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Macbeth, d’après William Shakespeare, adaptation, mise en scène et scénographie de Silvia Costa, à la Comédie-Française

Avr 01, 2024 | Commentaires fermés sur Macbeth, d’après William Shakespeare, adaptation, mise en scène et scénographie de Silvia Costa, à la Comédie-Française

 

 

© Christophe  Raynaud de Lage

 

f article de Denis Sanglard

 Ni bruit ni fureur, mais du sens certainement, dans la mise en scène radicale et résolument plastique de Macbeth par Silvia Costa, qui fut l’assistante de Roméo Castelluci et dont, à son détriment, l’influence esthétique est perceptible, et dans la traduction de Yves Bonnefoy. Une adaptation concentrée autour de la figure de Lady Macbeth, Julie Sicard en froide majesté bientôt cryogénisée par la folie, prolongement de la psyché de son époux et figure centrale ici de cette « pièce écossaise » dont la superstition empêche de prononcer le nom.

Ils ne sont que huit sur le plateau, les trois sorcières endossant les rôles de seconds plans, autant de métamorphoses qui participent d’une hallucination qui contamine lady Macbeth et d’une manipulation, manifestation surnaturelle nouant la tragédie. Déroutante mise en scène pétrifiée, où domine le rouge sang et l’outre-noir, puis le blanc, et une vison religieuse et mystique des plus étrange et incompréhensible, à côté de la plaque même, qui voit le couple infernal revêtu d’habits sacerdotaux, la scène du banquet où apparait le spectre de Banco se jouant tout entière dans un étroit confessionnal enchâssé dans un mur de cathédrale tel un retable, Duncan en Dieu le père qu’on assassine et Macduff en christ rédempteur pour clore cette tragédie… Des images fortes et prégnantes il y en a pourtant. Ainsi cette immense couronne suspendue dominant nos deux futurs criminels, scellant leur pacte comme une alliance (à quoi ressemble aussi cette couronne), annonçant leur sacre entaché du sang de Duncan, prophétie également de leur fin dernière (« devant ton visage est la mort » est-il inscrit en latin sur cet anneau). La première apparition de Lady Macbeth, déjà sur le plateau à l’ouverture de la salle, s’arrachant par poignée sa chevelure emmêlée comme se dépouillant de sa féminité, crachant sur le portrait tournoyant et lacéré de Macbeth, s’inscrivant dans une sororité avec « les sœurs fatales », sorcière à son tour et femme puissante. Mais très vite la scénographie l’emporte sur la mise en scène et la direction d’acteur, réduites à peau de chagrin, comme si elle devait impérativement se substituer à tous discours, métaboliser toutes les intentions, nécrosant les enjeux de cette pièce complexe et qui ne peut se réduire comme ici à une ambivalence dichotomique, voire un simple manichéisme. Les comédiens semblent tétanisés, absents à eux-mêmes, figures pâles s’inscrivant en aplat dans cette scénographie volontairement picturale. A l’exception de Julie Sicard qui, dans son ultime scène, la folie impatiemment attendue, extirpe son épingle d’un jeu par trop hiératique, où enfin sourd des intentions à défaut d’une émotion qu’on n’attendait plus. De fait et heureusement le texte dans son adaptation résiste vaillamment et vaille que vaille au dessein profus de Sylvia Costa qui ne génèrent à contrario et très vite qu’un ennui profond, que de longs silences qui se voudraient l’illustration d’une sidération face aux évènements ( la «  découverte » du meurtre par Macbeth par exemple) ou d’une dilatation de la temporalité propre aux cauchemar, n’illustrent pourtant rien d’autre que ce qu’ils sont, de la vacuité vaine obèrant toute action. Alors oui, on décroche peu à peu, au même rythme que les changements de perspectives de cette scénographie qui recule et se fige au fur et à mesure vers le lointain du plateau provoquant irrémédiablement l’éloignement et le désintérêt des spectateurs.

 

© Christophe Raynaud de Lage

 

Macbeth, d’après William Shakespeare, adaptation, mise en scène et scénographie de Silvia Costa

Traduction : Yves Bonnefoy

Dramaturgie : Simon Hatab

Scénographie : Silvia Costa, Michelle Taborelli

Costumes : Camille Assaf

Lumières : Marco Giusti

Musique originale et son : Nicolas Ratti

Assistanat à la mise en scène : Alison Hornus

Et de l’académie de la Comédie-Française

Assistanat à la mise en scène : Mathilde Waeber

Assistanat à la scénographie : Dimitri Lenin

Assistanat aux costumes : Alma Bousquet

Assistanat au son : Ania Zante

 

Avec : Alain Lenglet, Julie Sicard, Pierre Louis-Calixte, Suliane Brahim, Jennifer Decker, Julien Frison*, Noam Morgensztern, Birane Ba*, Clément Bresson. * en alternance

Voix de l’enfant : Marceau Adam Connan

 

Jusqu’au 20 juillet 2024

En matinée à 14h, en soirée à 20h30

 

Comédie-Française

Salle Richelieu

Place Colette

75001 Paris

 

Réservations : 01 44 58 15 15

www.comedie-française.fr

 

 

 

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