© Yohanne Lamoulère
ƒƒƒ article de Hoël Le Corre
Comment vous êtes-vous rencontrés ? Comment étiez-vous à mon âge ? Vous arrive-t-il encore de faire l’amour ? Seriez-vous prêts à monter sur scène avec moi ? Autant de questions que les élèves comédiens à l’Ecole du Théâtre National de Bretagne ont dû poser à leurs parents en préambule de la création de ce spectacle, sous la houlette du metteur en scène Mohamed El Khatib. Ce qui n’était au départ qu’un exercice d’autoportrait en visioconférence, pour cause de confinement, s’est muté en véritable plongée ethnographique d’une espèce, inéluctablement, en voie de disparition, nos parents : « De fil en aiguille, nous en sommes arrivées au point de vue que nous portons sur nos parents, de quoi héritons-nous avec amour et tendresse et que rejetons-nous. »
Entre vérités et non-dits, entre fantasmes et souvenirs, entre récits et imitations, Mes parents aborde les rapports parents/enfants avec émotion et humour, et toujours avec pudeur. Car même si la caricature peut servir de catalyseur, il en ressort toujours une vérité intime et touchante.
C’est ainsi une dizaine de jeunes comédiens, âgés de 20 à 27 ans, qui nous livrent des fragments de ce que sont leurs parents : petits secrets de famille, photos de mariage ou encore journaux intimes de leurs parents. Et à travers eux, ce sont des portraits touchants, cocasses ou dénonciateurs qui se font jour. Mais aussi et surtout, des liens invisibles et révélés par les mots et les corps, ceux, indéfectibles des parents et de leur progéniture.
L’une se moque de sa mère qui apprend tant bien que mal à utiliser Whatsapp, l’un nous partage l’admiration qu’il a pour son père malgré une relation difficile, l’autre encore nous fait part de son agacement face à un certain égocentrisme d’un père trop bavard. On le sait, les relations familiales ne sont pas toujours lisses ni obligatoirement complices. Et pourtant, affleure quasiment à chaque fois ce socle d’amour, et même quand celui-ci semble absent, sa recherche fonde la relation.
Dans une partition chorale et une mise en scène épurée et pleine d’enthousiasme, les comédiens jouent à « mentir vrai » selon l’expression du metteur en scène qui a l’habitude de faire surgir des personnages auxquels on ne pense plus tellement ils font partie du paysage. Mais ce qui pourrait s’arrêter à une simple succession de témoignages trouve progressivement un rythme, une cohésion et se transforme en une espèce de symphonie intime et universelle et l’identification propre au théâtre fait le reste : la magie opère et on s’attache à chacun.e tout en étant renvoyé à notre propre histoire. Et sans tout dévoiler, on ne peut que vous conseiller de rester jusqu’à la fin… Bref, une vraie réussite !
© Yohanne Lamoulère
Mes parents, de Mohamed El Khatib
Conception et réalisation : Mohamed El Khatib, avec la complicité des élèves de la promotion 10 de l’École du TNB
Avec, en alternance : Hinda Abdelaoui, Olga Abolina, Louis Atlan, Laure Blatter, Aymen Bouchou, Clara Bretheau, Valentin Clabault, Maxime Crochard, Amélie Gratias, Romain Gy, Alice Kudlak, Julien Lewkowicz, Arthur Rémi, Raphaëlle Rousseau, Salomé Scotto, Merwane Tajouiti, Maxime Thébault, Lucas Van Poucke, Mathilde Viseux, Lalou Wysocka
Collaboration artistique : Dimitri Hatton, Mathilde Vallantin Dulac
Son et vidéo : Arnaud Léger
Lumières : Jonathan Douchet
Scénographie : Valentin Clabault, Lalou Wysocka
Costumes : Laure Blatter, Salomé Scotto, Mathilde Viseux
Dramaturgie : Vassia Chavaroche
Du 13 au 23 septembre 2022
Tous les jours à 20 h, sauf le dimanche 18 septembre
Durée : 1 h 15
Dans le cadre du Festival d’Automne 2022
Théâtre de la Ville, Les Abbesses
31 Rue des Abbesses
75018 Paris
Réservations : 01 42 74 22 77
www.theatredelaville-paris.com
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