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Pic, du Surnatural Orchestra et Cirque Inextrémiste, Espace Cirque d’Antony Azimut

Mar 03, 2023 | Commentaires fermés sur Pic, du Surnatural Orchestra et Cirque Inextrémiste, Espace Cirque d’Antony Azimut

 

© François Dehurtevent

 

ƒƒƒ article de Marta Plou

Aller voir Pic pour y vivre l’esprit du Cirque avec un grand C, passer une soirée dans le terrain vague sous le chapiteau des saltimbanques, ceux qui vivent de leurs tours d’acrobatie mais surtout de communauté, de fantaisie, de joie franche, de musique, de confiance les yeux fermés et de bouts de ficelle. C’est là ce qui déborde si généreusement de la rencontre des deux collectifs que sont le Cirque Inextrémiste et le Surnatural Orchestra.

Ce soir, tout commence par un grand trampoline à la renverse et un orchestre au son renversant ! Il y a là-dedans de la fanfare déambulante avec ses cuivres clinquants, sa grosse caisse et son imposant soubassophone mais en beaucoup plus foutraque et spiralé, et il y a du big band de jazz aux déstructurations contemporaines mais en moins « assis ». Les flûtes et le piccolo côtoient la famille des sax et des trombones au complet de leurs tessitures, auxquels s’ajoutent des claviers, guitares électriques, basse et batterie, tout cela juché sur une estrade et parfaitement orchestré, dans une musique qui a l’air de couler de source et de spontanéité mais dont les méandres fascinants n’en finissent pas de caresser nos oreilles, frapper les sens de fureurs stridentes, de dissonances superbes et de fréquences basses complexes. Cette musique s’étire comme plusieurs marées sur toute l’entrée du public, avouons que c’est un accueil grandiose. Grandiose, ou plutôt expressionniste ! Les musiciens vêtus et grimés en noir, blanc et quelques touches de rouge, debout, entassés et mus par des interactions et des déplacements le plus souvent indistincts, auraient pu sortir d’un tableau d’Otto Dix, la décadence en moins, entre ivresse, jovialité, chaos et profusion d’actions simultanées.

Et voilà qu’une main se tend de sous le trampoline ! « – Y a-t-il quelqu’un pour m’aider à sortir de là ? oui, venez ! » Le décor était planté, voilà l’action. Agir car l’espoir est fait d’actes. Coopérer, oui, sans cesse, (dé)montrer la force de l’aide mutuelle en décomposant chaque action générale en une ribambelle de gestes singuliers qui se coordonnent. C’est beau comme un commencement. Car non seulement ils sont nombreux, mais ils le montrent et ils en jouent ! Les déplacements pour « tomber à pic », c’est-à-dire se trouver au bon endroit juste avant le moment où tout le monde s’en rend compte est un réel leitmotive de la pièce, que ce déplacement soit simple, périlleux, quotidien, acrobatique, drôle, absolument imperceptible ou massif, vital pour les partenaires ou d’une poésie gratuite.

Ce qui est magique c’est qu’on s’y perd, à la manière, j’ose la comparaison, de spectacles de Meg Stuart. On s’y perd quant à ce qu’on voit, ce qu’on entend et ce qu’on ne voit pas, et on s’y perd en termes de repères (en cela le clown blanc créé par Delphine Dupin y est pour beaucoup). Car les actions ont lieu pour la beauté d’avoir été faites et non pour (en) dire quelque chose. Ni la musique, ni jamais personne n’est là pour illustrer. Il ne s’agit pas de faire un chant, un saut, une pirouette sur une corde mais on chante, on saute, on tourne et on joue, par bonne concordance, par hasard, par envie. Et dans tout ça, il n’y en a pas un qui a raison et qu’il s’agit de suivre. C’est l’aplanissement des il faut et on devrait. Ceux qui étaient tête en haut se retrouvent tête en bas et on tourne en rond, on ne va pas aller quelque part, d’ailleurs l’ailleurs est déjà ici.

Il est assis sur une chaise en équilibre sur un pied et il y reste. Est-elle en train de voler ou de tomber ? Sont-ils en train de souffler pour jouer ou de jouer pour ne pas sombrer ? Peut-on supporter le bruit ? Et le silence ? Plonger du haut du chapiteau vers le trampoline pas encore placé ou voler d’un mât à l’autre ? Il y a eu des moments de cirque oui, avec acrobate soliste, mais ce furent presque les prétextes à tout le reste. Prétextes à être embarqué dans cette danse de la vie où on a toujours à faire avec quelques Autres. À la recherche de l’envol ? Certes, avec le grand trampoline, comme agrès et comme accessoire scénique omniprésent, l’aérien et la verticalité sous-tendent la pièce ; l’air devient palpable à force d’être traversé dans toutes les directions et si rempli de son. Il est si dense que jamais on n’aura vu avec autant d’intensité et d’étoiles dans les yeux le vol d’avions en papiers, magnifique scène méditative où, tous, nous sommes restés suspendus une bonne dizaine de minutes…

 

© François Dehurtevent

 

 

PIC du Surnatural Orchestra et Cirque Inextrémiste

Mise en scène, conception scénographique : Yann Ecauvre (Inextrémiste)

Coordination artistique / regard extérieur : Camille Secheppet et Delphine Dupin

Adaptation chapiteau, conception gradins, scénographie cirque et direction technique : Nicolas Legendre

Conception patience et assistant cordes : Hervé Banache

Chef monteur et régie plateau : Bernard Molinier

Création lumière : Jacques-Benoît Dardant et Anne Palomeres

Création du dispositif sonore : Zak Cammoun, Rose Bruneau, Geoffrey Durcak et Manu Martin

Costumes : Solenne Capmas

 

Avec :

Surnatural Orchestra : Léa Ciechelski (flûtes, sax alto, chant), Clea Torales (flûte, sax alto), Basile Naudet (sax sopranino et alto), Jeannot Salvatori (sax baryton, chant), Guillaume Christophel (sax ténor, clarinette), Nicolas Stephan (sax ténor, chant), Fabrice Theuillon (sax baryton et alto), Pierre Millet et Antoine Berjeaut (trompette), Julien Rousseau (euphonium, trombone soprano), François Roche-Juarez (trombone, guitare, chant), Hanno Baumfelder (trombone), Bertrand Landhauser (trombone, claviers), Boris Boublil (claviers, guitare), Fabien Debellefontaine (sousaphone, flûte à bec), Ianik Tallet (batterie), Sven Clerx (percussions)

Cirque Inextrémiste : Yann Ecauvre ou Delphine Dupin (acrobatie), Rémi Bezacier (trampoline), Viivi Rohia ou Julie Delhomme (corde), Fabrice Dominici (objets volants ultralégers, jonglage), Julien Favreuille et Hervé Banache (manipulation cordes)

 

Durée approximative 1h30

 

Tournée :

Du 13 au 18 janvier 2023

Brest, Le Quartz

Chapiteau dans le Complexe sportif de la Résistance – St Pierre Quilbignon

31 janvier, 1er et 2 février 2023

Quimper, Théâtre de Cornouaille – Scène nationale de Quimper, Festival Circonova

Du 25 au 29 avril 2023

La Rochelle, La Coursive

Du 1er au 4 juin 2023

Elbeuf, Cirque-Théâtre

Du 13 au 16 juin 2023

Besançon, Les 2 Scènes

 

 

 

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