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Le rendez-vous, d’après le roman Jewish Cok de Katharina Volkmer, adaptation de Camille Cottin et Jonathan Capdevielle, mise en scène de Jonathan Capdevielle, au Théâtre des Bouffes du Nord

Jan 11, 2025 | Commentaires fermés sur Le rendez-vous, d’après le roman Jewish Cok de Katharina Volkmer, adaptation de Camille Cottin et Jonathan Capdevielle, mise en scène de Jonathan Capdevielle, au Théâtre des Bouffes du Nord

 

© Aloïs Aurelle

fff article de Denis Sanglard

 Récit, confession d’une jeune allemande en passe de faire sa transition, Le rendez-vous, roman décapant de Katherina Volkmer, dont le titre explosif original Jewish Cok interroge avant de comprendre la provocation et la résolution qu’il contient, questionne l’héritage familial, le sentiment de culpabilité qui vous ronge d’être née dans un pays qui vit naître le nazisme et institua l’ extermination industriel et bureaucratique des juifs, la shoah, mais aussi sur l’assignation de genre, ce corps qui vous est étranger, et l’amour de K. rencontré dans les toilettes publiques et bientôt suicidé. Dans ce cabinet de gynécologie, la patiente se raconte sans honte, sans fard et sans tabou, se libérant de ce double fardeaux hérités que cette dernière opération, devenir un jeune homme circoncis, cristallise, ultime et définitif geste d’accomplissement de soi qui répare et réconcilie. On songe à Thomas Bernhard bien sûr, à Elfriede Jelinek plus surement, dans la détestation d’un pays, de son histoire, et des mécanismes de reproduction des stéréotypes sociaux et des archétypes sexistes où le corps devient un enjeu politique et social, porteur des stigmates d’une société malade de son passé et qui trouble votre identité. Le même sarcasme, le même humour crissant, la même rage traversent ce monologue étincelant et corrosif, féministe et queer. Dans ce rendez-vous avec elle-même, avec lui-même pour être plus précis, Camille Cottin est parfaite, d’une justesse aiguisée, qui jamais n’épaissit le trait mais file le texte avec une légèreté, une grâce incomparable, n’ayant crainte du ridicule assumé et de l’incongruité surréaliste des propositions de la mise en scène au carré de Jonathan Capdevielle dont elle se joue et transfigure avec bonheur, où le franc-parler, la punch-line définitive, n’exclue nullement la poésie abrupte que contient aussi ce formidable récit d’apprentissage qui détisse fil à fil la trame des mensonges et des non-dits qui vous oblige et contraint. Et elle est formidablement portée par la mise en scène de Jonathan Capdevielle se refusant à tout réalisme, opérant une heureuse distanciation entre ce récit épatant et ce corps qui ne cesse de se métamorphoser, se désencombrant au long de ce monologue des injonctions historiques, religieuses, sociétales et familiales, qui ne sont que pure fiction, pour atteindre sa vérité propre et profonde, intime, que représente cette bite circoncise greffée, magistrale et salutaire provocation. Le plateau est un espace mental où cohabitent la réalité et le fantasme, le si magique, propre à la (re) et (dé) construction de soi. Ou l’on joue à jouer pour décomposer le passé et mieux recomposer l’avenir. Une scénographie mouvante signée Nadia Lauro, couleur de deuil, violet, parce qu’il s’agit aussi de ça, de faire son deuil, d’un pays, d’une famille et d’une identité, d’un sexe assujetti. Renaître enfin.  Dans cet espace ludique et monochrome, lequel étrangement soupire, respire, Camille Cottin époustoufle donc qui joue, chante, danse, disparaît brutalement pour surgir où on ne l’attend pas, ailleurs et autre, toujours, avec une liberté frondeuse et une jubilation certaine, une certaine gravité aussi, affranchie de son image attendue pour atteindre une vérité sensible et transgressive n’appartenant qu’à ce personnage incarné en profondeur de façon troublante et l’air de rien, voire avec un naturel désarmant qui vous embarque fissa et sans barguigner à ses côtés. Jonathan Capdevielle et Camille Cottin, en complicité absolue et sans esbrouffe, signent ainsi une création inventive, subtile, bien loin de tous clichés, aussi subversive et décapante que ce récit culte, indispensable, au plus près de celui-ci, avec force imagination mais sans nulle trahison, jamais.

 

© Aloïs Aurelle

 

 

Le rendez-vous, d’après le roman Jewish Cok de Katharina Volkmer (paru aux Editions Grasset)

 Adaptation de Camille Cottin et Jonathan Capdevielle

Mise en scène de Jonathan Capdevielle

Avec Camille Cottin

Assistant à la mise en scène : Benjamin Gauthier

Scénographie : Nadia Lauro

Costumes : Colombe Lauriot-Prévost

Création lumière : Yves Godin

Création sonore et musicale : Pierre Boscheron

Chorégraphie : Marcella Santander

 

 

Du 7 au 25 janvier 2025

Du mardi au samedi à 20h, le dimanche à 17h

Durée 1h15

Déconseillé au moins de 16 ans

 

Théâtre des Bouffes du Nord

37bis boulevard de la Chapelle

75010 Paris

 

Réservations : 01 46 07 34 50

www.bouffesdunord.com

 

Tournée :

Les 28 et 29 janvier 2025 à la MC2 Grenoble

Les 31 janvier et 1er février 2025 à Bonlieu, Scène nationale d’Annecy

Les 4 et 5 février 2025 au Radiant, Bellevue, Caluire-et-Cuire

Le 7 février 2025 à l’Onde, Théâtre Centre d’Art Vélizy-Villacoublay

Les 10 et 11 février 2025 à La Coursive, Scène nationale de La Rochelle

Le 13 février 2025 au Théâtre du Vésinet

Le 16 février 2025 à l’Opéra de Vichy

Le 23 février 2025 au Bâtiment des Forces Motrices, Genève

Le 25 février 2025 au Théâtre de Beausobre, Morges

Les 1er et 2 mars 2025 à Châteauvallon Liberté, Toulon

Du 4 au 6 mars 2025 à Anthea, Antibes

Du 11 au 22 mars 2025 au TNS, Strasbourg

Les 24 et 25 mars 2025 au TAP, Poitiers

Les 27 et 28 mars 2025 aux Scènes du Golfe, Vannes

Le 3 avril 2025 au Cratère, Scène Nationale d’Alès en Cévennes

Le 5 avril 2025 à L’Ombrière, Uzès- Le 8 avril 2025 au Parvis, Scène nationale Tarbes

 

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