© Jean-Pierre Maurin
ƒ article de Victoria Fourel
Deux femmes se lèvent. Deux femmes se parlent. Deux femmes attendent. Phrases courtes, mains qui courent sur les vêtements. Devant leur caravane elles se demandent s’ils vont venir. Ce qu’ils vont penser. Terrain vague de vies de femmes abîmées, amitié et souvenirs qui piquent rythment une journée sans rythme.
Le texte du spectacle joue sur une dynamique entre drôlerie et grande mélancolie entre les deux personnages, questions et réponses courtes, répétitions à la limite de la boucle. On entre dans un comique de répétition, mais un comique sombre. Même chose pour l’identité visuelle. Une caravane, de la brume, un lieu sans vie si ce n’est les leurs. Et des personnages en forme de duo drôle et tragique.
Elles n’attendent pas Godot, mais on est bien dans ce lieu informe de l’attente, du mystère ordinaire, du duo de hasard qui n’a rien demandé à personne. Très rapidement on voit les fêlures, on imagine ce qui les a transformées en sorte de réfugiées. On parle de l’importance de l’image, de la misère, de l’impuissance. Le problème arrive à peu près à mi-parcours, lorsque plusieurs boucles se sont succédées dans les partitions et que les répétitions déclenchent moins de réactions. Lorsqu’on a compris le procédé et la musique du texte. Lorsque l’on commence à reconnaître des ficelles et des traits.
La mise en scène réussit à créer une atmosphère presque magique autour de ce terrain et de cette caravane triste et bizarrement drôle, aussi. Certaines scènes sont intéressantes lorsqu’elles reconvoquent l’histoire passée de ces femmes, dessinant enfin leurs histoires de souffrance, le pourquoi du comment de leurs blessures. Mais le chemin pour en arriver jusque-là est très appuyé, on comprend très rapidement confusément où cela va, et l’on se retrouve à attendre la prochaine étape.
Privés de feuilles les arbres ne bruissent pas est un spectacle qui raconte avec une grande précision et un sens aigu de l’absurde, les luttes et les blessures des femmes, de leur reconstruction, aussi. On apprécie de voir ces personnages féminins, joués par des comédiennes très précises, elles aussi, tout en trouvant le procédé un peu trop écrit, comme jouant sur un faux suspense. On n’est pas tout à fait convaincus de tout, même si on joue le jeu de l’attente. D’ailleurs, elles attendent qui finalement ?
© Jean-Pierre Maurin
Privés de feuilles les arbres ne bruissent pas, de Magne van den Berg
Mise en scène : Pascale Henry
Scénographie : Michel Rose
Costumes : Audrey Vermont
Composition musicale et sonore : Laurent Buisson
Lumière : Michel Gueldry
Régie générale et plateau : Céline Fontaine
Avec : Valérie Bauchau et Marie-Sonha Condé
Du mardi 23 au samedi 28 janvier 2023
à 20h30
Théâtre des Célestins
4 rue Charles Dullin
69002 LYON
Réservation : 04 72 77 40 40
www.theatredescelestins.com
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