À l'affiche, Agenda, Critiques, Evènements // L’Élixir d’amour, opéra de Gaetano Donizetti, livret de Felice Romani, mise en scène de Laurent Pelly, à l’Opéra Bastille

L’Élixir d’amour, opéra de Gaetano Donizetti, livret de Felice Romani, mise en scène de Laurent Pelly, à l’Opéra Bastille

Oct 07, 2021 | Commentaires fermés sur L’Élixir d’amour, opéra de Gaetano Donizetti, livret de Felice Romani, mise en scène de Laurent Pelly, à l’Opéra Bastille

 

© Emilie Brouchon / OnP

 

ƒƒƒ article de Denis Sanglard

C’est peut-être une reprise, la création date de 2006, mais cela n’a pas pris une seule ride. Il est des mises en scènes qui ne vieillissent pas, intemporelles, allez savoir pourquoi. LÉlixir d’amour, opera buffa de Gaetano Donizetti mis en scène avec délicatesse, malice et minutie par Laurent Pelly est un petit bijou qui distille une sacrée bonne humeur en deux actes colorés et diablement enlevés. Nous sommes à la campagne, au milieu de nulle part, c’est sans doute l’Italie, peut-être les années cinquante, vespas et bicyclettes, blouses fleuries et caoutchoucs aux pieds, un délicieux parfum rétro qui puise sa source dans le cinéma italien néoréaliste, Comencini, De Sentis, Visconti… Sur scène une immense pyramide de bottes de paille, terrain de jeu idéal pour un marivaudage où vont se débattre, avant de s’y ébattre, nos amoureux contrariés. Le livret ? C’est Tristan et Yseult sauce comédie italienne, légende revisitée drôlatiquement par Donizetti et son librettiste Felice Romani, opéra composé en deux semaines, où l’histoire d’Adina et du timide Némorino qui, pour séduire sa belle indifférente et chasser son rival le sergent Belcore, achète au charlatan Dulcamara un philtre d’amour qui n’est rien d’autre que du bordeaux. Mais l’ivresse faisant des miracles… Laurent Pelly donne un sacré souffle de fraîcheur et d’énergie à cet opéra. Une alacrité communicative du plateau jusque dans la fosse d’orchestre où Giampaolo Bisanti survolté embarque avec bonheur et fermeté l’orchestre de l’Opéra de Paris dans un tempo d’enfer, sans rien céder néanmoins aux variations infimes de cette partition bien plus subtile qu’il ne pourrait y paraître. Et de temps à autre, quand même, sachant reprendre son souffle − et le nôtre − dans des respirations bienvenues. Le chœur, en pleine forme lui aussi, n’est pas en reste et visiblement s’amuse sous la direction de Laurent Pelly qui les entraîne dans un joyeux jeu collectif. Il est véritablement le cinquième larron de cette histoire, témoin cancanier de cette amourette dont il attend ironiquement, comme nous, le dénouement. Il est à remarquer combien Laurent Pelly arrive à faire se mouvoir ce chœur avec tant de fluidité et de naturel, lui offrant également un vrai caractère, une belle dynamique, entraîné par Lucrezia Drei dans le rôle de Gianetta, soprano à la voix claire et cristalline. Les rôles titres ne sont pas en reste qui chacun prennent leur rôle avec un allant et une énergie communicative et le plateau vocal est tout simplement éblouissant. La soprano Sydney Mancasola, à la voix somptueuse et légère, allie à la sûreté et l’homogénéité de son chant remarquable un jeu d’une grande finesse. Parfaitement crédible dans le rôle d’Adina à qui elle donne une intensité, une sensibilité rare. La jeune femme libre, espiègle et frondeuse fait place peu à peu à la femme sincèrement amoureuse, inquiète. L’aisance étonnante, tant vocale que dans le rôle, du ténor Matthew Polenzani, ludion bondissant, naïf et passionnément épris, est une très belle surprise. La voix généreuse et ample, libre même, offre au personnage un vrai relief inattendu, une belle sincérité et au-delà de la comédie une réelle émotion. Et l’air « Una furtiva lagrima » a laissé pantois la salle avant de déchaîner les applaudissements à tout rompre des spectateurs… et même du chef d’orchestre, laissant là sa baguette. Simone Del Savio campe un Belcore idéalement fat et plein d’assurance, d’arrogance, aussitôt et malicieusement démenti après sa première apparition du haut de cette pyramide de foin où Laurent Pelly le fait glisser non sans humour de ce piédestal champêtre. Carlo Lepore excelle dans le rôle du bateleur, hâbleur et charlatan Dulcamara. Sa première apparition dans ce camion déglingué, un vrai petit théâtre ambulant, donne illico le ton. Et la voix de basse donne tout son relief à l’abattage théâtral de ce personnage haut en couleur. On sort quelque peu ébouriffé de cette délicieuse escapade campagnarde. Un vrai bol d’air frais !

 

© Emilie Brouchon / OnP

 

 

L’Élixir d’amour, musique de Gaetano Donizetti

Livret de Felice Romani

D’après Eugène Scribe

Direction musicale Giampaolo Bisanti

Mise en scène et costumes Laurent Pelly

Décors Chantal Thomas

Lumières Joël Adam

Dramaturgie Agathe Mélinand

Chef des chœurs Alessandro Di Stefano

Avec Sydney Mancasola, Matthew Polenzani*, Simone Del Savio, Carlo Lepore*, Lucrezia Drei

*en alternance avec Pene Pati, Ambrosio Maestri

 

Le 3, 6, 9, 13, 16, 21, 24, 27, 30 octobre 2021

Le 2 et 9 novembre 2021

 

Opéra Bastille

Place de la Bastille

75012 Paris

Réservations 08 92 89 90 90

www.operadeparis.fr

 

 

Be Sociable, Share!

comment closed