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Le Ring de Katharsy, conception et mise en scène d’Alice Laloy, au T2G, dans le cadre du Festival d’Automne

Déc 11, 2024 | Commentaires fermés sur Le Ring de Katharsy, conception et mise en scène d’Alice Laloy, au T2G, dans le cadre du Festival d’Automne

 

© Simon Gosselin

ƒƒƒ article de Denis Sanglard

Alice Laloy, marionnettiste et plasticienne, frappe encore une fois très fort. Le Ring de Katharsy expérimente de nouveau, après Pinocchio(live)#2 (http://unfauteuilpourlorchestre.com/pinocchio-live2-conception-et-mise-en-scene-alice-laloy-theatre-montfort-festival-paris-lete/), l’hybridation entre l’homme et la marionnette où le premier n’est plus qu’un pantin manipulé dans un monde dystopique. Transposant ici l’univers des jeux vidéo et sa dramaturgie spécifique sur un plateau de théâtre, ces marionnettes humaines sont désormais des avatars, nouvelles figures contemporaines et emblématiques d’un monde de plus en plus déréalisé, personnages et pions que deux joueurs s’affrontant manipulent sur un ring dominé par une étrange figure, diva futuriste haut perchée, Katharsy, matérialisation vivante de ce programme qu’elle arbitre de même. Pas de joystick mais la voix des deux gamers présents pour des ordres brefs et secs, réduits à l’essentiel : avance, marche, recule, frappe… pour animer dans une drôle de battle en quatre manches ces créatures absentes à elle-même, mues seulement par ces directives comminatoires.

C’est un jeu des plus singuliers et féroce qui les oblige à consommer convulsivement, de façon répétée, les livrant à une concurrence effrénée et mécanique. Se vêtir, ouvrir et vider un colis, manger, jeter ses déchets, pouponner, occuper un siège, aimer, n’est plus que compétition âpre et féroce. Ce n’est bientôt plus un jeu mais une guerre de plus en plus violente qui consiste à arracher à l’autre ce qu’il possède pour s’en approprier et marquer ainsi le plus de points. Jusqu’au meurtre… Pour qui connaît, l’impression étrange et malaisante de voir les SIMS (©) projetés dans l’univers ultra-violent de Street Fighter (©) …

C’est pourtant d’une beauté plastique et sonore absolue. L’importance ici de la bande son est à noter qui participe, comme l’ensemble du reste, à la réussie de cette création pour le moins anxiogène et pourtant captivante de bout en bout. Théâtre d’objet, théâtre chorégraphique pour un monde gris, mécanique – formidable machinerie théâtrale aussi qui voit les objets tomber des cintres et déterminer les enjeux – que quelques bugs, traits d’humour bienvenus, grippent parfois. Et ce qui stupéfie c’est la profondeur du travail corporel des danseurs-circassiens menés par Alice Laloy, cette maîtrise troublante du corps marionnettique qui estompe magistralement la frontière entre l’homme et la marionnette… Une gestuelle, des silhouettes conformes aux avatars virtuels, marches, courses, chutes et gestes doucement heurtés. Corps inanimés, désarticulés s’animant soudain, répondant aux ordres aboyés, pantins sans âme jamais, nulle émotion ne transparaissant, le visage neutre au regard toujours vide, impassibles quoiqu’ils exécutent, jusque l’innommable… C’est à la fois fascinant et glaçant. Se dessine à travers eux et sans rien de démonstratif ou de didactique le projet d’Alice Laloy dénonçant un monde de manipulation et de consommation à outrance, de plus en plus déréalisé, déshumanisé, générateur de violences. Mais il y a cette fin, poétique en diable, qui, comme dans Pinocchio, se refusant à l’inéluctable, lequel n’est jamais vraiment certain chez Alice Laloy. La révolte est possible, oui, un sursaut d’humanité peut jaillir et le gris s’effacer pour le mauve.

 

© Simon Gosselin

 

Le Ring de Katharsy, conception et mise en scène d’Alice Laloy

Ecriture et chorégraphie : Alice Laloy, en complicité avec l’ensemble de l’équipe

Assistanat et collaboration artistique : Stéphane Farison

Collaboration chorégraphique : Stéphanie Chêne

Scénographie : Jane Joyet

Création lumière : César Godefroy

Composition musicale : Csaba Palotaï

Ecriture sonique : Géraldine Foucault

Recherche et développement des accessoires et objets : Antonin Bouvret

Recherche, dessin et dévellopement de lâchés : Antonin Bouvret et Christophe Hugel

Renfort construction : Julien Aillet, Julien Joubert

Création costumes : Alice Llaoy, Maya-Lune Thieblemont, Anne Yarmola

Renfort costumes : Angélique Legrand

Création graphique et vidéo : Maud Guerche

Typographie : Misterpixel, Christophe Badani

Assistanat création vidéo : Félix Farjas, Malo Lacroix

Regard cascades : Anis Messabis

Assistant-stagiaire mise en scène : Salomé Baumgartner

Stagiaire costumes : Esther Le Bellec

Confection des décors : Les ateliers du Théâtre National de Strasbourg

Avec : Coralie Arnoult, Lucile Chalopin, Alberto Diaz, Camille Guillaume, Dominique Joannon, Antoine Maitrias, Nilda Martinez, Antoine Mermet, Maxime Steffan, Marion Tassou

 

Jusqu’au 16 décembre 2024

Durée 1h30

 

T2G, Théâtre de Gennevilliers

41 avenue des Grésillons

92230 Gennevilliers

 

Réservations : 01 41 32 26 26

www.theatredegenevilliers.fr

 

 

 

 

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