© Christophe Raynaud de Lage

ƒƒƒ article de Sylvie Boursier

Tomber amoureux, se travestir, s’étreindre, s’empoigner, courir, jouer, jouer encore, des jeunes gens se déguisent, des fées apparaissent.

Le Songe c’est l’histoire d’Helena qui aime Démétrius, qui aime Hermia et est aimée de Lysandre. Hermia, promise par son père à Démétrius s’enfuit en compagnie de son amant Lysandre, dans la forêt. Lancé à sa poursuite, Démétrius est lui-même coursé par Helena qui est raide dingue de lui.

Il y a aussi Oberon et Titania, roi et reine des fées aux scènes de ménage apocalyptiques et des acteurs miteux qui tentent de monter une “comédie tragique”, la très lamentable histoire de Pyrame et Thisbé.

Gwenaël Morin lance ses 4 comédiens historiques sur le grand huit du manège shakespearien avec voracité. Et ça déménage, on ne s’embarrasse pas de l’emballage romantique des sentiments, dans les bois on pratique gaillardement l’échangisme sous l’effet de filtre magique, Titania s’accouple avec un âne, doté comme il se doit d’une belle vigueur.

Shakespeare célèbre la puissance du désir qui fait fi de la réalité et un amour du jeu subversif. Gwénael Morin jubile, va à l’essentiel. Ses comédiens enfilent les rôles à une vitesse grand V, jouent avec le texte, sans micros, contre le vent et les cigales. Ils sont chaussés de galoches ou pieds nus, avec pour costumes des bouts de toges de récup ou carrément en slip vue la chaleur. Ce qui compte ce n’est pas la virtuosité technique, au demeurant parfaite mais la présence, l’énergie, le plaisir du jeu. Tout est dans 3 fois rien, il suffit de le vouloir, par la force de l’imagination. Un tableau blanc où est inscrit le déroulement de l’action, deux énormes ballons blancs pour éclairer, des fleurs, un vaporisateur, les acteurs trimbalent les accessoires selon les besoins. Virginie Colemyn est grandiose avec sa voix perchée, malicieuse, qui flaire Démétrius et se dit qu’elle en ferait bien ses quatre heures. Elle fait semblant de bouder comme un enfant et fausse compagnie à ses partenaires. Julian Eggerickx est un Puck vibrionnant, qui zigzague plus vite que son ombre. Grégoire Monsaingeon fait merveille en Nick Bottom, cet  amateur qui s’improvise chez de troupe, jamais à court d’idées , toujours enthousiaste. Et Barbara Jung est intraitable, rebelle, incorrigible. Ils ont 2 à 3 fois l’âge du rôle et c’est encore meilleur car il y a la maturité, le sens du collectif, la complicité.

Philippe Gladieux enchante de ses éclairages la tombée de la nuit au « jardin des délices » de la maison Vilar, et nous avec, assis sur des gradins au milieu des bosquets.

Gwenael Morin démonte les remparts, ouvre le jardin de la maison Vilar, explose le pont, dégomme le quatrième mur, tout peut arriver. Qu’ils jouent Titania ou Helena, Puck, Lysandre, Bottom ou Démétrius ses comédiens nous communiquent leur joie : « J’ai une couronne sur la tête disait Philippe Avron, un sceptre, un habit d’or. […]  Je fais un pas. Je suis roi ».

Il y a un lion, il y a un mur, il y a une lune, des amoureux, des fées et avec tout ça on fait du théâtre !

Superbes tous ! chapeau et merci !

© Christophe Raynaud de Lage

Le Songe, démonter les remparts pour finir le pont, d’après William Shakespeare

Mise en scène : Gwenaël Morin

Dramaturgie :  Elsa Rooke

Chorégraphie : Cecilia Bengolea

Lumière : Philippe Gladieux

Avec Virginie Colemyn, Julian Eggerickx, Barbara Jung, Grégoire Monsaingeon

Du 27 sept au 20 oct à 19h

Durée : 1h45

Pavillon de la Villette

porte de la Villette

réservation : 01 40 03 75 75

vu au Jardin de la rue de Mons – Maison Jean Vilar, Avignon festival IN

Tournée :

27 septembre au 20 octobre 2023 : La Villette Paris (Pavillon Villette)

21 novembre 2023 : Les Salins, scène nationale de Martigues

28 novembre au 06 décembre 2023 : TPM, CDN de Montreuil

12 au 14 décembre 2023 : La Coursive, scène nationale de La Rochelle

19 et 20 décembre 2023 : Le Théâtre de la Coupe d!Or, Rochefort

10 au 18 janvier 2024 : Théâtre Garonne Toulouse

23 janvier 2024 : l!Estive, scène nationale de Foix

25 et 26 janvier 2024 : le Parvis, scène nationale de Tarbes

31 janvier et 1er février 2024 : Espace Malraux, scène nationale de Chambéry

07 mars 2024 : Théâtre de Bressuire

12 au 15 mars 2024 : TAP, scène nationale de Poitiers

19 et 20 mars 2024 : L!Empreinte, scène nationale de Brive-Tulle

29 mars 2024 : Théâtre de Cargèse

03 et 04 avril 2024 : L’Aire Libre, Saint-Jacques de la Lande

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