Par Théodore Lacour

© Philippe Weissbrodt

Une soirée et deux duo composés des deux mêmes interprètes et orchestrés par Philippe Saire. Pour être plus précis, dans la première proposition s’ajoute un troisième partenaire : la lumière et le texte étroitement mêlés.

Les deux propositions diffèrent en ce sens que l’une est plus narrative pendant que l’autre joue de l’abstraction. Que l’une voit se composer et se diviser deux individus pendant que l’autre joue sur une sorte d’unisson ou du moins de matière commune. Que l’une joue de la lumière et du texte comme partenaires signifiants à part entière alors que l’autre pièce s’appuie sur un dispositif imaginé et mis au service du propos.

Elles se rejoignent du fait de la présence des deux mêmes interprètes totalement plongés, immergés et au service de chacune des pièces. Et ça c’est toujours beau à voir. Elles se rejoignent aussi, et là c’est plus à regretter, dans le fait qu’on se demande un peu vers ou veulent en venir Philippe Saire et ses interprètes.

En effet, dans Neons Never Ever, Oh ! Noisy Shadows, la proposition écrite produit un peu cet effet où l’on tente de nous expliquer ce que nous devrions sentir. Elle réduit parfois le travail à un unique sens. Les relations dansées entre les deux hommes sont alors lues sous le prisme du texte qui agit comme un trop fort colorant. C’est comme si Philippe Saire ne faisait pas assez confiance à nos sensations, à nos yeux et à notre capacité à nous projeter. Malgré de belles images, de belles idées, des moments intenses entre les deux hommes ; la relation avec les caissons lumineux manipulés par les interprètes semble plus les contraindre que leur laisser le champ libre. Pourquoi vouloir modifier constamment l’espace de jeu, l’espace du visible et de l’invisible si l’on n’en joue que si peu ! On nous accueille par un rapport au fait de « se laver », et nous n’avons ni la sensation physique, ni la perception de corporéités lavées de quoique ce soit lorsque le noir se fait. Quel dommage !

Dans Vaccum, le jeu d’apparitions et disparitions des corps dans cet espace lumineux construit de vrais paradigmes dans lesquels nous pouvons nous laisser fondre, nous laisser impressionner comme un papier photographique d’images, de sensations et de terres corporelles inconnues. En ce sens cette proposition nous paraît plus réussie. En effet, son côté abstrait évacue toute tentative de fable ce que nous pourrions reprocher à la pièce précédente. Cependant, la répétitivité crée un essoufflement de notre attention et de nos projections. Nous aimerions être conduit encore plus loin au delà ou en deçà, disparaître ou sortir du cadre imposé tout au long de la pièce. Tristement cette suite assez linéaire d’images nous invite plus à essayer de comprendre qu’est ce que les interprètes nous donnent à voir, quelles sont les parties anatomiques en jeu plus que tout autre chose. Plus qu’un voyage que nous ferions ensemble dans nos propres méandres. C’est aussi dommage !!

Il n’en reste pas moins que tentative il y a dans les deux pièces et que c’est notre désir de voir éclore encore plus les tréfonds, les obscurités et les chemins intimes qui nous porte à nous attrister de ces pas un peu trop de côtés qui nous expulsent parfois des propositions.

NEONS Never Ever, Oh ! Noisy Shadows
Concept, chorégraphie et textes : Philippe Saire
Avec Philipisa Bouchariatpe Chosson, Pep Garrigues
Création sonore Stephane Vecchione
Costumes Anton Lukas
Dramaturgie Roberto Fratini Serafide

Vaccum
Concept, chorégraphie : Philippe Saire
Avec Philippe Chosson, Pep Garrigues
Création sonore Stephane Vecchione
Réalisation dispositif Léo Piccirelli

Les 17 et 18 novembre à 20h00 dans le cadre de Dispositifs qui se déroule du 14 au 25 mai 2018

Centre Culturel Suisse
38 Rue des Francs Bourgeois
75003 Paris
Réservations : ccs@ccsparis.com – 01 2 71 44 50

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