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Le Bac 68, écrit et mise en scène de Philippe Caubère, au Théâtre de l’Athénée

Oct 13, 2016 | Commentaires fermés sur Le Bac 68, écrit et mise en scène de Philippe Caubère, au Théâtre de l’Athénée

ƒƒ Article de Victoria Fourel

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© Arnold Jarocki

Je n’ai pas connu 68, ni au bac, ni ailleurs. Je n’ai pas connu la Diane, ni Gérard Philipe. Mais je connais Caubère et ses monologues à mille voix, sa précision, ses visages, et Ferdinand Faure, son alter ego, qui, dans cet épisode joué en alternance avec La Danse du Diable au Théâtre de l’Athénée, passe son bac au même moment que la plage est sous les pavés et que les grèves font rage.

Dans le jeu que Caubère invente, tout a une voix. Ferdinand, sa mère, son prof, sa voiture, son public, aussi. Il n’y a pas grand-chose d’autre à voir sur le plateau. Parfois on utilise la musique dans un désir d’épique, on accessoirise vaguement. Mais la plupart du temps, tout se joue dans ce vide, comme on improvise une histoire, comme ça, sur le vif : « Je ne t’ai pas raconté l’histoire de, comment qui s’appelle… ? » Raconter aux plus jeunes, parler aux plus âgés, là est la nuance. Autobiographie et délire. Lors de sketches fleuves, on passe de la bague du Pape à des papillons crucifiés dans une collection, de la Sibérie aux agrumes, du regard consterné d’une mère qui dit des mots à la place d’autres. On rit, beaucoup, on assiste aussi à de vraies perles d’écriture, petits plaisirs lettrés. Et ils en prennent pour leur grade d’ailleurs, les lettrés.

Bien sûr, on peut trouver les trois parties inégales en terme de poids, de construction, la plus satisfaisante étant le passage – enfin – de Ferdinand à l’oral du bac. Et la façon qu’a Caubère d’aborder le seul en scène peut aussi poser question : l’énergie ne se confond-elle pas avec la rapidité ? En n’insufflant à ses personnages que quelques traits, mais en gardant beaucoup de lui en chacun, ne manque-t-il pas des silences, des caractéristiques précises pour les dépeindre ? Rassurons-nous, les questions que me pose l’art de Caubère ne sont que de très saines. Non, il ne se fond pas dans la mère de Ferdinand, oui il y a du bricolé, de l’imité, oui il y a du texte, une multitude d’adresses et de paroles croisées, oui, c’est vif et rapide. Mais une fois que ces conditions sont posées, Philippe Caubert est Philippe Caubert, avec son ton, son écriture, et sa simplicité, loin du mimétisme compliqué et technique que s’imposent les artistes de seul en scène, ou les imitateurs. Malgré toutes ses tentatives, il n’est pas Gérard Philipe mais il se raconte, il raconte une époque, il raconte son envie du plateau. Il faut beaucoup d’imagination pour faire vivre tout ça avec une chaise en bois. Et il faut de l’assurance et de l’ambition pour le faire en ses propres termes, ses propres conditions. Le Bac 68, c’était comme ça, ou presque, et c’est comme ça, ou presque, qu’il vous sera raconté.

 

Le Bac 68
De Philippe Caubère
Mise en scène Philippe Caubère
Avec Philippe Caubère

Du 4 octobre 2016 au 19 novembre à 20h.

Théâtre de l’Athénée
Square de l’Opéra-Louis Jouvet 75009 PARIS
Métro Opéra (lignes 3, 7, et 8) et Havre-Caumartin (lignes 3 et 9)
Réservation 01 53 05 19 19
www.athenee-theatre.com

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