véritable légitimité artistique » (puisqu’il est évident que le stand up est un art à part entière…) ? De la rapprocher de la tradition théâtrale et de lui faire une place sur les plateaux ? Encore une fois le spectacle reste en suspend et semble se contenter de la simple parole des humoristes, qui à elle seule, peine à venir ouvrir des perspectives plus larges que le simple plaisir de recevoir une blague bien écrite.