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Les Idoles, de Christophe Honoré, Odéon Théâtre de l’Europe

Jan 12, 2019 | Commentaires fermés sur Les Idoles, de Christophe Honoré, Odéon Théâtre de l’Europe

© Jean-Louis Fernandez

 

ƒƒƒ article de Nicolas Brizault

Les Idoles. Un terme évoquant la joie hystérique, magique pourquoi pas, ou ces figures devant lesquelles on se prosterne, on remercie. Celles que souhaite nous présenter Christophe Honoré sont celles qui ont été terriblement efficaces pour lui. Ses idoles. Celles qui viennent se balader ce soir à l’Odéon, Cyril Collard, Bernard-Marie Koltès, Jacques Demy, Hervé Guibert, Jean-Luc Lagarce et Serge Daney, idoles passées de l’autre côté du mur entre 1989 et 1994. Sida oblige, les années destructrices, les années dégoût pour certains, peur pour d’autres, tremblement particulier pour les gamins des années 1970, qui débarquaient dans la vraie vie, sexe et réflexion.

Tout débute avec la voix seule de Christophe Honoré, perchée dans les airs, résonnante et comme ayant fait le mur elle aussi, et qui nous explique, nous raconte son plaisir, ses découvertes cinéma, bouquins, journaux de ces années-là, lorsqu’il est arrivé à Paris. Ce qu’il doit à leurs auteurs. Et l’hommage à travers Les Idoles débute. Collard/Harrison Arévalo, Koltès/Youssouf Abi-Ayad, Demy/Marlène Saldana, Guibert/Marina Foïs, Lagarce/Julien Honoré et Daney/Jean-Charles Clichet sont à l’Odéon, avec nous, ils sont en face, profitent d’être là sans trop savoir pourquoi, ils ne sont pas vivants mais presque. Deux femmes présentes dans la distribution, idée salvatrice, résonnante, raisonnante.

Tous les six se marrent, discutent, se draguent ou s’engueulent, la vie est là. Cette chose étrange, pas mal en fait, si jouissive et lumineuse qu’on s’y perd parfois mais il n’y a pas photo, c’est formidable. Sauf que ça fini toujours mal et que là, ce n’était pas le moment. Sida. Sida très tôt. Sida débuts. Le secret, la fuite, en avant, en arrière. Les amis, la famille, ou rien. Cet épuisement lent du corps qu’ils ont décrit ou non.

Tous les six se souviennent, oui, du splendide et du casse-gueule, parlent d’isolement, après les emballements, l’enfermement des derniers jours à l’hôpital. La douleur en silence parfois, cachée sous les tubes, couvertures blanches, et plus rien que le bête latex des gants, ce salopard de latex, pas assez là de leur vivant. La menace, la peur, cette salope de mort bien plus discrète aujourd’hui. Ils racontent en faisant la fête ou pas. Demy, nu sous son vison, boude, il ne veut pas qu’on sache et ne rejoint pas tout de suite ce groupe à peu près lié, et puis merde ! Vive Les Demoiselles de Rochefort ! et cette magnifique Marlène Saldana nous emporte dans un ballet somptueux. Collard, pour s’amuser quand il n’est pas en train de draguer chaudement, se fait une fausse-vraie victoire aux Césars. Il est mort trois jours avant que Les Nuits Fauves en gagne quatre. Etc.

Ne pas imaginer une seconde une litanie larmoyante, pas du tout. Les éclats de rire épousent les larmes, le noir. Si beau, si proche. Oui. La vie, là ce soir, sous nos yeux. Une pièce magique, à travers les mots, le silence ou la chiasse. Honoré nous fait comprendre la force que lui ont donnée ses « idoles », et lui nous donne envie de relire ces auteurs, de revoir leurs films et de nous envoyer en l’air.

Et si on n’a pas lu, si on ne connaît pas ? Ce n’est rien, tous les six sont des hommes, des hommes ce soir en face d’une porte entrebâillée.

Le noir.
Le rire, le sexe, l’amour.
La fin, la mort.

Fais-moi l’amour.

 

© Jean-Louis Fernandez

 

Les Idoles, de Christophe Honoré

Scénographie Alban Ho Van
Dramaturgie Timothée Picard
Lumière Dominique Bruguière
Costumes Maxime Rappaz
Collaboration à la mise en scène Teddy Bogaert

Production Comité dans Paris, Théâtre Vidy-Lausanne

Coproduction Odéon-Théâtre de l’Europe, Théâtre National de Bretagne, TAP – Théâtre Auditorium de Poitiers, La Comédie de Caen – CDN de Normandie, TANDEM – scène nationale, Théâtre national de Toulouse Midi-Pyrénées, Le Parvis Scène nationale Tarbes-Pyrénées, La Criée – Théâtre National de Marseille, MA scène nationale – Pays de Montbéliard

Avec la participation artistique du Jeune théâtre national

Avec le soutien du Cercle de l’Odéon

 

Avec Youssouf Abi-Ayad, Harrison Arévalo, Jean-Charles Clichet, Marina Foïs, Julien Honoré, Marlène Saldana et Teddy Bogaert

 

Du 11 janvier au 1er février 2019 à 20h00

A 20h du mardi au samedi, 15h le dimanche

Surtitrage en anglais le samedi 26 janvier

 

Durée 2h30

 

Odéon Théâtre de l’Europe

Place de l’Odéon

75006 Paris

T+ 01 44 85 40 40

http://billetterie.theatre-odeon.eu

www.theatre-odeon.eu

 

Entrée du public : Place de l’Odéon
Métro 4 et 10 : Odéon
RER B: Luxembourg
RER C : Saint-Michel
Bus : 63, 87, 86, 70, 96, 58
Parkings : rue Soufflot, Place St Sulpice, rue de l’Ecole de Médecine
Vélib’ : stations 6028, 6017, 6016

 

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