© Yves Trauger
ƒƒ article de Hoël Le Corre
Iels sont sept. Toustes issu.e.s de la formation Lecoq, connue pour son approche physique du théâtre. Cet après-midi, il fait 14°C à Belleville, le temps est couvert – mais stable, pourtant, quelque part, on le sait, c’est scientifique : une tempête se prépare. Le spectacle aussi, se prépare, sous nos yeux : les sept comédien.ne.s s’échauffent, dansent, s’étirent, au rythme de chants révolutionnaires.
Puis le spectacle commence ; il nous propose une plongée dans la Commune de Paris, épisode trop absent de nos livres d’histoires, que le Collectif In Itinere ressuscite grâce à un travail corporel impressionnant. Le travail de cette troupe utilise effectivement le geste comme premier langage, et ici, il permet d’illustrer organiquement, à l’aide d’images puissantes, tantôt métaphoriques, tantôt extrêmement concrètes, les différentes étapes de cette trop courte expérience sociale que fût la Commune. Sous la direction de Thylda Barès, les corps se déploient, virevoltent, ralentissent, se rassemblent, figurant des monuments, des mouvements de foule, des barricades, autant de tableaux vivants inventifs et surprenants qui nous donnent à voir un corps social en mouvement. Le chaos de la révolution entre en contraste avec le travail minutieux et précis des corps qui évoluent sur les quelques mètres carrés d’un tréteau. La parole, elle, n’est pas en reste, avec quelques moments croustillants, notamment les passages mettant en scène l’assemblée citoyenne des communards, représentés, pour le clin d’œil à la mode de l’époque, par des personnages à grosses moustaches.
En physique, le nombre de degrés de liberté d’un système permet de déterminer à quel point celui-ci peut évoluer sans contrainte. Et ‘n’, c’est toujours l’inconnu. Outre l’ambition de redonner vie à la Commune de Paris, n degré de liberté évoque les changements climatiques, politiques et sociaux contemporains. En donnant la parole aux comédien.ne.s en tant qu’individus dans des apartés intimes, le spectacle rappelle aussi qu’un rien peut faire basculer les choses ou les laisser au point mort. Il interroge aussi sur la capacité des citoyen.ne.s à faire face à l’échec, à ne jamais abandonner dans leurs combats, qui parfois semblent perdus d’avance. Sous prétexte que les grandes utopies du début du XXe siècle se sont délitées, faut-il accepter le statut quo ? Ou bien se préparer à la prochaine tempête ? Voire y contribuer ? Ces allers-retours passé-présent rendent le propos dense, peut-être parfois un peu trop dense au risque de s’éparpiller un peu, mais l’énergie déployée et l’enthousiasme sur le plateau rendent tout de même le tout digeste, et on ressort chargés de belles images et avec l’envie de s’engager pour changer le cours de l’Histoire.
© Yves Trauger
n degré de liberté, par le Collectif In Itinere
Texte : Écriture collective – In Itinere Collectif
Mise en scène : Thylda Barès
Dramaturgie : Ezra Baudou
Avec : Victor Barrère, Andrea Boeryd, Paul Colom, Manon Dumonceaux, Nathan Chouchana, Harry Kearton et Mahtab Mokhber
Accompagnement scientifique : Aglaé Jézéquel – ENS Paris et Davide Faranda – CNRS Saclay
Régie générale : Clémentine Pradier et Sebastien Roman
Création son : Lucas Pizzini
Création lumière et Régie générale : Clémentine Pradier et Sebastien Roman
Soutien musical : Lucie Sansen – Hall de la chanson
Scénographie : Popito et Aurélien Izard
Du 4 au 26 novembre 2025
Lundi à 21h15, mardi à 19h, dimanche à 20h
Durée : 1h20
Théâtre de Belleville
6 passage Piver,
75011 Paris
Réservations : 01 48 06 72
reservations@theatredebelleville.com
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